Le bien-être à l'école: enjeux et stratégies gagnantes
Par Gaëlle Espinosa et Nadia Rousseau
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À propos de ce livre électronique
Parmi les disciplines étudiant le bien-être à l’école, la psychopédagogie, qui s’intéresse particulièrement à l’utilisation de théories et de recherches issues du domaine de la psychologie dans la résolution de problèmes en éducation, permet de miser sur le mieux-être des enfants et des adolescents en milieu scolaire. Cet ouvrage, composé de 15 chapitres proposant des réflexions et des travaux belges, canadiens, français et suisses, présente, d’une part, les enjeux du bien-être de l’élève à l’école et, d’autre part, les stratégies gagnantes pour tendre vers cet état de satisfaction. Il s’adresse aux professeurs, aux enseignants, aux futurs enseignants ou aux professionnels des services éducatifs complémentaires, tant pour susciter leurs réflexions que pour les outiller en matière de bien-être à l’école.
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Aperçu du livre
Le bien-être à l'école - Gaëlle Espinosa
Introduction
Le bien-être à l’école et l’apport de la psychopédagogie
Gaëlle Espinosa
Nadia Rousseau
CONCEPTS EXPLIQUÉS
DANS LE GLOSSAIRE
•Bien-être
•Psychopédagogie
Si les recherches menées sur le bien-être en contexte scolaire se développent dès les années 1970, elles connaissent un véritable essor à partir des années 2000. L’intérêt des «pays riches» (Pain, 2008) pour la question du bien-être de l’élève à l’école aboutit à la publication de nombreux travaux anglophones et francophones définissant et mesurant, notamment, le bien-être à l’école (p. ex., Bacro et al., 2011; Bradshaw et al., 2011; Coleman, 2009; O’Brien, 2008; Pollard et Lee, 2003). Ces travaux mettent également en exergue la relativité des critères de définition du concept de «bien-être» entre éléments objectifs, subjectifs ou contextuels (notamment géographiques, sociaux, institutionnels et familiaux). L’une de ces définitions indique que «le bien-être renvoie à un degré de satisfaction individuel, des élèves ou des personnels, dans différents aspects de la vie scolaire (activités pédagogiques, relations amicales, etc.)» (Murat et Simonis-Sueur, 2015, p. 5).
La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant de 1989 est notamment à l’origine de cet intérêt des pays riches pour la question du bien-être à l’école, formulant que «l’école doit viser à favoriser l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons». Les années qui suivent voient des pays anglo-saxons et européens promulguer différents textes de loi qui placent l’élève au centre du système éducatif, en énonçant que l’éducation et l’école publique doivent permettre à l’élève de développer une personnalité équilibrée et sa créativité, de s’insérer dans la vie sociale et d’exercer sa citoyenneté. Les enfants passant en effet une part importante de leur vie à l’école, la qualité de l’expérience scolaire est essentielle pour le développement de leurs compétences sociales et de leurs capacités d’apprentissage. L’école, en tant que lieu présentant nombre de situations et de personnes, doit donc s’efforcer de garantir les conditions de bien-être de tous les élèves qu’elle accueille, quel que soit leur niveau de scolarisation et quels que soient les moyens matériels et humains dont elle dispose. Au-delà de la difficulté à définir le concept de «bien-être», de nombreux pays, particulièrement anglo-saxons et scandinaves, ont ainsi fait du bien-être un axe important des réformes de leur système éducatif.
Parmi les différentes possibilités pour traiter du bien-être à l’école, la psychopédagogie, qui s’intéresse plus particulièrement à l’utilisation de théories et de recherches issues du domaine de la psychologie dans la résolution de problèmes en éducation, notamment dans la relation entre enseignement et apprentissage, est susceptible de permettre de viser le mieux-être, voire le bien-être des enfants et des adolescents à l’école. Ainsi, Rousseau (2016) met en évidence que dans une perspective psychopédagogique, la relation pédagogique entre l’enseignant et les apprenants est influencée par une série de facteurs, dont les caractéristiques individuelles de l’élève (p. ex., l’âge de l’élève, la personnalité et les expériences scolaires passées); les relations entre les individus (p. ex., la relation enseignant-élève et la relation entre pairs); les pratiques pédagogiques déployées (qui sont en fait des instruments de communication entre l’enseignant et les élèves); et les contenus enseignés (qui ne sont pas neutres et peuvent susciter des réactions).
La psychopédagogie étudie en effet, dans le contexte des processus quotidiens de l’apprentissage, les problèmes concernant le développement complet (tant physique qu’intellectuel) de l’enfant et de l’adolescent. Ce champ d’étude permet de repérer les potentialités cognitives, affectives et sociales de l’élève pour une meilleure adaptation des activités qui lui seront proposées par l’enseignant. La psychopédagogie permet ainsi, en tant que fil rouge de cet ouvrage, de viser non seulement un mieux-être de l’élève à l’école (et son éventuelle obtention de meilleures performances scolaires), mais également des pistes d’intervention à l’égard des professionnels de l’éducation. Le bien-être se trouve ainsi au cœur de divers enjeux, dont celui de la mise en place d’une «organisation spatiale et temporelle de l’école bienveillante qui place l’élève en tant qu’acteur de sa réussite et qui travaille sur les compétences comportementales des individus»; «c’est aussi engager l’édification d’une vision différente de l’école dont l’amélioration du climat scolaire est en filigrane» (Pau-Langevin, 2013).
Les intentions de cet ouvrage sont doubles. Il s’agit non seulement de présenter les enjeux du bien-être de l’élève à l’école, mais également les stratégies gagnantes pour tendre vers ce bien-être. Cet ouvrage se compose de 15 textes présentant des réflexions et travaux belges, canadiens, français et suisses, dont l’objectif commun est une meilleure connaissance de ce que vit l’élève (enfant, adolescent et jeune adulte) dans le contexte scolaire et des ressources que l’école peut mettre à sa disposition pour son mieux-être. Ces réflexions et travaux sont réalisés dans des contextes institutionnels, économiques et sociaux différents, mais s’inscrivent dans un même paradigme compréhensif: leurs auteurs s’interrogent sur les conditions du bien-être de l’élève à l’école et proposent des pistes d’intervention pour dépasser les enjeux présentés et atteindre un mieux-être de l’élève à l’école.
Les chapitres de cet ouvrage sont organisés en quatre parties: 1) «Des conditions du bien-être à l’école»; 2) «Le sentiment d’efficacité personnelle et la contrôlabilité»; 3) «L’autonomie et la responsabilisation»; 4) «La gestion du stress, de l’anxiété et des émotions». Ces parties présentent une progression dans l’ouvrage, allant du plus général au plus spécifique.
1.Des conditions du bien-être à l’école
La première partie de cet ouvrage traite de conditions susceptibles de permettre la réalisation du bien-être de l’élève à l’école. Les notions de climat et d’engagement scolaires, d’émotions et de discontinuité éducative y sont abordées.
Noémie Baudoin et Benoît Galand, dans un chapitre s’interrogeant sur l’influence que le climat scolaire d’un établissement peut avoir sur le bien-être des élèves, nous aident à comprendre la différence entre climat psychologique et climat collectif, à identifier les principales dimensions du climat scolaire et leurs composantes, et à dégager des pistes d’action en milieu scolaire pour favoriser le bien-être des élèves. Ces auteurs montrent, d’une part, que le climat scolaire permet d’expliquer des variations de bien-être entre différents environnements scolaires et, d’autre part, que certaines dimensions du climat seraient des leviers plus pertinents pour améliorer le bien-être des élèves, notamment le soutien social des enseignants, l’application de règles claires et cohérentes ou la lutte contre le harcèlement.
Dans un chapitre traitant de l’engagement scolaire, Isabelle Archambault et Elizabeth Olivier définissent cet engagement ainsi que ses dimensions, identifient les conséquences associées au désengagement des élèves et réfléchissent aux actions à implanter pour soutenir l’engagement scolaire des élèves. Ces auteures définissent l’élève engagé sur les plans comportemental, affectif et cognitif, et montrent que l’engagement affectif et cognitif doit se travailler en premier lieu et que des interventions sont susceptibles de faire la promotion de l’engagement, l’intervention à privilégier étant celle qui favorise l’appariement entre les besoins de l’élève et les attentes de son environnement.
Dans le chapitre suivant, Gaëlle Espinosa traite des émotions de l’élève à l’école et de l’importance de les reconnaître pour une meilleure adaptation, considérant que la question du bien-être de l’élève à l’école est très fortement liée à celle de ses émotions. Dans ce chapitre, l’auteure montre les liens existant entre le bien-être de l’élève et sa réussite ainsi qu’entre les émotions et la cognition, permettant une meilleure compréhension du rôle que jouent les émotions dans l’apprentissage. Elle propose également des pistes d’intervention permettant à l’élève de «vivre et faire avec» ses émotions. L’auteure indique enfin qu’initier l’élève à un apprentissage d’un bienvivre avec ses émotions passe par son initiation à la connaissance de soi et par l’écoute et l’expression de soi, ce qui demande divers essais.
Enfin, dans le dernier chapitre de cette partie, Benoit Dejaiffe aborde la notion de discontinuité éducative comme possibilité du bien-être de l’élève. L’auteur montre en quoi la discontinuité entre les trois principales instances éducatives que sont la famille, l’école et le groupe de pairs est nécessaire et propice au grandir et au bien-être des enfants. Il propose également des pistes de réflexion et d’action pour que chaque enfant se sente accueilli à l’école avec sa singularité. L’auteur souligne la nécessité de ne pas s’enfermer dans le piège de la continuité éducative et prône plutôt l’éclaircissement et la mise en œuvre d’une cohérence dans les finalités des projets et des actions éducatives de chacune des instances ainsi qu’à l’intérieur de chacune d’elles, cohérence dont les enfants ont besoin pour se sentir bien.
2.Le sentiment d’efficacité personnelle et la contrôlabilité
La deuxième partie de cet ouvrage aborde le sentiment d’efficacité personnelle de l’élève, permettant son accès à l’autoefficacité, et les attributions causales à l’origine, notamment, de la motivation de l’élève. Le sentiment d’efficacité personnelle de l’élève et ses attributions causales sont ainsi considérés comme des pistes pour développer son bien-être à l’école.
Pierre Vianin, dans un chapitre étudiant le lien entre le bien-être de l’élève à l’école et son autoefficacité, montre que la question du bien-être de l’élève à l’école est très fortement liée à celle des représentations qu’il se fait de son efficacité personnelle. Ce chapitre souligne ainsi les liens existant entre le bien-être de l’élève et son sentiment d’efficacité personnelle, et propose des pistes d’intervention permettant à l’élève de restaurer son autoefficacité, c’est-à-dire de passer de la résignation apprise à la contrôlabilité. L’auteur précise que le bien-être de l’élève à l’école dépend notamment de son sentiment de contrôlabilité et indique que le sentiment d’efficacité personnelle de l’élève peut se développer, en particulier grâce à l’attitude de l’adulte (enseignant, parents, etc.). Il propose enfin six pistes pour favoriser l’autoefficacité et la motivation de l’élève.
Dans la même lignée, le chapitre d’Isabelle Capron Puozzo se concentre sur la question du développement du sentiment d’efficacité personnelle de l’élève comme stratégie gagnante pour son bien-être à l’école. L’auteure s’interroge sur le bien-être lui-même, sur le lien entre bien-être et bonheur ainsi que sur la façon de développer le sentiment d’efficacité personnelle de l’élève pour accroître son bien-être à l’école. Elle souligne que le bien-être de l’élève à l’école, participant à son bonheur, est un enjeu fondamental pour le préparer à son avenir. Le sentiment d’efficacité personnelle se révèle donc être une piste pour développer ce bien-être à l’école: en effet, plus l’élève perçoit les apprentissages qu’il maîtrise, plus il se sent capable de relever des défis plus complexes et d’accroître ainsi son bien-être.
Sylvie Viola clôt cette partie par un chapitre permettant une meilleure compréhension des attributions causales en jeu chez les élèves afin d’aider les enseignants à mieux intervenir en classe. L’auteure définit les attributions causales et leur importance dans la motivation scolaire des élèves, identifie les rôles des acteurs (parents, enseignants et apprenants) au regard de ces attributions et présente des interventions pédagogiques permettant d’intervenir sur ces dernières. Elle indique enfin que si l’origine du système d’attributions causales de chaque apprenant dépend de son histoire personnelle, les enseignants, notamment, sont susceptibles de faire évoluer ou pas ce système en réfléchissant à leurs propres valeurs éducatives, en les partageant (entre collègues et avec les parents des élèves), en planifiant et en pilotant des situations d’apprentissage qui prennent en compte ces attributions.
3.L’autonomie et la responsabilisation
La troisième partie de cet ouvrage traite d’éléments susceptibles de permettre à l’élève de s’affirmer et de s’inscrire ainsi, volontairement, dans sa scolarité et dans un certain bien-être à l’école. Les notions d’autodétermination, d’engagement scolaire promu au moyen de la Process communication, de prévention de la procrastination, d’autonomie et de responsabilisation y sont abordées.
Nadia Rousseau, dans un chapitre sur le développement de l’autodétermination chez les jeunes comme moyen de soutenir leur bien-être à l’école, nous permet de comprendre ce qu’est l’autodétermination, de connaître ses composantes ainsi que les apports des comportements autodéterminés chez les jeunes. Elle situe la connaissance de soi dans le développement de comportements autodéterminés. L’auteure souligne notamment que, d’une part, l’autodétermination de l’élève favorise sa persévérance et son rendement scolaires, les transitions réussies et son bien-être psychologique et, d’autre part, l’enseignant autodéterminé est plus apte à favoriser son développement chez ses propres élèves. Elle outille enfin les intervenants scolaires pour soutenir le développement de l’autodétermination en contexte scolaire.
Sur l’engagement scolaire, cette fois, Nadia Rousseau propose de s’intéresser aux principes de la Process communication pour soutenir cet engagement chez les élèves. Le chapitre permet de situer la place de la communication à l’école ainsi que l’importance de la qualité de la relation enseignant-élève sur l’engagement, la réussite et l’adaptation des élèves à l’école. L’auteure indique ainsi que la communication joue un rôle de grande importance dans la qualité de la relation enseignant-élève, cette dernière pouvant favoriser (si elle est positive) l’engagement des élèves, leur réussite et leur adaptation à l’école, ou encore leur nuire (si elle est négative). La Process communication, facilitant ainsi la communication avec les élèves, offre donc un modèle accessible pour outiller les enseignants, voire contribuer au développement de leurs compétences communicationnelles en classe. Dans une certaine mesure, la Process communication peut également permettre à l’élève une meilleure connaissance de soi.
Frédérick Dionne, Guillaume Raymond et Marianne Armand, dans un chapitre traitant des stratégies d’intervention pour prévenir la procrastination chez les élèves, nous permettent de mieux comprendre la procrastination scolaire, ses causes et ses conséquences. Il apparaît en effet que la procrastination est un problème fréquent chez les élèves, pouvant affecter leur rendement et leur santé générale, et dont les différentes causes sont autant de cibles sur lesquelles il est possible d’intervenir. Le chapitre permet alors d’acquérir des stratégies utiles d’intervention afin de prévenir la procrastination scolaire chez les élèves en contexte individuel et de groupe.
Le quatrième et dernier chapitre de cette partie, rédigé par Isabelle Houot et Nathalie Lavielle-Gutnik, porte sur l’autonomie et la responsabilisation des jeunes. Les auteures définissent ces termes et s’interrogent sur la façon dont les jeunes peuvent être accompagnés dans le développement de leur autonomie et de leur responsabilisation pour qu’ils puissent se construire en tant que citoyens libres. Elles soulignent que l’autonomie et la responsabilisation ne se réduisent pas à la gestion individuelle des apprentissages et du parcours, et qu’elles doivent s’inscrire dans un processus d’émancipation, condition du bien-être. Elles signalent enfin que l’autonomie et la responsabilisation pédagogique des jeunes peuvent se développer, à condition de promouvoir des collectifs de travail (équipes pédagogiques) et d’apprentissage.
4.La gestion du stress, de l’anxiété et des émotions
Enfin, la quatrième et dernière partie de cet ouvrage aborde la question de la gestion du stress, de l’anxiété et des émotions en contexte scolaire. L’accès à cette gestion par l’élève, éventuellement accompagné et soutenu par ses enseignants ou intervenants, est ainsi considéré comme une piste pour tendre vers son mieux-être à l’école.
Sarah Leclaire et Sonia Lupien, dans un chapitre portant sur le stress et ses enjeux en milieu scolaire, définissent le stress humain et nous permettent ainsi de mieux connaître ses effets sur le corps et le cerveau. Elles indiquent également comment reconnaître les principales sources de stress et nous informent sur les différentes solutions permettant de diminuer un stress trop élevé. Ces auteures soulignent qu’une vie sans stress est impossible, indiquant par ailleurs que l’anxiété n’est pas du stress. Elles présentent plusieurs facteurs pouvant expliquer la différence de vulnérabilité au stress entre individus et préviennent qu’aucune solution miracle n’existe; il s’agit surtout de trouver celle qui fonctionne pour soi. Dans cette foulée, les auteures proposent un aide-mémoire, le CINÉ (Contrôle faible, Imprévisibilité, Nouveauté et Ego menacé), pour aider tout individu à repérer les situations stressantes pour lui, affirmant que l’une des meilleures façons de négocier son stress est de savoir décortiquer ses stresseurs selon ces quatre caractéristiques.
Centré sur la gestion du stress, le chapitre de Michelle Dumont expose l’adolescence comme une période particulièrement stressante pour les jeunes en portant une attention particulière au stress vécu à l’école. Ainsi, les principaux facteurs associés au stress des adolescents sont rapportés. En réponse à ces facteurs, l’auteure présente plusieurs stratégies de gestion de stress, issues du programme Funambule. Pour une gestion équilibrée du stress. Les stratégies proposées s’articulent autour de quatre thématiques: le travail sur la perception du stress, le travail sur le corps, le travail sur les pensées et le travail sur les stratégies adaptatives. Inspiré de l’approche cognitive-comportementale et de la théorie psychologique du stress et du coping, le programme, testé auprès des adolescents, est associé à des retombées positives sur la gestion du stress de ces derniers.
Dans un chapitre traitant de l’anxiété aux évaluations des adolescents, Michelle Dumont s’attarde cette fois sur l’anxiété aux évaluations et ses différentes composantes, et présente les facteurs explicatifs y étant associés. Elle montre ainsi que l’anxiété aux évaluations correspond à un système complexe de réactions cognitives, émotionnelles, physiologiques et comportementales qui serait activé lorsque des situations d’évaluation sont jugées menaçantes pour l’élève. L’auteure fournit également quelques stratégies pour réduire l’anxiété ressentie dans un contexte d’évaluation: une plus grande acceptation de sa fragilité en situation d’évaluation, le développement d’un sentiment d’autoefficacité pour gagner en maîtrise, la coopération entre élèves et l’adoption de différentes stratégies pour mieux se préparer, comme, par exemple, parvenir à se calmer et à se concentrer une fois que les élèves sont plongés dans la situation d’évaluation.
Dans le dernier chapitre constitutif de cette partie, Frédérick Dionne et Stéphanie Bergevin traitent des pensées et des émotions difficiles en contexte scolaire afin de mieux les comprendre et de permettre ainsi une meilleure intervention. Les auteurs identifient les principaux états émotionnels et cognitifs vécus par les jeunes d’âge scolaire en lien avec leur apprentissage. Ils soulignent en outre que les pensées et les émotions négatives sont normales dans la vie de tous les jours; cependant, non considérées, elles peuvent avoir un impact négatif sur les apprentissages. Enfin, les auteurs présentent des stratégies d’intervention à utiliser en classe par les enseignants pour favoriser l’identification, l’accueil, l’acceptation et la régulation émotionnelle chez ces jeunes.
Pour terminer cet ouvrage, nous proposons une conclusion générale qui introduit le principe de loyauté partagée ainsi qu’un glossaire réunissant les concepts clés et leur définition, tirés des chapitres de cet ouvrage. Que vous soyez professeurs, enseignants, futurs enseignants ou professionnels des services éducatifs complémentaires, cet ouvrage saura tant susciter vos réflexions que vous outiller en matière de bien-être à l’école.
BIBLIOGRAPHIE
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Le climat scolaire influence-t-il le bien-être des élèves?
Noémie Baudoin
Benoît Galand
CIBLES
•Comprendre la différence entre climat psychologique et climat collectif.
•Identifier les principales dimensions du climat scolaire et leurs composantes.
•Dégager des pistes d’action en milieu scolaire pour favoriser le bien-être des élèves.
CONCEPTS EXPLIQUÉS
DANS LE GLOSSAIRE
•Climat collectif
•Climat d’apprentissage
•Climat de sécurité
•Climat individuel
•Climat relationnel
•Climat scolaire
QUESTIONS CLÉS
•Le niveau de bien-être varie-t-il d’une école ou d’une classe à l’autre?
•Peut-on agir sur le bien-être des élèves en améliorant le climat scolaire? Comment?
L’école est le second lieu principal, après le cadre familial, où enfants et adolescents passent leurs heures d’éveil. Elle a de ce fait longtemps été considérée comme un espace privilégié où mettre en œuvre des programmes d’intervention visant à améliorer leur bien-être. Mais l’école est surtout un lieu essentiel pour le développement et la socialisation des jeunes (Eccles et Roeser, 2011). Dès lors, on peut se demander si l’environnement scolaire dans lequel évoluent enfants et adolescents ne pourrait pas également affecter la manière dont ils se sentent.
Des variations significatives entre classes ou entre écoles ont effectivement été mises en évidence concernant le bien-être des élèves. Cela signifie qu’une partie des différences de niveau de bien-être observées entre élèves peut être mise en lien avec les caractéristiques de l’environnement scolaire dans lequel ils évoluent. Cette part s’élève de 2% à 15% selon le système scolaire concerné, mais aussi selon la manière de mesurer le bien-être (Baudoin, 2018). Celui-ci peut en effet se référer à la fois à une dimension affective (p. ex., la fréquence d’émotions ressenties, comme la joie ou l’anxiété), à une dimension plus cognitive (p. ex., l’évaluation subjective que l’élève fait de sa satisfaction de vie) ou encore à une dimension psychopathologique (p. ex., la fréquence de symptômes dépressifs ressentis). Les études qui se sont intéressées à la fois à l’effet-classe et à l’effet-établissement tendent à montrer que la classe fréquentée par l’élève jouerait un rôle plus important que l’établissement (Baudoin, Hospel et Galand, 2014; Opdenakker et Van Damme, 2000), et ce, même si des différences peuvent exister entre systèmes scolaires en fonction de la manière dont est organisé l’enseignement. Mais comment peut-on expliquer ces différences entre classes ou entre écoles?
On peut tout d’abord se demander si les caractéristiques structurelles des établissements ou les caractéristiques sociodémographiques des élèves composant le public scolaire peuvent affecter le niveau de bien-être des élèves. Se sent-on mieux dans un établissement privé ou public? Dans un établissement de grande ou de petite taille? Se sent-on moins bien dans une école accueillant un public défavorisé ou très favorisé sur le plan socioéconomique? Ou dans une classe avec une majorité de garçons ou de filles? Globalement, les recherches menées dans différents systèmes scolaires indiquent que le bien-être des élèves n’est pas lié à ce type de caractéristiques scolaires (Denny et al., 2011; Peetsma et al., 2006; Verkuyten et Thijs, 2002). Afin de comprendre les effets de l’environnement scolaire sur le bien-être, de nombreux chercheurs se sont dès lors davantage tournés vers le concept de climat scolaire.
Une partie des différences de niveau de bien-être observées entre élèves peut être mise en lien avec les caractéristiques de l’environnement scolaire dans lequel ils évoluent.
Nous présentons dans ce chapitre le concept de climat scolaire ainsi que la distinction entre la sphère psychologique et la sphère collective. Nous développons ensuite trois grandes dimensions du climat scolaire et revenons finalement sur les apports et les limites de cette littérature pour l’intervention sur le terrain.
1.Le climat scolaire psychologique et collectif
Lorsque l’on évoque le climat scolaire, tout un chacun a habituellement une vague idée de ce que cela peut représenter. Il est pourtant difficile de définir clairement ce concept, qui ne fait pas consensus dans la littérature scientifique. Le climat scolaire serait une impression générale partagée par les élèves, les enseignants et les parents concernant l’environnement scolaire. Cette perception partagée refléterait à la fois les normes, les valeurs, les relations interpersonnelles, les pratiques des enseignants ou encore l’organisation de l’école (Cohen et al., 2009). Tous ces éléments mèneraient les membres d’une école à percevoir une atmosphère générale pouvant se structurer en différentes dimensions: «Dans cette école, on se sent en sécurité, les relations entre les gens sont bonnes.» Ou encore: «Dans cette classe, on s’en fiche d’apprendre quoi que ce soit!» Les dimensions liées à la sécurité, aux relations sociales et à l’apprentissage sont parmi les plus développées dans la littérature (Cohen et al., 2009; Zullig, Huebner et Patton, 2011).
L’un des principaux points de divergence entre les chercheurs concerne l’échelle à laquelle traiter le climat scolaire. En effet, certains s’y sont intéressés d’un point de vue individuel, arguant que la perception personnelle de chaque élève du climat scolaire serait le lien entre les caractéristiques objectives de l’environnement (pratiques des enseignants, comportements des autres élèves, etc.) et les conséquences observées sur cet élève (bien-être, motivation, comportements sociaux, etc.). Si ce climat psychologique est une variable intéressante pour comprendre les processus individuels, cette dernière se révèle moins pertinente pour les praticiens qui souhaitent identifier «objectivement» quels sont les leviers potentiels dans l’environnement pour améliorer le bien-être (Marsh et al., 2012). En effet, il est probable que l’élève présentant des troubles dépressifs voie tout en noir dans son environnement. Ou encore que l’élève mal dans sa peau et présentant des troubles du comportement ait une vision plus négative des pratiques mises en place par ses enseignants. La perception individuelle du climat est biaisée par le vécu et le ressenti propres à chaque élève et ne représente pas une mesure valide pour caractériser l’environnement. D’autres auteurs s’intéressent donc au climat collectif constitué par la perception partagée par différents élèves. En demandant à tous les élèves d’évaluer le climat scolaire et en les considérant comme différents observateurs d’une même réalité, ces études permettent d’appréhender de manière plus fiable l’atmosphère générale régnant dans une classe ou un établissement. Afin de tenir compte du fait que les élèves sont regroupés au sein de classes elles-mêmes regroupées dans des établissements scolaires, ces chercheurs utilisent des modèles statistiques multiniveaux (Bressoux, 2007). Dans le cadre de ce chapitre, nous nous intéressons principalement aux travaux qui ont étudié l’effet du climat scolaire sur le plan collectif, comme reflet de l’environnement scolaire. Se sent-on par exemple mieux dans une classe où les élèves s’entendent bien en général? Ou moins bien dans une classe où les comportements de harcèlement sont nombreux? Ressent-on davantage de bien-être lorsque l’enseignant fait participer les élèves à l’élaboration des règles de vie de la classe? Notre propos est structuré autour des trois dimensions du climat les plus étudiées dans la littérature et déjà mentionnées auparavant: le climat relationnel, le climat de sécurité et le climat d’apprentissage (tableau 1.1).
Le climat scolaire serait une impression générale partagée par les élèves, les enseignants et les parents concernant l’environnement scolaire.
TABLEAU 1.1. Dimensions du climat scolaire et facteurs associés
2.Le climat relationnel
Le climat relationnel renvoie à la perception partagée de la qualité des relations entretenues au sein de la classe ou de l’école, que ce soit entre élèves ou entre élèves et enseignants.
Tout d’abord, on considère qu’un enseignant participe à la création d’un climat relationnel positif lorsqu’il apporte du soutien social à ses élèves, c’est-à-dire qu’il se soucie d’eux, leur témoigne du respect, s’intéresse à ce qu’ils vivent et est disponible en cas de besoin. Les études sur les contextes scolaires ont mis en évidence à de nombreuses reprises l’effet bénéfique de telles pratiques sur le bien-être des élèves, tous types de mesures confondus (Rimm-Kaufman et al., 2015; Torsheim et Wold, 2001). Le soutien social fourni par les enseignants se révèle souvent la caractéristique de l’environnement scolaire la plus fortement associée au niveau de bien-être des élèves au sein d’une classe ou d’une école (encadré 1.1). Ce soutien aurait un effet bénéfique direct pour chaque élève, mais également un effet protecteur pour le bien-être des élèves confrontés à des événements de vie stressants (Galand et Hospel, 2013; Rueger et al., 2016).
Il faut souligner que cet effet positif et important du soutien social des enseignants est aussi présent durant l’adolescence (Rueger et al., 2016). En effet, nombre d’auteurs insistent sur la place croissante que prennent les groupes de pairs à cette période du développement, ce qui pourrait laisser penser que le rôle des enseignants devient moins essentiel. Or, il n’en est rien. Les enseignants restent des personnes-ressources importantes comme sources de soutien social pour les adolescents.
Ensuite, le climat relationnel est également lié à la qualité des relations entre les élèves. Les études sur les effets contextuels ont montré que le niveau de bien-être des élèves est supérieur dans les environnements scolaires où les élèves sont attentifs aux autres, apprécient être ensemble et peuvent compter les uns sur les autres (Balluerka et al., 2016; Meilstrup et al., 2015). L’effet favorable du climat social positif entre pairs s’explique notamment par la probabilité accrue pour chaque élève de trouver du soutien social au sein de sa classe ou de son école en cas de besoin. Mais les recherches indiquent que cet effet positif de la bonne entente générale va au-delà de ce bénéfice individuel, créant une dynamique relationnelle favorable au bien-être du plus grand nombre.
ENCADRÉ 1.1.
Exemples de