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Libération

La griffe d'Etienne Robial sur les habits neufs de Canal+Les nouveaux génériques font clignoter les damiers de couleur comme des ensignes de néon.

par Martine ESQUIROU
publié le 28 août 1995 à 7h10

Exit l'ellipse. Rare témoin de longévité dans la garde-robe des

chaînes, le symbole de Canal +, depuis sa création en 1984, disparaît aujourd'hui pour faire place à un nouvel habillage. «Pas question d'un truc tapageur, dit Etienne Robial, directeur artistique de la chaîne depuis l'origine. L'habillage doit permettre l'identification immédiate de la chaîne. Il doit être aussi lisible que des panneaux de signalisation routière, ni plus ni moins.» Modeste, l'artiste: le changement d'habillage de l'antenne, aussi essentiel à l'image de la chaîne que la blancheur des dents de la présentatrice météo ou la tignasse de Gildas, doit se négocier en douceur. Robial qui gère la signalisation d'un groupe de soixante-dix-huit filiales n'est d'ailleurs pas homme à plaisanter sur un ravalement qui n'est pas que de façade. De la couleur du plateau-repas à la cantine à la signalétique du panneau de sécurité-incendie en passant par le papier à lettres et jusqu'au tee-shirt des footballeurs du PSG, il exerce ses talents avec diligence et va inonder de ses nouvelles couleurs tout ce qui, de l'immeuble à l'objet promotionnel est frappé du sigle de Canal +. Sauf peut-être la cravate du président. Car l'emballage cadeau, Robial l'a voulu, cette fois, multicolore. Place à la géométrie: Les nouveaux génériques sont cousus de damiers de couleurs, façon Mondrian ou Courrèges, remis au goût du jour des années 90. Comme si, quittant voilà un an l'univers de la BD, Robial qui dirigeait les éditions Futuropolis, avait laissé tomber les bulles et garder les cases, cadre propre et net pour simplement annoncer les programmes.

Typographie claire pour annoncer les programmes à venir, sous-titrages sur liseré gris, et carreaux de couleurs en prégénérique de chaque émission: la griffe de Robial et de son vieux complice Mathias Ledoux est un modèle de sobriété.

Ses cases, mariées par paires de couleurs ­huit en tout en comptant le noir et blanc­ clignotent comme des enseignes au néon: un jeu de Lego riche d'une palette de quatre-vingt-dix-huit combinaisons différentes, complètement aléatoires. Les logos de la chaîne et des émissions gardent le même alphabet: cartouche noire pour Canal + et lettres blanches. En revanche, les jingles, ces petites musiques qui accompagnent les génériques et qu'on finit par siffloter sous la douche, changent. «La répétition et l'accoutumance, remarque sobrement Robial, qui est aussi l'auteur de l'habillage de M6 et RTL 9, finissent par vieillir l'image de la chaîne.» Michel Jonasz ne chantera plus a cappella Cinéma, cinéma: Douze versions sonores différentes, mêlant d'autres voix prennent le relais. Les autres jingles tous très courts, jouent sur des bases mélodieuses «poétiques et printanières» selon le document officiel distribué par la chaîne. Ce qui se traduit parfois par d'étranges couinements et coassements: «Ce sont seulement des oiseaux solistes», affirment les deux musiciens Philippe Eidel et Arnaud Devos qui avaient déjà réalisé le premier habillage sonore de la chaîne. Pour quelques secondes, une poignée de notes, ils ont joué , disent-ils «sur des sonorités très acoustiques», variant quatuor à cordes, clarinette, harpe, accordéon, ou des instruments traditionnels comme le bouzouki ou le charango. De quoi tendre l'oreille.

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