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Climat toxique : une ancienne responsable de Pétrole et gaz des Indiens du Canada témoigne

Une femme poursuit son ancien employeur dans le cadre d’un recours collectif après 27 ans de carrière.

Une installation pétrolière et gazière située près de Cremona, en Alberta.

Une installation pétrolière et gazière en Alberta (Photo d'archives)

Photo : The Canadian Press / Jeff McIntosh

Radio-Canada
La version audio de cet article est générée par la synthèse vocale, une technologie basée sur l’intelligence artificielle.

Si la fonctionnaire de carrière Yvette Zentner pouvait remonter le temps, elle se donnerait un conseil : « Ne postule pas à PGIC. »

Elle fait référence à Pétrole et gaz des Indiens du Canada (PGIC), une agence fédérale basée en Alberta qui supervise l'exploitation des combustibles fossiles sur les terres des Premières Nations. Ces dernières années, des rapports ont fait état d'un racisme « stupéfiant » et d'un environnement de travail toxique.

Mais Mme Zentner, membre de la nation Siksika à l'est de Calgary, a passé 27 ans au sein de l'agence. Elle est l’une des deux principales plaignantes dans le cadre d'un recours collectif proposé, qui a été déposé pour la première fois en 2021.

Les allégations de discrimination systémique formulées dans le cadre de l'action en justice n'ont pas été prouvées et elles ont été testées dans le cadre d'une procédure appelée certification. Le gouvernement fédéral souhaite que l'affaire soit entièrement rejetée, car elle devait être réglée par les mécanismes internes de PGIC et non par les tribunaux. 

En ce qui concerne PGIC, je n'ai pas eu une bonne expérience, a déclaré Mme Zentner lors d'une entrevue réalisée depuis son domicile d'Okotoks, une petite municipalité au sud de Calgary. 

En mai, après avoir pris sa retraite, Mme Zentner a partagé publiquement son histoire d'ambitions non réalisées et d'espoirs anéantis – une histoire que les avocats considèrent comme emblématique de l'expérience des employés autochtones à PGIC.

Je pensais que ce serait une très bonne occasion professionnelle pour moi, se souvient-elle. Mais je me suis vite rendue compte que ce ne serait pas si facile. J'ai fait face au racisme, au racisme systémique, dès le premier jour.

Elle dit s’être vu refuser arbitrairement une formation et avoir subi un harcèlement persistant de la part d'un supérieur – une assertion qui figure aussi dans le rapport d’une enquête externe menée en 2015 et qui est citée dans la déclaration sous serment de Mme Zentner. Elle affirme avoir fini par perdre tout espoir.

J'ai été laissée là pendant près de 18 ans, a-t-elle déclaré.

Je pense que les occasions d’avancement se seraient présentées plus facilement si je n'avais pas été autochtone, et peut-être même si je n'avais pas été une femme.

Elle s’est jointe dans cette affaire à d'autres personnes qui disent être entrées dans la bureaucratie avec l'espoir d'un changement, mais qui ont trouvé l'environnement discriminatoire et préjudiciable.

Il y a eu tant de fois où je suis rentrée chez moi en pleurant, où j'ai eu envie d'arrêter.

Une citation de Yvette Zentner, plaignante du recours collectif

Mais je ne pouvais pas et je ne voulais pas, alors j'ai tenu bon. Le jour où j'ai eu droit à ma pension complète, je suis sortie de là, a-t-elle affirmé.

Un contre-interrogatoire traumatisant

La Cour fédérale du Canada à l'intérieur de l'édifice de la Cour suprême du Canada à Ottawa.

Les recours collectifs devant la Cour fédérale

Photo : iStock / sockagphoto

Les avocats du ministère de la Justice ont récemment procédé au contre-interrogatoire de Mme Zentner et de l’autre plaignante principale, Letitia Wells, une ancienne sous-traitante de PGIC.

Cela m'a traumatisée à nouveau, a déclaré Mme Wells, de la nation Kainai, à propos de cette expérience.

Mme Wells est une survivante des écoles du jour et une survivante d'abus physiques, sexuels et domestiques, ainsi qu'une descendante de plusieurs générations de survivants des pensionnats, comme l'indique sa déclaration sous serment au tribunal.

Elle affirme avoir été victime de harcèlement sexuel de la part d'un cadre supérieur. Lors du contre-interrogatoire, elle a dû relire ses allégations et revivre les incidents mentionnés.

Après avoir lu ces allégations [de nature] sexuelle, je n'arrivais pas à croire à quel point elles m'avaient affectée, car encore une fois, je fais face à une institution puissante qui essaie de me discréditer, a confié Letitia Wells. 

Le gouvernement fait valoir que les employés ne peuvent pas intenter de poursuites parce que leur droit de recourir au processus de règlement des griefs internes remplace leur droit d'intenter une action en justice.

Mme Wells qualifie d'« éhontée » la tentative du gouvernement de rejeter l'affaire sur cette base technique.

Les mécanismes de Pétrole et gaz des Indiens du Canada ont échoué. Les procédures de règlement des griefs dont elle dispose n'ont qu'une valeur de service, a-t-elle déclaré. 

Les deux plaignantes affirment que l'organisation est en proie à la division et à la peur des représailles. Elles appuient leurs dires sur un rapport produit par des consultants tiers, en décembre 2021, et déposé depuis au tribunal. Ce document qualifie le milieu de travail de « champ de mines » en raison de la présence de racistes et d’une toxicité largement constatée.

Le cabinet a signalé que, lorsqu'un consultant a demandé à un employé de PGIC s'il connaissait des Autochtones, celui-ci a répondu : Seulement ceux que j'enjambe dans la rue.

Au début de l'année, PGIC a embauché Wallace Fox, qui a longtemps été  chef de la Nation crie d’Onion Lake, en tant que directeur général. Wallace Fox a fait l'objet d'allégations de violence domestique, dont un plaidoyer de culpabilité en 2016 pour voies de fait à l'encontre d'un ancien conjoint.

Yvette Zentner estime que Services aux Autochtones Canada (SAC) aurait dû tenir compte de ces antécédents lors du processus d'embauche.

CBC a demandé une entrevue à M. Fox, mais a été redirigée vers SAC, qui a répondu par une déclaration écrite à la demande d’entrevue.

Le processus d'embauche du PDG et du directeur général a respecté la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, a écrit le porte-parole Eric Head.

Il a déclaré que PGIC adhère à la politique et à la réglementation en matière de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail, mais a refusé de faire d'autres commentaires pour des raisons de protection de la vie privée.

D'une manière générale, Eric Head a déclaré que l'agence prenait toutes les allégations au sérieux et qu’elle s'engageait à garantir la santé, la sécurité et le bien-être de tous les employés, soulignant les sept mesures prises par PGIC pour résoudre les problèmes allégués.

PGIC continue de prendre les mesures nécessaires pour garantir que le milieu de travail est sûr, respectueux et exempt de harcèlement et de discrimination, a-t-il écrit.

Avec les informations de Brett Forester, de CBC Indigenous

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