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Actualités de droit fiscal – Anno 2013
Actualités de droit fiscal – Anno 2013
Actualités de droit fiscal – Anno 2013
Livre électronique682 pages7 heures

Actualités de droit fiscal – Anno 2013

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Les actualités en droit fiscal, thème du présent ouvrage, se déclinent en cinq contributions, sélectionnées en fonction de leur actualité législative ou jurisprudentielle.

La fiscalité de l’épargne s’est considérablement durcie : depuis le 1er janvier 2013, les intérêts et dividendes recueillis par les habitants du Royaume sont, en principe, taxés au taux uniforme de 25%. Dans ce contexte, Denis-Emmanuel Philippe met en lumière l’intérêt des habitants du Royaume à recourir à certains véhicules sociétaires afi n d’alléger la pression fi scale sur les revenus de leur patrimoine mobilier.

Frédéric Janssen, André Bailleux et Rafael Alvarez Campa font ensuite le point sur la procédure spéciale de régularisation fi scale, qui a été profondément modifiée par la loi du 11 juillet 2013.

Marc Bourgeois, Jordan Oprenyeszk et Nathalie Pirotte font, quant à eux, le point sur la matière du recouvrement fiscal. Ils analysent trois thématiques particulièrement bouillonnantes en pratique : la délégation du pouvoir de viser et de rendre exécutoire la contrainte en matière de T.V.A. ; le recouvrement fi scal auprès de « tiers » dans le domaine des impôts sur les revenus ; la répartition des compétences juridictionnelles entre le juge fi scal et le juge des saisies en matière de recouvrement d’impôts.

Est-il encore intéressant fiscalement aujourd’hui, pour les avocats, d’exercer en société ? Jean-Michel Degée et Xavier Pace passent au peigne fin les axes principaux du nouveau dispositif.

Enfin, on sait qu’à partir du 1er janvier 2014, les avocats deviendront des assujettis ordinaires à la T.V.A. Jean Bublot s’attèle à décrire les enjeux et les conséquences concrètes de ce nouveau statut, après en avoir expliqué les fondements juridiques et politiques.
LangueFrançais
Date de sortie25 oct. 2013
ISBN9782804461737
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    Actualités de droit fiscal – Anno 2013 - Éditions Larcier

    1

    L’utilisation par les résidents de certaines structures sociétaires luxembourgeoises :

    la S.P.F., la SICAV-SIF et la SOPARFI

    Denis-Emmanuel Philippe

    avocat

    maître de conférences à l’U.Lg. (Tax Institute)

    Sommaire

    Section 1

    L’évitement de l’impôt et la voie grand-ducale : contexte général

    Section 2

    La société de gestion de patrimoine familial

    Section 3

    Le fonds d’investissement spécialisé

    Section 4

    La SOPARFI

    Conclusion générale

    Section 1

    L’évitement de l’impôt et la voie grand-ducale : contexte général

    1. Rehaussement du niveau d’imposition des revenus mobiliers en Belgique. La fiscalité de l’épargne s’est considérablement durcie. Le récent rehaussement du taux de taxation des revenus mobiliers est, notamment, venu réduire l’attrait de la fiscalité belge des valeurs mobilières : depuis le 1er janvier 2013, les intérêts et dividendes recueillis par les habitants du Royaume sont, en principe, imposés au taux uniforme de 25 %¹.

    Cette intervention législative a, il est vrai, le mérite d’harmoniser le niveau d’imposition des intérêts (auparavant taxés au taux de 15 %, et puis de 21 %) et des dividendes, tout en procurant une source de recettes supplémentaires pour le gouvernement.

    Il ne faut toutefois pas perdre de vue que le capital est par nature mobile et qu’il a une tendance naturelle à se loger là où la fiscalité est la plus douce. Les habitants du Royaume peuvent ainsi parfaitement, en vertu de la liberté de circulation des capitaux, placer leur épargne là où la fiscalité est la plus favorable. Et, ce n’est un mystère pour personne : le Luxembourg est l’une de leurs destinations privilégiées.

    A. La société de gestion de patrimoine familial

    1. Le charme des S.P.F.

    2. Un montage d’optimisation fiscale à la mode : le transfert d’un patrimoine à une société luxembourgeoise faiblement taxée. Un montage d’évitement de l’impôt belge sur les revenus mobiliers classique, qui est aujourd’hui à la mode auprès des particuliers fortunés (High Net Worth Individuals), consiste en la cession de leur patrimoine à une société² luxembourgeoise bénéficiant d’un régime fiscal de faveur.

    3. La « holding 29 », remplacée par la S.P.F. Jusqu’il y a peu, les holdings luxembourgeoises régies par la loi du 31 juillet 1929, qu’on appelait couramment « holdings 29 », étaient bien connues des particuliers belges en mal d’optimisation fiscale³. Elles échappaient en effet à tout impôt sur leurs revenus (dividendes, intérêts,…) et les plus-values qu’elles réalisaient. Ces véhicules défiscalisés ont définitivement disparu du paysage fiscal luxembourgeois depuis le 31 décembre 2010, suite à leur condamnation en tant qu’aides d’État par la Commission européenne⁴.

    Depuis l’abolition de la holding 29, les résidents belges peuvent avoir recours à une nouvelle structure exemptée pour placer leur épargne : la société de gestion de patrimoine familial (« S.P.F. »), introduite par la loi du 11 mai 2007.

    À l’instar de la holding 29, la S.P.F. bénéficie d’un régime fiscal privilégié (exemption des impôts luxembourgeois sur le revenu et sur la fortune ; exonération de retenue à la source sur les distributions de dividendes, etc.), tout en étant compatible avec le droit européen. Outre son statut fiscal favorable, le succès⁵ de la S.P.F. tient au fait qu’elle est un instrument de gestion du patrimoine mobilier de personnes physiques simple et flexible (pas d’obligation de diversification des risques, absence de contrôle prudentiel de la C.S.S.F.) et un outil propice à la planification patrimoniale et successorale. Nous aborderons ces différents éléments dans le cadre de l’analyse du régime juridique (Section 2, A) et fiscal (Section 2, B) de la S.P.F.

    4. Utilisation de la S.P.F. : illustration. Voici un habitant du Royaume, Monsieur Dupont, disposant d’un portefeuille-titres composé d’actions et d’obligations. Par principe, les intérêts et les dividendes sont soumis à l’impôt des personnes physiques (« I.P.P. ») au taux de 25 %. Rien de plus facile a priori pour Monsieur Dupont que d’éviter l’impôt belge : il lui suffit de transférer son patrimoine mobilier à la S.P.F., où les revenus mobiliers ne seront pas imposés.

    Il faut toutefois manier la S.P.F. avec précaution.

    2. Points d’attention et recommandations pour un bon usage des S.P.F.

    5. L’utilisation de la S.P.F. et les mesures anti-abus. Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si le fisc belge ne dégainait pas ses armes dissuasives. L’article 344, § 2, du C.I.R. permet ainsi de rendre inefficace le transfert de biens mobiliers productifs de revenus (actions, obligations) à une société étrangère bénéficiant d’un régime fiscal privilégié. Transposée au cas d’espèce, cette mesure permettrait au fisc belge de taxer Monsieur Dupont sur les revenus de son portefeuille-titres comme s’il ne l’avait pas transféré à la S.P.F.

    À notre estime, cette mesure anti-abus n’enlève pas, à elle seule, tout intérêt à la S.P.F. : certains montages permettent d’échapper à son champ d’application (strictement défini) et, partant, d’obtenir l’avantage fiscal escompté (évitement de l’impôt belge sur les revenus mobiliers). La véritable question, d’une actualité criante, consiste toutefois à savoir si certaines stratégies déployées auparavant par les habitants du Royaume pour contourner l’article 344, § 2, du C.I.R., ne doivent pas être aujourd’hui complètement délaissées pour risque d’abus de droit, en vertu de la nouvelle mouture de l’article 344, § 1er, du C.I.R. (Section 2, C).

    6. La S.P.F. : un véhicule de thésaurisation. Il est de bonne stratégie d’utiliser la S.P.F. comme véhicule de thésaurisation. Cette structure convient ainsi aux particuliers qui n’ont pas besoin de leurs revenus du capital pour vivre⁶.

    Si les besoins financiers de Monsieur Dupont sont tels qu’il est contraint d’ouvrir souvent le robinet, en se faisant distribuer les revenus financiers de la S.P.F. sous forme de dividendes, le jeu n’en vaut plus la chandelle : celui-ci devra alors payer son tribut au fisc belge à raison du dividende recueilli. Sortir des fonds de la S.P.F. peut, on le voit, venir anéantir l’économie fiscale escomptée lors de la mise en place de l’opération. En revanche, aussi longtemps que la S.P.F. mettra ses bénéfices en réserves (et réinvestira ses revenus financiers), Monsieur Dupont échappera en principe à l’impôt belge.

    Monsieur Dupont souhaitera toutefois, à un moment ou un autre, réaliser un « return » sur son investissement. Aussi, nous tâcherons de déterminer quelles sont les techniques de désinvestissement les plus intéressantes fiscalement (Section 2, D).

    7. La S.P.F. : un véhicule exclu du champ d’application des conventions préventives de la double imposition. Lors de la mise en place de la structure, il faut tenir compte du fait que la S.P.F. est exclue du champ d’application des conventions préventives de la double imposition conclues par le Luxembourg et des directives européennes. Il s’ensuit que (i) la S.P.F. ne pourra bénéficier des réductions des retenues à la source sur dividendes et intérêts et que (ii) les plus-values de cessions de titres pourraient être taxées dans le pays de la société émettrice, en application de sa législation interne. Nous tâcherons de proposer plusieurs solutions à ce problème (Section 2, E).

    8. La S.P.F. : une structure discrète ? On a souvent pu lire que la S.P.F. était une structure juridique discrète. Ceci n’est pas inexact : la S.P.F. est couverte par le secret bancaire luxembourgeois. Toutefois, le propos doit être nuancé.

    D’une part, en vertu de l’avenant du 16 juillet 2009 de la Convention préventive de la double imposition entre la Belgique et le Luxembourg (qui rentrera prochainement en vigueur), le fisc belge pourrait demander des informations au fisc luxembourgeois concernant des informations détenues par une S.P.F. (notamment son actionnariat).

    D’autre part, l’habitant du Royaume doit mentionner sa participation dans une S.P.F. dans sa déclaration à l’I.P.P., en application de la loi du 30 juillet 2013 (Section 2, F).

    9. Substance de la S.P.F. Enfin, un point crucial ne doit pas être perdu de vue : la S.P.F. ne peut en aucun cas être considérée comme une coquille vide. Il faut donc doter la S.P.F. d’une réelle substance économique avec un minimum de structure locale (Section 2, G).

    B. Le fonds d’investissement spécialisé

    1. Les avantages d’un investissement dans des actions de capitalisation d’une SICAV-SIF

    10. Une autre technique d’évitement de l’impôt : l’investissement dans des actifs défiscalisés. Une autre technique d’optimisation fiscale consiste en la réorganisation du patrimoine, de manière à ce qu’il soit (davantage) composé de classes d’actifs moins taxées, voire exonérées⁷.

    La souscription, par les habitants du Royaume, de produits d’assurance-vie, tels que les produits de la branche 21 (bons d’assurance) ou les produits de la branche 23 (produits liés à des fonds d’investissement) – le plus souvent d’origine luxembourgeoise – est un exemple classique de produit d’épargne défiscalisé⁸.

    L’acquisition de parts de sicav dites de « capitalisation » en est une autre illustration. La sicav se caractérise par le fait qu’un capital recueilli auprès de différents investisseurs individuels est géré de manière collective, professionnelle et diversifiée. L’attrait principal de la formule de capitalisation réside dans la faculté de « transformer » des revenus imposables en revenus exonérés, à travers la réalisation de plus-values exonérées lors du rachat des actions de la sicav (art. 21, 2°, C.I.R.).

    11. La SICAV-SIF. Le Grand-Duché du Luxembourg a créé, au fil des années, une palette impressionnante de fonds d’investissement, lesquels ont drainé l’épargne des habitants du Royaume.

    À côté de la traditionnelle SICAV « grand public », le Luxembourg s’est doté de fonds réservés à des investisseurs avertis, tels que le fonds d’investissement spécialisé (specialized investment fund, ci-après « SIF ») créé par la loi du 13 février 2007.

    La SICAV-SIF a pour objet principal le placement collectif de fonds en valeurs, dans le but de diversifier le risque d’investissement et de faire bénéficier ses investisseurs des résultats de la gestion des actifs. La SICAV-SIF est soumise au contrôle de l’organisme de surveillance (Commission de Surveillance du Secteur Financier, ci-après « C.S.S.F. »). Elle bénéficie toutefois d’une réglementation flexible. Ainsi, une SICAV-SIF peut investir dans toutes sortes d’actifs ; elle est par ailleurs soumise à une politique d’investissement (règle de diversification des risques) relativement light.

    La souplesse du cadre réglementaire de la SICAV-SIF (Section 3, A) se concilie avec un statut fiscal de faveur (Section 3, B), comparable à celui de la S.P.F. (à quelques nuances près) : la SICAV-SIF est en effet exonérée de tout impôt sur les revenus ou sur la fortune ; les distributions faites par la SIF sont exonérées de retenue à la source.

    12. La souscription d’actions de capitalisation d’une SICAV-SIF : une structure en vogue auprès des habitants du Royaume. Illustration. Voici une famille belge aisée disposant d’une fortune confortable de plusieurs millions d’euros, placés auprès d’une banque privée luxembourgeoise. Le père, Monsieur Dupont, investit ses avoirs dans un nouveau compartiment « dédié » d’une SICAV-SIF gérée par la banque (dont la réputation fait référence sur la place) et placée sous la surveillance prudentielle de la C.S.S.F.

    Constatant l’excellente performance des investissements du compartiment au cours des dernières années, Monsieur Dupont décide de sortir de la SICAV-SIF et demande le remboursement de ses actions de capitalisation par la SICAV-SIF. Il réalise à cette occasion une plus-value considérable.

    À suivre deux récentes décisions anticipées rendues par le Service des Décisions Anticipées (« S.D.A. ») en date du 22 février 2011, pareille plus-value devrait être exonérée en application de l’article 21, § 2, du C.I.R. En outre, l’article 344, § 2, du C.I.R. ne devrait pas trouver à s’appliquer à la souscription d’actions de la SICAV-SIF.

    2. Bouleversement du paysage fiscal des fonds d’investissement

    Il n’est dès lors guère étonnant de constater que la SICAV-SIF exerce une véritable fascination chez les habitants du Royaume fortunés. Il faut toutefois se garder de conclure trop hâtivement que l’investissement dans des parts de SICAV-SIF bénéficierait systématiquement d’un régime fiscal attractif.

    13. Extension de la taxe sur l’épargne. L’article 19bis du C.I.R. prévoit un prélèvement de 25 % sur certains O.P.C. qui investissent plus de 25 % en créances, également dénommé « taxe sur l’épargne ». Jusqu’il y a peu, cette taxe frappait uniquement les plus-values réalisées par des investisseurs particuliers lors du rachat de parts de capitalisation d’O.P.C.V.M. autorisés conformément à la directive 2009/65/CE du 13 juillet 2009, c’est-à-dire les O.P.C.V.M. disposant d’un « passeport européen ». Les SICAV-SIF n’ayant pas de passeport européen, elles passaient systématiquement à travers les mailles du filet. La loi du 30 juillet 2013 portant des dispositions diverses⁹ a modifié l’article 19bis du C.I.R., de manière à traiter les O.P.C.V.M. sans passeport européen de la même façon que les O.P.C.V.M. avec passeport européen. La nouvelle rédaction implique, à notre estime, que les plus-values réalisées par des personnes physiques belges, lors du rachat de parts de capitalisation de certaines SICAV-SIF monétaires ou obligataires, sont désormais susceptibles d’être soumises à la taxe sur l’épargne.

    La SICAV-SIF a pris une telle place parmi les produits de placement des habitants du Royaume sophistiqués, qu’il nous a paru important d’analyser toutes ces problématiques fiscales (Section 3, C).

    C. La SOPARFI

    1. Utilisation de la holding comme véhicule de gestion

    et de transmission d’une entreprise familiale

    14. Définition de la holding. La société holding, notion générique et difficile à appréhender, a pour activité essentielle la détention de participations dans d’autres sociétés¹⁰.

    15. La holding : un outil idéal pour assurer la pérennité et transmettre une entreprise familiale. La création d’une société holding peut procéder de considérations diverses, notamment patrimoniales : elle peut ainsi constituer un instrument idéal pour assurer la pérennité et la transmission d’un patrimoine familial (société d’exploitation).

    Voici un chef de famille qui est à la tête d’une société opérationnelle. S’il est soucieux de (i) transférer son entreprise à ses enfants dans le cadre d’une planification successorale, il entend également (ii) en conserver le contrôle, (iii) continuer à percevoir un certain revenu et (iv) maintenir le caractère familial de l’entreprise. Afin d’atteindre ces objectifs, le pater familias peut constituer une société holding, à laquelle il transfèrera les actions de la société d’exploitation :

    (i) afin d’éviter les droits de succession, le père de famille peut donner à ses enfants les actions de la société holding, le cas échéant devant un notaire étranger (Pays-Bas)¹¹ ou devant un notaire belge avec application des taux réduits¹² ;

    (ii) pour garder le contrôle de la société d’exploitation, il peut se faire nommer administrateur statutaire de la société holding (en veillant à choisir la forme sociale offrant la plus grande stabilité possible à son mandat, par exemple la société en commandite par action) ;

    (iii) pour continuer à percevoir les revenus de la société d’exploitation, il peut transmettre à ses enfants la nue-propriété des actions de la société holding, en se réservant l’usufruit ;

    (iv) le maintien du caractère familial peut enfin être assuré en limitant la négociabilité des titres (par le choix d’une forme sociale appropriée et/ou par des limitations conventionnelles à la libre cessibilité des titres)¹³.

    16. Les avantages fiscaux de la transmission d’une participation à une société holding. Par ailleurs, cette structure présente des avantages fiscaux indéniables.

    Avant l’opération, le chef de famille supportait la charge du précompte mobilier (au taux de 25 %) sur les distributions de dividendes faites par la société opérationnelle.

    Une fois la structure mise en place, les distributions de dividendes de la société opérationnelle à la société holding seront exonérées de précompte mobilier, dès lors que la holding détient 10 % des actions de la société opérationnelle pendant un an (art. 106, § 6, A.R./C.I.R.). La holding pourra déduire de ses bénéfices les dividendes perçus à concurrence de 95 %, en application du régime des « revenus définitivement taxés » (« R.D.T. »). Ensuite, la holding veillera soigneusement à ne pas redistribuer les dividendes recueillis au chef de famille (afin d’éviter le précompte mobilier de 25 %) et procédera à des réductions de capital et/ou au remboursement du prix de vente des actions de la société opérationnelle, sans charge fiscale.

    Ce montage est particulièrement avantageux lorsque la société opérationnelle dispose de liquidités importantes à son actif, et de réserves taxées à son passif : les liquidités de la société opérationnelle peuvent en effet être rapatriées de la société opérationnelle en direction du chef de famille (à travers la holding) quasiment sans friction fiscale (réalisation d’un step up).

    La plus-value réalisée par le chef de famille, lors de la cession de sa participation à la société holding, n’échappera à l’impôt que si l’opération s’inscrit dans le cadre de la gestion normale du patrimoine privé (art. 90, 9°, 1er tiret, C.I.R.). Or, l’application de cette exonération ne va pas de soi. L’Administration a en effet tendance à taxer pareilles plus-values dites « internes » au titre de revenus divers, au motif que l’opération excèderait la sphère de la gestion normale du patrimoine privé¹⁴. Dans son avis du 22 mars 2013, le S.D.A. a déclaré qu’il examinerait toujours l’opération projetée à la lumière des critères qui sont invoqués dans la jurisprudence¹⁵. Il est particulièrement piquant de relever que le S.D.A. regardera également si « l’opération (apport/vente) n’a pas pour but la distribution sans taxation des liquidités excédentaires créées auparavant au sein des sociétés opérationnelles »¹⁶.

    La prudence est donc de mise, d’autant plus que le nouvel article 344, § 1er, du C.I.R. pourrait, dans certains cas « agressifs », être invoqué par le fisc dans le but de réclamer le précompte mobilier sur les distributions de dividendes faites par la société opérationnelle¹⁷.

    2. Perte d’attractivité du régime fiscal belge des holdings

    17. La nostalgie du régime fiscal antérieur. Auparavant, le régime fiscal belge des sociétés holdings était parfaitement compétitif. La Belgique rivalisait ainsi dans ce domaine avec ses deux principaux concurrents, les Pays-Bas et le Luxembourg.

    Parmi les principaux attraits uniques du dispositif belge, on pouvait relever l’exonération intégrale et quasiment inconditionnelle des plus-values sur actions (absence de durée minimale de détention ou de seuil minimal de participation). Cet atout compensait largement la déduction de 95 % (au lieu de 100 %) des dividendes recueillis.

    Force est toutefois de reconnaître que le régime belge des holdings est en déclin.

    18. Un régime d’exonération des plus-values sur actions écorné. D’abord, le régime d’exonération des plus-values sur actions a, au gré des lois successives, été écorné.

    Dans un premier temps, la loi-programme du 29 mars 2012 est venue subordonner le régime d’exonération des plus-values sur actions à une condition de détention en pleine propriété pendant une période ininterrompue d’au moins un an (art. 192 C.I.R.)¹⁸. Si cette condition n’est pas remplie, la plus-value sur actions sera imposée au taux distinct de 25,75 % (contribution complémentaire de crise incluse).

    Dans un second temps, la loi-programme du 27 décembre 2012 a instauré une nouvelle taxe sur les plus-values sur actions de 0,412 % (contribution complémentaire de crise incluse)¹⁹. Ce prélèvement frappe les plus-values sur actions ou parts détenues depuis plus d’un an par des sociétés qui ne peuvent être rangées dans la catégorie des P.M.E.²⁰. Il s’agit d’une imposition « forfaitaire » : la plus-value ne peut être réduite par les déductions fiscales de la société (charges de l’exercice, les pertes fiscales reportées, les excédents R.D.T., les intérêts notionnels, etc.), en vertu de l’article 207, alinéa 2, du C.I.R.

    19. Diminution de l’attrait du régime des R.D.T. : suppression du critère alternatif de 2.500.000 euros. Ensuite, le gouvernement a annoncé, à l’issue du conclave budgétaire (budgets 2013 et 2014), que les dividendes de participations (qui ne représentent pas 10 % du capital de la filiale) dont la valeur d’investissement atteint au moins 2.500.000 euros, seront exclus du régime des R.D.T.

    20. Fairness tax. La loi du 30 juillet 2013 a instauré un nouvel impôt de 5,15 % (contribution complémentaire de crise incluse), également dénommé « fairness tax » (art. 219ter C.I.R.). Cette taxe vise à promouvoir une certaine justice fiscale en soumettant les sociétés, qui versent plus de dividendes qu’elles ne paient d’impôts des sociétés, à un impôt minimum. Le cadre limité de la présente contribution ne nous permet pas d’aborder cette mesure en détail. Aussi nous bornerons-nous à souligner que ce prélèvement pourrait, dans certaines circonstances (notamment en cas de réalisation de plus-values sur actions), entraîner des conséquences fiscales négatives (et injustes) pour les sociétés holdings belges²¹.

    21. Critiques du régime fiscal belge. Ces mesures ont fait l’objet de vives critiques.

    Dans un article paru dans l’Echo du 5 juillet 2013, C. Cheruy considère que ces nouvelles règles constituent « un retournement dramatique de la situation » et annonce la « mort » des holdings en Belgique²². À la fin de son article, il se réjouit de l’existence d’autres alternatives au sein du Benelux.

    Peu de temps auparavant²³, l’auteur avait déjà mis en garde contre de telles réformes, susceptibles de conduire à une perte d’attractivité de la Belgique comme terre d’accueil des holdings : « dans le domaine des régimes holdings, il n’y a pas de juste milieu : soit on est dans le peloton de tête, soit on n’existe pas. Aujourd’hui, la Belgique peine à se maintenir dans le peloton de tête, en raison de l’exonération à 95 % des dividendes. Demain, la Belgique risque de se voir reléguée au dernier rang ».

    3. Glorification du régime fiscal de la SOPARFI

    22. Glorification de la politique fiscale luxembourgeoise. La conclusion de C. Cheruy illustre de manière éclatante l’intérêt du thème de la présente contribution : « Je le constate quotidiennement : de nombreux particuliers et groupes (P.M.E.) belges ont déjà découvert les charmes fiscaux du Luxembourg. Le phénomène ne cessera de s’amplifier au détriment de la Belgique. Il est bien connu que le Luxembourg a développé, intelligemment et de manière volontariste, toute une série de régimes fiscaux attrayants et taillés sur mesure (Soparfi, S.P.F., SIF (…)). Nul doute que les contribuables échaudés ou déçus en Belgique trouveront rapidement de quoi compenser leur peine ou chagrin ».

    Dans la même veine, A. Bailleux n’hésite pas à affirmer que la nouvelle taxe sur les plus-values sur actions – dont rien n’exclut actuellement que le taux, actuellement fixé à 0,412 %, pourrait être rehaussé – est susceptible de « pousser certains holdings à aller voir ailleurs, au Grand-Duché du Luxembourg, par exemple, où la SOPARFI leur tend les bras »²⁴.

    23. La SOPARFI : une alternative à la holding belge ? Dans notre dernière section, nous examinerons le régime fiscal de la « Société à Participation Financière », communément dénommée « SOPARFI ». La SOPARFI ne constitue pas une forme spéciale de société : il s’agit d’une société dont l’activité consiste en la détention de participations.

    Dans le jargon des fiscalistes, le régime SOPARFI renvoie au privilège des sociétés mères et filiales luxembourgeois qui, réservé initialement aux dividendes perçus, a ensuite été étendu aux plus-values sur actions²⁵. Ce régime d’exemption de participation est, à plusieurs égards, plus attrayant (et plus simple) que le régime fiscal des sociétés holdings belges (Section 4, A).

    Le chef de famille pourrait dès lors avoir intérêt à transférer sa participation à une SOPARFI, plutôt qu’à une société holding belge. Une planification patrimoniale et successorale similaire à celle esquissée ci-dessus pourrait être mise en œuvre. L’utilisation d’une SOPARFI implique nécessairement de se mettre à l’heure luxembourgeoise. Mais il s’agit aussi de rester attentif aux incidences fiscales belges. On songe, en particulier, à la double imposition juridique de l’actionnaire belge – personne physique, en cas de distribution de dividendes par la SOPARFI (Section 4, B).

    Si la SOPARFI peut être un véhicule adéquat pour la détention d’une participation de contrôle (société opérationnelle belge), elle peut également être utilisée comme véhicule de détention de certaines valeurs mobilières. Dans certains cas, la SOPARFI s’avère être fiscalement plus intéressante que la S.P.F., car elle a accès aux fameuses conventions préventives de la double imposition conclues par le Luxembourg, ainsi qu’aux directives européennes (voy. Section 4, C).

    Section 2

    La société de gestion de patrimoine familial

    A. Régime juridique de la S.P.F.

    24. Vocation de la S.P.F. La S.P.F. a été introduite par la loi du 11 mai 2007²⁶ en vue de remplacer la holding 29. Suivant l’exposé des motifs, elle est conçue comme « une société d’investissement destinée uniquement aux personnes physiques agissant dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé ». Elle est ainsi « destinée à pouvoir acquérir, détenir, gérer et réaliser tout actif financier, à l’instar de ce qui est possible dans le cadre de la gestion d’un patrimoine privé d’une personne physique, indépendamment de son niveau de fortune et de sophistication »²⁷.

    La spécificité de la S.P.F. tient au respect de trois conditions liées à sa forme sociale (§ 1), son objet social (§ 2) et l’identité de ses investisseurs (§ 3). Le non-respect de ces conditions peut avoir des conséquences fiscales fort lourdes pour la S.P.F., car il peut conduire au retrait de son statut fiscal privilégié²⁸.

    1. Forme sociale

    25. Forme sociale de la S.P.F. La S.P.F. doit adopter la forme d’une société à capitaux, telle qu’une société anonyme (« S.A. »), une société à responsabilité limitée (« S.à.r.l. »), une société en commandite par actions (« S.C.A. »), ou une société coopérative organisée sous la forme d’une société anonyme²⁹. La S.P.F. ne peut donc pas adopter la forme d’une société de personnes (par exemple, une société en commandite simple).

    En pratique, la S.A. est la forme juridique la plus usuelle pour la S.P.F.³⁰, celle-ci offrant un degré de discrétion relativement important. Le capital d’une SA peut en effet être représenté par des titres au porteur, ce qui permet à l’actionnaire de conserver un certain anonymat. On précisera à cet égard que l’identité des actionnaires ne doit pas être révélée à l’Administration de l’Enregistrement et des Domaines dans le cadre des obligations de vérification et de certification³¹ de la S.P.F.³².

    Les statuts doivent contenir la mention « S.P.F. » à côté de la forme sociale choisie³³.

    Contrairement à la SIF, la S.P.F. n’est pas tenue d’établir un prospectus d’émission ou de requérir un quelconque agrément³⁴. Les titres de la S.P.F. ne peuvent d’ailleurs faire l’objet d’un placement public ou être admis à la cotation d’une bourse de valeurs³⁵.

    2. Objet social

    26. Détention passive d’un portefeuille-titres. L’objet exclusif de la S.P.F. doit être l’acquisition, la détention, la gestion et la réalisation d’actifs financiers, à l’exclusion de toute activité commerciale³⁶. La notion d’actifs financiers regroupe les instruments financiers visés par la loi du 5 août 2005 sur les contrats de garantie financière (actions, obligations, options,…) et les espèces et avoirs de quelque nature que ce soit détenus en compte³⁷.

    27. Politique d’investissement de la S.P.F. La notion d’actifs financiers est appréhendée de manière large. Ses actionnaires auront ainsi toute liberté pour définir la politique d’investissement de la S.P.F., d’autant plus que la loi ne prévoit aucune règle de répartition des risques.

    Il est intéressant de noter qu’une mesure anti-abus fiscale venait jadis réduire cette marge de manœuvre. Ainsi, l’article 4 de la loi du 11 mai 2007 prévoyait que la S.P.F. perdait le bénéfice de son régime fiscal de faveur lorsqu’elle percevait au moins 5 % de dividendes en provenance de participations non cotées, soumises localement à un faible niveau d’imposition. Cette disposition a été abolie par la loi du 18 février 2012³⁸, dès lors qu’elle constituait une entrave illégitime au principe communautaire de la libre circulation des capitaux. Par exemple, la S.P.F. pourra désormais investir dans des actions de sociétés (cotées) établies aux Iles Bermudes, sans craindre de perdre son régime d’exemption.

    28. Souci de la compatibilité de la S.P.F. avec le droit européen. Cette délimitation de l’objet social de la S.P.F. (simple détention passive de participations ; absence d’exercice d’une quelconque activité économique) procède du souci d’éviter que la S.P.F. ne subisse le même sort que la holding 29 : la condamnation en tant qu’aide d’État par les instances communautaires³⁹. Force est ainsi de constater que cette préoccupation de compatibilité de la S.P.F. avec le droit européen a été manifestée à de nombreuses reprises au cours des travaux préparatoires.

    Les conséquences pratiques suivantes s’induisent de cette interdiction d’exercice de toute activité commerciale.

    29. Interdiction de s’immiscer dans la gestion de sociétés. Une première conséquence découle de la loi du 11 mai 2007 : si la S.P.F. est autorisée à détenir une participation dans une société, elle ne peut toutefois pas s’immiscer dans la gestion de celle-ci⁴⁰.

    La S.P.F. ne peut ainsi ni exercer une fonction de dirigeant dans les organes de sa filiale, ni lui rendre des services. Rien ne lui empêche, en revanche, d’exercer ses droits d’actionnaire (exercice du droit de vote, du droit aux dividendes, …) et de détenir des participations majoritaires (participations lui donnant le contrôle sur ses filiales)⁴¹.

    30. Interdiction d’octroyer des prêts rémunérés. Les travaux préparatoires déduisent par ailleurs de cette interdiction d’exercice d’une activité commerciale qu’une S.P.F. n’est pas autorisée à consentir des prêts rémunérés, même à la société dans laquelle elle détient une participation. La S.P.F. est cependant en droit d’octroyer, à titre accessoire et purement gratuit, une avance ou de cautionner les engagements de la société dans laquelle elle détient une participation⁴².

    En pratique, afin de contourner cette contrainte, les S.P.F. convertissent parfois les « prêts » octroyés à leurs filiales en « obligations » (titres négociables visés par la loi du 5 août 2005), actifs financiers éligibles en vertu de l’article 2 de la loi du 11 mai 2007.

    31. Interdiction de toute activité de négoce d’actifs financiers et de détention directe d’immeuble. D’après les travaux préparatoires, l’interdiction d’exercice d’une activité commerciale entraîne également que la S.P.F. doit se garder (i) d’exercer une activité de négoce d’actifs financiers et de services financiers et (ii) de détenir en direct des immeubles⁴³. La détention « indirecte » d’immeubles, à travers une société opaque (et non transparente fiscalement), devrait toutefois être envisageable⁴⁴. C’est ainsi qu’une S.P.F. ne serait, par exemple, pas en droit de détenir un immeuble à travers une SCI de droit français (transparente pour des besoins fiscaux luxembourgeois).

    3. Investisseurs éligibles

    32. Liste des investisseurs éligibles de la S.P.F. Les investisseurs éligibles, autorisés à détenir des actions d’une S.P.F., doivent être soit (i) une personne physique agissant dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé, soit (ii) une entité patrimoniale agissant exclusivement dans l’intérêt du patrimoine privé d’une ou de plusieurs personnes physiques ou (iii) un intermédiaire agissant pour le compte des investisseurs susvisés⁴⁵. Afin de faciliter le contrôle de ces critères d’éligibilité, chaque investisseur est tenu à une obligation de déclaration à l’attention du domiciliataire ou, à défaut, des dirigeants de la S.P.F.⁴⁶.

    Les investisseurs « cibles » sont, on le voit, clairement les particuliers souhaitant utiliser la S.P.F. comme instrument de gestion de leur patrimoine mobilier privé. Il peut s’agir d’un groupe familial ou d’un club d’investisseurs souhaitant gérer de manière commune tout ou partie de leur épargne privée⁴⁷.

    33. Ouverture de la S.P.F. aux entités patrimoniales : le cas de la STAK hollandaise. Afin de conférer à la S.P.F. un rôle de premier plan dans tout type de structure de planification patrimoniale, le législateur luxembourgeois a pris soin d’ouvrir la S.P.F. aux entités patrimoniales, pourvues ou non de la personnalité juridique, telles que le trust, la fondation privée, le « stichting administratiekantoor » ou entités similaires dont l’objet ou la fonction est la gestion de tout ou partie du patrimoine privé de personnes physiques, à l’exclusion de toute société ou entreprise commerciales⁴⁸.

    En pratique, les actions d’une S.P.F. sont parfois détenues par une fondation – bureau d’administration de droit hollandais (stichting administratiekantoor, communément dénommé « STAK »), par le biais de laquelle les actions de la S.P.F. sont certifiées. La technique de la certification d’actions consiste à scinder la propriété juridique et la propriété économique des titres : l’émetteur des certificats (la STAK) détient la « propriété juridique » des actions de la S.P.F. (exercice du droit de vote), alors que le titulaire des certificats (la personne physique) conserve la « propriété économique » des actions de la S.P.F. (droit aux dividendes, boni de liquidation, etc.)⁴⁹. Le recours à une fondation hollandaise (au lieu d’une fondation privée belge) comme véhicule de certification présente de nombreux avantages, notamment la discrétion accrue (pas de publication de l’acte constitutif), la possibilité de ne désigner qu’un seul gérant, etc ⁵⁰.

    Il faut également considérer qu’une société holding pure, qui s’abstient d’exercer une quelconque activité économique, est autorisée à détenir une S.P.F., à condition d’être elle-même détenue par des investisseurs éligibles⁵¹.

    B. Régime fiscal de la S.P.F.

    1. Exemption subjective

    34. La S.P.F. : un véhicule défiscalisé. La S.P.F. bénéficie d’un régime d’exemption subjective : elle est exonérée de l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’impôt sur la fortune⁵². La S.P.F. constitue donc un véhicule défiscalisé, puisqu’elle échappe à l’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers (dividendes, intérêts,…) et les plus-values qu’elle réalise.

    Ce régime fiscal encourage les investisseurs à thésauriser et réinvestir les revenus mobiliers dans la S.P.F., où ils ne sont pas taxés. Dès que la S.P.F. versera ces revenus aux investisseurs, ceux-ci devront par contre payer leur tribut au fisc belge.

    2. Retenue à la source sur les paiements de dividendes et d’intérêts

    35. Retenue à la source sur les paiements de dividendes. Les distributions de dividendes faites par une S.P.F. sont exonérées de retenue à la source au Luxembourg⁵³.

    36. Retenue à la source sur les paiements d’intérêts. Les paiements d’intérêts échappent, en principe, à toute retenue à la source⁵⁴.

    Ce principe souffre plusieurs exceptions, notamment pour ce qui concerne les paiements d’intérêts visés par la directive européenne sur la fiscalité de l’épargne (la « directive sur la fiscalité de l’épargne »)⁵⁵, transposée en droit luxembourgeois par la loi du 21 juin 2005⁵⁶. Les intérêts payés par une S.P.F. tombent systématiquement sous le coup de ce dispositif⁵⁷. La S.P.F. sera donc, en vertu de ses obligations d’agent payeur, tenue de prélever une retenue à la source 35 % sur les paiements d’intérêts effectués au profit de personnes physiques résidant dans un État membre de l’Union européenne. La S.P.F. peut le cas échéant charger un établissement de crédit de remplir ces obligations pour elle⁵⁸.

    Les versements d’intérêts faits par une S.P.F. au profit d’un habitant du Royaume seront donc en principe amputés de cette retenue à la source de 35 %. Celle-ci ne sera toutefois pas prélevée si le particulier belge autorise la S.P.F. à procéder à l’échange d’informations aux autorités fiscales luxembourgeoises, qui les transmettront à leur tour au fisc belge⁵⁹.

    Le Gouvernement luxembourgeois a annoncé l’introduction, à partir du 1er janvier 2015, de l’échange automatique d’informations sur les paiements d’intérêts que des agents payeurs établis au Luxembourg effectuent en faveur de personnes physiques qui ont leur résidence dans un autre État membre de l’Union européenne, en vertu de la directive sur la fiscalité de l’épargne⁶⁰. Par conséquent, en cas de paiement d’intérêts par une S.P.F. à une personne physique belge à partir du 1er janvier 2015, il sera d’office procédé à l’échange automatique d’informations (la retenue à la source de 35 % ne pourra donc plus être prélevée – à des fins, par exemple, de discrétion).

    3. Plus-values sur actions réalisées par des non-résidents

    37. Exonération des plus-values sur actions. Les plus-values réalisées par des non-résidents à l’occasion de la cession des actions de la S.P.F. ou de la liquidation de la S.P.F., sont exonérées d’impôt au Luxembourg⁶¹.

    La plus-value réalisée par un habitant du Royaume, lors de la cession de ses actions de la S.P.F., sera donc exemptée d’impôt luxembourgeois.

    4. Taxe d’abonnement

    38. Taux et plafond. La S.P.F. est soumise à une taxe d’abonnement annuelle au taux de 0,25 %. Le montant de cette taxe ne peut être inférieur à 100 euros par an, ni excéder 125.000 euros par an⁶².

    39. Ratio de sous-capitalisation. La base d’imposition de la taxe d’abonnement due par la S.P.F. est : (i) le montant de son capital social libéré, augmenté le cas échéant (ii) des primes d’émission et (iii) de la partie des dettes, sous quelque forme que ce soit, qui excède 8 fois le capital libéré et les primes d’émission existant au 1er janvier ou, pour l’année de sa constitution, à la date de constitution⁶³.

    Cette disposition (plus précisément la composante (iii) de la base imposable) revient donc à instaurer une règle de sous-capitalisation pour la S.P.F.

    L’enseignement pratique suivant peut donc être tiré. En principe, le financement de la S.P.F. par voie d’endettement permet d’éviter la soumission à la taxe d’abonnement. Il faut toutefois veiller à ce que la S.P.F. ne soit pas « sous-capitalisée » : si le montant des dettes excède 8 fois les fonds propres de la S.P.F., l’endettement « excessif » sera soumis à la taxe d’abonnement de 0,25 %⁶⁴. Si, par exemple, une S.P.F. a un ratio de debt : equity de 80/20 (capital et primes d’émission), cette règle ne trouvera pas à s’appliquer.

    5. Contrôle et sanctions

    40. Contrôle de l’administration de l’Enregistrement et des Domaines. C’est l’administration de l’Enregistrement et des Domaines (« A.E.D. ») (et non l’administration des Contributions directes) qui est chargée du pouvoir de contrôle et d’investigation de la S.P.F.⁶⁵. La mission de l’A.E.D. se limite à la recherche et à l’examen des faits et données concernant le statut fiscal de la S.P.F. ainsi que des éléments requis pour assurer et vérifier la juste et exacte perception des taxes et droits à charge de la S.P.F.

    41. Dispositif de certification. Un mécanisme de certification a été mis en place en vue de faciliter la mission de l’A.E.D. Ainsi, le domiciliataire de la S.P.F. (ou, à défaut, un réviseur d’entreprise ou un expert-comptable) doit certifier à l’administration l’existence et la conformité à la loi des déclarations d’éligibilité des investisseurs, de même que les obligations d’agent payeur incombant à la S.P.F.⁶⁶. Cette certification prendra la forme d’un certificat de non-objection⁶⁷.

    Les certifications sont transmises annuellement à l’A.E.D.⁶⁸. L’A.E.D. informe l’administration des contributions directes lorsqu’elle constate que le certificat n’a pas été transmis⁶⁹. Relevons que durant l’exercice 2012, 129 sociétés ont été signalées à l’administration des contributions directes pour non-remise des certificats⁷⁰.

    42. Sanctions. Si le directeur de l’A.E.D. constate que la S.P.F. n’observe pas les dispositions légales, réglementaires ou statutaires la concernant, il peut prononcer le retrait du bénéfice des dispositions fiscales⁷¹. Ceci implique donc que la S.P.F. deviendrait pleinement soumise à l’impôt sur le revenu (par exemple, sur ses revenus mobiliers).

    Le directeur dispose toutefois d’une certaine marge de manœuvre. Aussi n’est-il pas tenu de prendre une décision de retrait en toute circonstance, particulièrement si les gérants de la S.P.F. sont de bonne foi et/ou en cas de violations mineures⁷².

    C. La S.P.F. et les mesures anti-abus

    1. L’article 344, § 2, du C.I.R. : inopposabilité de la cession d’un portefeuille-titre à une S.P.F.

    43. Inopposabilité de la cession d’actifs productifs de revenus mobiliers à une société défiscalisée. Nous avons vu les avantages que les habitants du Royaume peuvent avoir à loger leur patrimoine mobilier dans une S.P.F. : la S.P.F. ne subit aucun impôt des sociétés ni aucun impôt sur la fortune ; elle est seulement tributaire d’une taxe annuelle d’abonnement de 0,25 %, qui peut être fortement diminuée par le biais d’un financement par voie de dette ; les dividendes distribués par la S.P.F. ne sont pas soumis à une retenue à la source au Luxembourg ; etc. Attention

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