Yvan Marc fait peau neuve avec l'album "Avant les deserts"

Yvan Marc, 2024 © Rodamel

Avouons-le, on s’inquiétait un peu pour Yvan Marc en découvrant Avant les déserts, tant son nouvel album est empreint de textes graves, parfois désabusés. Qu’on se rassure, il va bien, nous rassure-t-il ; le chanteur avait envie de se renouveler. Pari réussi avec ce nouveau disque, à la pop teintée d’électro.

RFI Musique : Pas tout seul (2021), votre précédent disque, était constitué de duos avec Ours, Féloche, Alexis HK, Jil Caplan ou encore Fabien Martin qui reprenaient vos chansons. Pourquoi revenir si vite à un album solo ?
Yvan Marc : Pas tout seul était une parenthèse pendant le Covid. Je n’avais pas trop d’inspiration et j’étais confiné. Donc c’était aussi un moyen de passer le temps, même si c’était un beau projet (Rires). Cela m’a permis de faire des rencontres à distance, tout en continuant de faire de la musique. Une fois l’album terminé, ça m’a donné envie d’écrire de nouvelles chansons, ce qui aboutit à ce nouveau disque.

Cet album est marqué par les innovations. Vous jouez parfois avec des réverbérations et il est empreint d’accents électro pour la première fois…
J’aime bien innover, j’avais envie de changer, de me remettre en question et de progresser. J’ai travaillé avec Thierry Bon, un arrangeur qui collabore notamment avec Mickey 3D. J’ai essayé d’interpréter les chansons différemment, de faire des doublages avec ma voix. J’ai fait beaucoup de chœurs aussi. C’était très stimulant.

Cet album est plutôt dansant malgré la gravité des thèmes que vous y abordez –la vieillesse, la rupture, la planète irrémédiablement en danger. Dans quelle énergie étiez-vous lorsque vous l’avez écrit ?
Une sorte de morosité, de remise en cause aussi et puis je faisais une sorte de bilan. Un état des lieux de ma vie…J’ai aussi regardé beaucoup de films qui m’ont mis dans un état émotionnel qui a débloqué beaucoup de choses dans mon écriture. La rupture, l’abandon, ce qu’on laisse de soi, le temps qui passe… Des thématiques que je n’abordais pas. Là aussi, c’était lié à la volonté de changer un peu mes habitudes.  Ces textes se prêtent peut-être plus à la danse. Cela peut aussi suggérer l’énergie, l’envie de s’investir. Et d’extérioriser la dureté des propos tenus dans ces chansons.

Ils sont d’ailleurs souvent traversées par l’échec amoureux (À terre, Le Mépris, M’aimes-tu ou même Allez viens !) …
Ce n’est pas personnel. Je crois que c’est lié aux films que je regardais quand j’écrivais. Et effectivement, je me suis rendu compte a posteriori que je tournais toujours autour de cette thématique. Me mettre dans la peau de cet échec et de cette mélancolie m’est plus facile pour écrire sur le couple et de manière générale sur l’amour.

 « Comment rester digne même lorsque ma peau aura changé d’éclat ? » questionnez-vous dans Garder la joie. À cinquante-cinq ans, il vous reste un peu de marge ! Que craignez-vous de perdre en vieillissant ?
Oh ça me travaille quand même (Rires ) ! L’énergie dans les projets. Pendant le Covid et un peu après, je me posais beaucoup de questions. J’étais fatigué. En dehors de mon projet personnel et de l’écriture, je fais aussi vivre mon projet, ma structure, j’organise des concerts en Haute-Loire... Cela demande beaucoup d’énergie et le corps n’est plus le même. Il faut accepter ces changements. Ce n’est pas une angoisse forte, mais c’est une projection qui m’a toujours travaillée : ado, j’écrivais déjà beaucoup de poèmes sur le temps qui passe.

D’ailleurs dans Je m’ennuie, vous vous glissez dans la peau d’un adolescent qui a pour ami son écran …
J’ai un fils de 16 ans, je le retrouve un peu dans ce texte et je me retrouve un peu en lui. Je n’avais pas d’écran, mais c’était aussi la même difficulté à comprendre le monde. Je me réfugiais dans la chanson, la musique, comme lui dans ses jeux vidéo. Il y a un besoin de solitude aussi. Mon fils s’enferme dans sa chambre, je faisais pareil. C’est la première chanson que j’écris sur l’adolescence. 

Avant les déserts, qui donne son titre à l’album, parle du réchauffement climatique avec un humour acide. « On n’est pas des lézards ». Est-ce qu’il vaudrait mieux en rire pour ne plus pleurer ?
Je ne sais pas si on peut en rire, mais c’est désabusé. J’ai beaucoup écrit sur l’écologie, je ne voulais pas que ça ressemble à ce que j’avais déjà fait. Il y a du parler chanté, un langage un peu familier. Elle est traversée d’ironie et de second degré, mais ça ne me fait pas vraiment rire. Je pense que ça va être dur. 

Comment garder l’espoir ?
Je ne sais pas… En écrivant des chansons (Rires) en tout cas, ça me défoule ! 

Yvan Marc Avant les déserts (Label Diff 43) 2024
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