L’île d’Ischia, le paradis de la nature
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Avis sur L’île d’Ischia, le paradis de la nature
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Aperçu du livre
L’île d’Ischia, le paradis de la nature - Raffaele Castagna
française
Charles-Marguerite Mercier Dupaty
1746-1788
Lettres sur l’Italie en 1785
… Je me suis embarqué hier avant l’aurore, et je suis allé visiter, avec le soleil, les îles semées dans la mer de Naples. J’ai vu le soleil sortir de la mer, en séparant les cieux et les flots; les cieux qui sembloient se relever, et les flots qui s’étendoient.
On auroit dit que le soleil s’étoit reposé au milieu d’eux pendant la nuit. Je l’ai vu s’élancer sur le sommet du Pausilippe; courir sur le promontoire de Misène; étinceler dans les ondes qui baignent les îles Procida, Ischia et Nisida; et s’avançant ensuite vers la borne horizontale ou le ciel confine à la mer, effleurer de ses rayons les plus doux, Baies et Pouzzole; et le golfe qui les sépare; et le Monte Nuovo, formé en une seule nuit par l’éruption d’un volcan; et le Monte Barbaro, où jadis mûrissoit le Falerne; enfin, les Champs-Elysées, les débris de Cumes, et les ruines de sept cités qui florissoient autrefois sur ses rivages.
Arrête-toi un moment, soleil! Laisse-moi parcourir tous ces beaux lieux, que la nature sembloit avoir créés exprès pour délasser les Romains de la conquête de l’univers, ou la leur faire oublier.
Jean Claude Richard de Saint-Non
1727-1791
Voyage pittoresque à Naples et en Sicile
Ischia - Notre projet étant de nous occuper, dans ce chapitre, des lieux les plus célèbres des environs de Naples, nous ne pouvons d’autant moins passer sous silence plusieurs îles situées à l’entrée du golfe de cette ville, qu’on ne saurait douter qu’elles n’aient fait autrefois partie de la Campanie. Leur situation très voisine des terres, leur forme volcanique, leurs bains d’eaux chaudes, tout annonce que ces îles ont toutes été autant de volcans allumés, et qu’à des époques très reculées, elles ont été séparées de la Campanie par quelque tremblement de terre ou quelques unes de ces révolutions formidables auxquelles ce beau pays a été exposé de tout temps.
La plus grande et la plus considérable de ces îles est située à la droite et à l’entrée du golfe de Naples, du côté du promontoire de Misène: Ischia, l’Inarime ou Pythecuse des anciens, car elle a porté différens noms dans l’antiquité; celui de Pythecuse surtout, qui, en grec, veut dire singe, semble avoir quelque rapport avec un ancien culte qui aura pu exister dans cette île, sous le symbole de cet animal, ainsi qu’en Egypte, où il était appelé Cercopjtheque.
Homère et Pindare, dans les descriptions qu’ils ont laissées de cette île, de ses volcans, et de ses fréquentes éruptions, l’appellent Inarime. D’autres anciens auteurs ont prétendu, mais avec moins de vraisemblance, que c’était la quantité de singes, qui y étaient autrefois très abondants, et qu’en langue étrusque on nommait Arimi, qui lui avait fait donner ce nom. Enfin, suivant d’autres, elle porta encore le nom d’Enaria, parce qu’Enée, arrivant en Italie, y conduisit sa flotte, et y séjourna quelque temps.
Le nom et l’origine des premiers habitants de l’île d’Ischia ne sont pas plus certains. Strabon nous dit que ce furent les Érétriens qui, les premiers, s’établirent dans cette île, mais que ses volcans toujours allumés, et leurs terribles éruptions, les ayant obligés d’en sortir, l’île resta déserte jusque vers l’an 3540, quatre cent cinquante ans avant J.C, époque où Hiéron, roi de Syracuse, y envoya aussi inutilement des ouvriers pour y bâtir et y former des établissemens. Enfin les Romains plus hardis s’en emparèrent, y envoyèrent une colonie, et la conservèrent jusqu’à Auguste, qui, s’étant plu à Caprée, en fit l’échange avec les Napolitains, auxquels il céda l’île d’Ischia.
Son circuit est de dix-huit milles; au milieu de l’île s’élève une montagne considérable, ancien volcan autrefois nommé Mons Epomeus. Depuis long-temps ses feux sont éteints et inactifs, quoiqu’on ne puisse douter qu’ils ne soient toujours existans dans l’intérieur de l’île, à en juger au moins par les fréquens tremblemens de terre auxquels elle est sujette, ainsi qu’à la chaleur de ses fontaines et de ses bains.
Il y a à Ischia plusieurs bourgs assez considérables, et une ville épiscopale anciennement séparée de la forteresse, mais qui, par le moyen d’un pont très long, y communique aujourd’hui.
Au reste, cette île est entourée de promontoires, de plusieurs petits ports et de nombre de rochers en amphithéâtre, dont le site sauvage et austère forme un tableau des plus pittoresques.
Une autre partie de l’île présente au contraire l’aspect le plus riant et le plus agréable par sa fertilité et l’excellence de ses productions de toute espèce. Ses forêts sont remplies de gibier, de faisans, et surtout d’une sorte de poule d’eau qu’on y trouve dans une abondance prodigieuse.
Mais ce qui a rendu de tous les temps l’île d’Ischia plus célèbre, ce sont ses sources d’eaux minérales et ses bains chauds auxquels on attribue, avec raison, les qualités les plus merveilleuses pour la santé. Parmi le nombre considérable de ses eaux thermales, les plus renommées sont celles qui viennent des bains appelés i Fornelli et Castiglio di Scroffa. Indépendamment de ses bains d’eaux chaudes, il y a encore une espèce d’étuves de sable qui sont particulières à cette île. Ces étuves naturelles sont sans doute échauffées par les vapeurs souterraines et sulfureuses dont le foyer de l’île est rempli, et leur effet est d’un grand secours et infiniment salutaire pour beaucoup de maladies.
Il paraît qu’Ischia a éprouvé très anciennement des ravages considérables par ses volcans; mais que, depuis plusieurs siècles, ils sont apaisés, comme nous l’avons dit. Une des dernières éruptions, et une des plus terribles dont on ait conservé la mémoire dans le pays, est celle qui arriva en 1302. L’Ile fut en feu pendant deux mois entiers, et les habitans en furent si effrayés, que le plus grand nombre prit la fuite et l’abandonna.
Procida. L’île de Procida est située entre celle d’Ischia et le promontoire de Misène, à égale distance de l’une et de l’autre, et peut avoir sept à huit milles de circuit. Suivant plusieurs historiens, elle faisait partie de l’île d’Ischia, et en fut détachée par un tremblement de terre qui engloutit dans la mer tout l’espace qui est entre eux. Strabon et Pline le disent formellement.
Son site uni, couvert de verdure, de jardins et de maisons de plaisance, en rend l’aspect et l’abord infiniment agréables; on y distingue surtout celles qui y ont été élevées par les familles Vasto et Pescara. On y recueille une quantité prodigieuse de raisins et de figues très délicates. Deux de ses côtes sont très fréquentées: l’une, à l’est, qu’on appelle San Catholico, est toujours couverte de denrées qu’on y apporte de toute l’île, et qui y attirent un grand nombre de marchands: l’autre, à l’ouest, qu’on appelle Cornicella, est couverte d’habitations de pêcheurs qui font un assez grand commerce. Partout on voit des sources d’eau douce jaillir du milieu des sables, et ce qu’on ne trouve dans aucun endroit de l’Italie qu’à Procida, sur le rivage Anannello, c’est un sable rempli de parcelles de plomb. Les faisans et les francolins y sont en si grande abondance, qu’on y en voit souvent des milliers étaler leur brillant et varié plumage aux rayons du soleil; la crainte d’en faire diminuer le nombre a fait qu’on leur a construit dans la forêt plusieurs abris. Toutes les espèces de gibier y sont communes, et les lièvres surtout. On en conserve la chasse pour le roi de Naples, mais les soins qu’on y apportait jadis, et surtout la défense expresse faite aux habitans d’avoir des chats, attendu que ces animaux, naturellement chasseurs, détruisaien le gibier, faillirent avoir un bien grand inconvénient pour la tranquillité des habitans.
On prétend que cette île fournit les meilleurs marins de l’Italie. On y voit un grand nombre de vieillards, qui doivent à la température heureuse et à la salubrité de l’air de vivre, sans toutes les incommodités ordinaires de la vieillesse, jusqu’à un âge très avancé.
Il y a à Procida plusieurs églises assez belles, et une, entre autres, qu’on appelle Monastile; c’était autrefois une maison considérable de religieuses; mais la vue et l’apparition des Barbaresques, qui venaient souvent faire des descentes sur les côtes, effrayèrent les religieuses, au point qu’elles ont déserté l’Ile, et se sont retirées à Naples, dans le couvent de Saint-Patrice.
L’île de Procida à appartenu en différens temps à de simples particuliers, qui la tenaient probablement comme en fief. On sait que Jean de Procida, qui, en 1282, joua un si grand rôle en Sicile aux fameuses Vêpres siciliennes, en avait été seigneur. Elle fut vendue, en 1339, par un des descendant de ce Procida, à Marino Cossa; depuis, cette île a changé plusieurs fois de maître: enfin elle est rentrée sous la domination du prince.
Adélaide Louise Zéphirine De Damas Comtesse de Chastellux
1784-1838
Voyage en Italie, 1834
Une jolie barque se balance sur la mer, à quatre pas de notre maison; nous y montons, et quatre rameurs nous dirigent vers l’île d’Ischia; un vent très léger, recueilli par nos petites voiles, tempère la chaleur d’un beau soleil des derniers jours d’octobre. Nous côtoyons Mergellina, nous passons devant ce pittoresque palais de la reine Jeanne posé sur des voûtes où l’eau de la mer vient bouillonner et couronner de plantes grimpantes; les maisons de campagne se succèdent devant nos yeux. Nous rasons le rocher qu’on nomme Scuola di Virgilio, et où habite un vieil ermite, dont la figure sied au tableau. Après la pointe de Pausilippe apparaissent l’île de Nisita, sa tour, son fort éclatant de blancheur, son lazaret pour lequel on construit un port et un môle percé, Pouzzoles, Bayes, le cap Misène. Nous laissons Procida à notre gauche.
La citadelle d’Ischia, sur laquelle flotte l’étendard royal de Naples, est bâtie au haut d’un rocher noir, escarpé, détaché du rivage et joint à la ville par une jetée. Sur ce rocher imposant sont placés aussi la cathédrale, le palais épiscopal, un couvent et plusieurs maisons.
Nous entrons dans le port; on nous avait aperçus de loin. La foule nous entoure, nous étouffe et vocifère en nous amenant des ânes sellés dont nous nous hâtons de profiter pour quitter cette bruyante capitale de l’île. Elle a quatre mille habitants, de jolies maisons, et elle est pavée en dalles de lave, ainsi que la route que nous suivons. Notre promenade nous offre à chaque pas les plus frappants contrastes, les points de vue les plus variés et les plus pittoresques. Les flancs de l’Epomeo, haute et majestueuse montagne qui s’élève au centre de l’île, ont vomi des torrents de lave dont les énormes monceaux sont entassés sur une longueur d’un mille et demi, depuis le cratère éteint jusqu’à la mer. La catastrophe semble d’hier, et cependant elle a eu lieu il y a cinq siècles. A côté de ce chaos, de ces noirs amoncellements de scories qui repoussent jusqu’au moindre brin d’herbe, on voit la plus riche végétation couvrir les collines, embellir les vallons, se glisser dans les brusques inégalités de ce sol bizarrement formé. La lave est partout; mais selon qu’elle reste à nu ou qu’elle se revêt d’une couche de terre, elle est hideusement stérile ou d’une ravissante fertilité. Sur les pentes mêmes du redoutable Epomeo croissent de beaux vignobles, des forêts de châtaigners; de jolis villages se montrent à demi cachés par des bois de myrtes; des maisons isolées élèvent leurs toits blancs et plats au milieu des orangers, des grenadiers, des amandiers, des lauriers-roses. L’aloès armé de piquants sert de haie dans les champs.
Nous nous arrêtons près d’un petit lac pour acheter des coquillages; le roi a un casin à peu de distance. Nous visitons les eaux minérales de Gurgitello, où l’on a construit des étuves et un hôpital. Il y a dans l’île plusieurs établissements de ce genre, qui y attirent beaucoup de baigneurs. Je goûtai une source presque bouillante, et une autre tiède et salée.
Nous voilà parvenus sur la haute colline de la Sentinella, où nous trouvons une auberge meublée avec recherche et offrant tous les agréments d’une délicieuse maison de campagne. Un vaste horizon s’y déploie autour de nous. D’un côté c’est la mer, et ses beaux rivages et ses îles; le tableau est divisé en plusieurs plans: les uns distincts, les autres dans un lointain vaporeux. Procida avec ses rochers couronnés de maisons blanches ; Caprée dans le lointain s’élevant sur les flots resplendissants, comme un cône d’un bleu pourpré ; Pandataria, lieu de bannissement des Romains, où Auguste relégua sa fille Julie, et Caligula ses sœurs ; la côte de Gaëte, les pointes de Misène et de Pausilippe, Torre del Greco, le Vésuve. Près de nous, une rive dentelée, hérissée de rochers de lave, de profonds ravins, de beaux arbres. Nous sommes au pied de l’Epomeo; sa cime est blanchâtre et sulfureuse, ses flancs sont boisés; sa base est revêtue de la plus fraîche verdure et d’une foule d’habitations; le feuillage s’entrouve pour laisser voir ça et là de jolis clochers de villages. Notre auberge est entourée de longues treilles, d’où pendent au-dessus de nos têtes de superbes grappes d’un raisin muret sucré. La vendange est commencée et anime le paysage: on porte le raisin au pressoir, en mettant à part le plus beau, qui couvre les terrasses et les galeries de la maison pour sécher au soleil. Le vin est la principale richesse de l’île; on en exporte tous les ans plus de cinquante mille tonneaux; mais notre hôte s’affligeait avec nous de sa médiocre qualité, qu’il attribuait uniquement à l’ignorance des bonnes méthodes pour l’amener à la perfection dont il est susceptible. Les femmes élèvent des vers à soie et filent les filaments de l’agave, espèce d’aloès, pour en faire des tissus et des cordages.
L’île d’Ischia a dix-huit milles de tour et vingt-quatre mille habitants. Il est évident qu’elle a été formée tout entière par les terribles éruptions de l’Epomeo, vomi lui-même du fond de la mer, comme le Monte Nuovo du lac Lucrin. Depuis l’an 1302, le volcan se tait, mais de fréquents tremblements de terre attestent la présence des feux souterrains. Le plus récent eut lieu il y a six ans ; il a laissé des traces désastreuses dans le charmant village de Casamicciola, dont nous vîmes les murs fondus et les maisons étayées.
Peut-être Énée aborda-t-il à Ischia avant de descendre à Cumes, et peut-être est-ce à lui qu’elle dut son ancien nom d’Enaria. Dans les premiers siècles de Rome, des colons venus de l’Eubée, et d’autres partis de Syracuse furent successivement découragés par d’affreux tremblements