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« François-René de Chateaubriand » : différence entre les versions

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[[Frédéric Diefenthal]] interprète, courant avril 2010, François René de Chateaubriand sur [[France 2]]. L'auteur y est dépeint à travers les différents grands moments de sa vie.


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Version du 25 mars 2010 à 15:12

François-René de Chateaubriand
Description de cette image, également commentée ci-après
Portrait de François-René de Chateaubriand
Naissance
Saint-Malo, Drapeau du royaume de France Royaume de France
Décès (à 79 ans)
Paris, Drapeau de la France France, IIe République
Auteur
Langue d’écriture français
Mouvement romantisme
Genres

François-Auguste-René, vicomte de Chateaubriand[N 1], né à Saint-Malo le et mort à Paris le , est un écrivain romantique et homme politique français. Il est considéré comme l'une des figures centrales du romantisme français.

Si le rôle politique de Chateaubriand dans la mouvance royaliste au moment du Premier Empire et de la Restauration est resté mineur, il en va tout autrement dans le domaine littéraire où sa place est grande. En effet ses descriptions de la nature et son analyse des sentiments du « moi » en ont fait un modèle pour la génération des écrivains romantiques en France (« Je veux être Chateaubriand ou rien » proclamait le jeune Victor Hugo). Il a aussi, le premier, dans René, ou les Effets des passions (1802) formulé le « vague des passions » qui deviendra un lieu commun du romantisme et fera de René le personnage emblématique de cette sensibilité nouvelle, créée avec une prose ample et rythmée que ses détracteurs qualifieront d'ampoulée.

Il participera aussi au goût pour l'exotisme de l'époque en évoquant l'Amérique du nord où il a voyagé dans Atala (1801) ou Les Natchez (1826) ou encore dans le récit de son voyage en Méditerranée dans Itinéraire de Paris à Jérusalem en 1811.

Ses œuvres engagées où il fait l'apologie de Christianisme comme le Génie du christianisme (1802), Les Martyrs (1809) ont davantage vieilli. Il en va de même pour ses textes politiques comme De Buonaparte et des Bourbons (1814).

L'œuvre monumentale de Chateaubriand reste les Mémoires d'outre-tombe (posthumes, 1849-1850) dont les premiers livres recréent son enfance et sa formation dans son milieu social de petite noblesse bretonne à Saint-Malo ou à Combourg alors que les livres suivants relèvent davantage du tableau historique des périodes dont il a été le témoin de 1789 à 1841. Ce qui fait de ce texte à la fois un chef d'œuvre de l'autobiographie romantique et une mine d'informations pour l'historien.

Biographie

Enfance et mariage

Le vicomte François-René de Chateaubriand est issu d'une très vieille famille aristocratique ruinée de Saint-Malo, qui a retrouvé sa dignité d'antan grâce à la réussite commerciale du père de Chateaubriand, le comte René-Auguste.(René-Auguste de Chateaubriand, chevalier, comte de Combourg, seigneur de Gaugres, le Plessis-l'Epine, Boulet, Malestroit-en-Dol et autres lieux) Cette réussite commerciale est fondée sur le commerce avec les colonies[1]. Le jeune François-René doit d'abord vivre éloigné de ses parents, à Plancoët, chez son oncle et sa grand-mère. Il a trois ans quand la réussite de son père permet à ce dernier de racheter en 1771 le château de Combourg en Bretagne, dans lequel Chateaubriand s'installe en 1777 et passe une enfance souvent morose.

Il fait successivement ses études aux collèges de Dol (1777 à 1781), de Rennes (1782) et de Dinan (1783),il obtient un brevet de sous-lieutenant au régiment de Navarre à 17 ans, sous les ordres de son frère Jean-Baptiste (lequel le présentera à la Cour), puis est fait capitaine à 19 ans. Il vient à Paris en 1788, où il se lie avec Jean-François de La Harpe, Jean-Pierre Louis de Fontanes et autres écrivains de l'époque, et fait ses débuts littéraires en écrivant des vers pour l'Almanach des Muses. Il est alors nourri de Corneille et marqué par Rousseau.

Il se marie en 1792 avec Céleste de La Vigne-Buisson (Céleste de Chateaubriand), descendante d'une famille d'armateurs de Saint-Malo, et qui a 17 ans. Ils n'ont pas de postérité.

L’exilé

M. de Chateaubriand à l'armée de Condé.

À la Révolution française,en 1791, il s’éloigne de France à la vue des excès populaires, et s’embarque pour le Nouveau Monde. Il parcourt, apparemment, pendant une année, les forêts de l’Amérique du Nord, vivant avec les autochtones et ébauchant sur les lieux son poème des Natchez. Il trouve dans ces paysages le reflet de son sentiment d’exil et de solitude.

Il revient d’Amérique en 1792, pour rejoindre à Coblence l’armée des émigrés ; sa jeune femme Céleste, qui vit en Bretagne, délaissée par son mari qui ne lui donne pas de nouvelles, est arrêtée comme « femme d’émigré » Le modèle {{Guillemets}} ne doit pas être utilisé dans l'espace encyclopédique, emprisonnée à Rennes, où elle reste jusqu’au 9 Thermidor. Blessé au siège de Thionville, il est transporté convalescent à Jersey. C'est la fin de sa carrière militaire.

Il va ensuite vivre à Londres, en 1793, dans un dénuement qui le réduit à donner des leçons de français et à faire des traductions pour les libraires. Il y publie en 1797 son premier ouvrage, l’Essai sur les révolutions anciennes et modernes dans leur rapport avec la Révolution française, où il exprime des idées politiques et religieuses peu en harmonie avec celles qu’il professera plus tard, mais où se révèle déjà son talent d’écrivain.

En 1794, son frère et sa belle-sœur (une petite-fille de Malesherbes, l'avocat de Louis XVI) et une partie de leur famille sont guillotinés à Paris.

Retour en France et premiers succès littéraires

Portrait de Chateaubriand par Anne-Louis Girodet-Trioson

Une lettre de sa mère mourante le ramène à la religion. De retour en France en 1800, il dirige pendant quelques années le Mercure de France avec Jean-Pierre Louis de Fontanes, et y fait paraître, en 1801, Atala, création originale qui suscite une admiration universelle.

Il compose vers la même époque René, œuvre empreinte d'une mélancolie rêveuse, qui devient un modèle pour les écrivains romantiques. Dans cette œuvre, il rapporte de manière à peine déguisée l'amour chaste mais violent et passionné qu'il a entretenu pour sa sœur Lucile, qui le surnommait « L'enchanteur ». Sa femme Céleste vit alors avec Lucile dans leur château de Bretagne, mais elles ont cessé de parler de René, leur grand homme qu'elles aiment.

Il publie ensuite le le Génie du christianisme, en partie rédigé en Angleterre, et dont Atala et René sont à l'origine seulement des épisodes : il s'est proposé d'y montrer que le christianisme, bien supérieur au paganisme par la pureté de sa morale, n'est pas moins favorable à l'art et à la poésie que les « fictions » de l'Antiquité. Ce livre fait événement et donne le signal d'un retour du religieux après la Révolution.

Chateaubriand, remarqué par le Premier Consul Napoléon Bonaparte, est choisi en 1803 pour accompagner le cardinal Fesch à Rome comme secrétaire d'ambassade. René reparaît alors au château, tout juste vingt-quatre heures, pour inviter sa femme Céleste à l'accompagner à Rome. Celle-ci, apprenant sa liaison avec la comtesse de Beaumont, refuse le ménage à trois.

Chargé en 1804 de représenter la France près de la République du Valais, il apprend l'exécution du duc d'Enghien : il donne immédiatement sa démission et passe dans l'opposition à l'Empire. Lors du sacre de l'empereur il va chez son ami Joseph Joubert à Villeneuve-sur-Yonne où il écrit plusieurs chapitres des Martyrs et des passages des Mémoires d'outre tombe.

Le voyage en Orient

Rendu aux Lettres, Chateaubriand conçoit le projet d'une épopée chrétienne, où seraient mis en présence le paganisme expirant et la religion naissante. Désireux de visiter par lui-même les lieux où situer l'action, il parcourt la Grèce, l'Asie Mineure, la Palestine et l'Égypte durant l'année 1806.

À son retour d'Orient, exilé par Napoléon à trois lieues de la capitale, il acquiert la Vallée-aux-Loups, dans le Val d'Aulnay (actuellement dans la commune de Châtenay-Malabry), près de Sceaux, où il s'enferme dans une modeste retraite. Sa femme Céleste l'y rejoint, elle raconte dans ses Souvenirs, avec humour, les conditions pittoresques de l'aménagement. Chateaubriand y compose Les Martyrs, sorte d'épopée en prose, parue seulement en 1809.

Les notes recueillies durant son voyage forment la matière de L'Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811). La même année, Chateaubriand est élu membre de l'Académie française, à la place de Marie-Joseph Chénier ; mais ayant, dans son projet de discours de réception, sévèrement blâmé certains actes de la Révolution, il ne lui est pas permis de prendre possession de son siège. Il l'occupe seulement après la Restauration.

Faveur et disgrâce

Chateaubriand accueille avec transport le retour des Bourbons. Dès le 30 mars 1814, il publie contre l'empereur déchu un virulent pamphlet, De Bonaparte et des Bourbons, qui est diffusé à des milliers d'exemplaires, et qui, aux dires de Louis XVIII, sert ce prince autant qu'une armée. Sa femme trouve à s'engager à ses côtés à Gand pendant les Cent-Jours, à Paris lors du retour des Bourbons. Avec un sens inattendu de la politique auquel elle mêle un bon sens naturel, Céleste devient la confidente de Chateaubriand et même son inspiratrice. Pendant toute la Restauration, elle joue auprès de lui un rôle de conseillère écoutée. Chateaubriand accompagne Louis XVIII à Gand, et devient un des membres de son cabinet. Il lui adresse le célèbre Rapport sur l'état de la France. Nommé ambassadeur en Suède, il n'a pas encore quitté Paris quand Napoléon Ier revient en France en 1815.

Après la défaite de l'Empereur, Chateaubriand, tant choqué par l'exécution du duc d'Enghien, « dernier descendant du vainqueur de Rocroi », a moins de scrupules à voter la mort pour le maréchal Ney en décembre 1815 à la chambre des pairs. Il est nommé ministre d'État et pair de France ; mais ayant, dans La Monarchie selon la Charte, attaqué l'ordonnance du 5 septembre 1816 qui dissout la Chambre introuvable, il est disgracié et perd son poste de ministre d'État. Il se jette dès lors dans l'opposition ultra-royaliste, et devient l'un des principaux rédacteurs du Conservateur, le plus puissant organe de ce parti.

Le meurtre du duc de Berry, en 1820, le rapproche de la cour : il écrit à cette occasion des Mémoires sur la vie et la mort du duc. Il est nommé la même année ministre de France à Berlin, puis ambassadeur en Angleterre en 1822 (où son cuisinier invente la cuisson de la pièce de bœuf qui porte son nom).

Il est l'un des plénipotentiaires au congrès de Vérone, et fait décider l'invasion de l'Espagne révolutionnaire, malgré l'opposition de l'Angleterre. À son retour, il reçoit le portefeuille de ministre des Affaires étrangères ; il réussit l'aventure espagnole avec la prise de Cadix à la bataille du Trocadéro en 1823 ; mais, n'ayant pu s'accorder avec M. de Villèle, chef du cabinet, il est brutalement congédié le 5 juin 1824. Il déclare à ce sujet :

«  Et pourtant qu’avais-je fait ? Où étaient mes intrigues et mon ambition ? Avais-je désiré la place de Mr de Villèle en allant seul et caché me promener au fond du Bois de Boulogne ? J’avais la simplicité de rester tel que le ciel m’avait fait, et, parce que je n’avais envie de rien, on crut que je voulais tout. Aujourd’hui, je conçois très bien que ma vie à part était une grande faute. Comment ! vous ne voulez rien être! Allez-vous en ! Nous ne voulons pas qu’un homme méprise ce que nous adorons, et qu’il se croie en droit d’insulter la médiocrité de notre vie.  »

— Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe

Il demeure de 1826 à 1838 à Paris.

Il rentre aussitôt dans l'opposition, mais pour s'unir cette fois au parti libéral, et combat à outrance le ministère Villèle, soit à la Chambre des pairs, soit dans le Journal des débats, où il donne le signal de la défection : il se montre alors le chevalier défenseur de la liberté de la presse et de l'indépendance de la Grèce, ce qui lui vaut une grande popularité.

À la chute de M. de Villèle, il est nommé ambassadeur à Rome (1828), où Céleste l'accompagne cette fois et où elle tient son rang d'ambassadrice avec brio. Mais il donna sa démission à l'avènement du ministère Polignac, ce fut son déclin politique.

Chateaubriand vit un dernier amour en 1828-1829 avec Léontine de Villeneuve, comtesse de Castelbajac  : la jeune femme de 26 ans lui écrit d'abord des lettres enflammées, et ils se rencontrent uniquement en août 1829 dans la station thermale de Cauterets dans les Hautes-Pyrénées. Cette rencontre, platonique ou non, Chateaubriand l'évoque dans un chapitre des Mémoires d'outre-tombe avec l'expression « la jeune amie de mes vieux ans ». Cet amour romantique a inspiré le film de Jean Périssé sorti en 2008 L'Occitanienne ou le dernier amour de Chateaubriand.

L'abandon de la carrière politique et les dernières années

"Chateaubriand aurait pu être un grand ministre. Je l'explique non point seulement par son intelligence aigue, mais par son sens et sa connaissance de l'histoire, et par son souci de la grandeur nationale. J'observe également combien il est rare qu'un grand artiste possède des dons politiques à ce degré".

Charles de Gaulle cité par Philippe de Saint-Robert ( op.cit., pp.28 et 29).


De plus en plus en rupture avec les partis conservateurs, désabusé sur l'avenir de la monarchie, il se retire des affaires après la Révolution de 1830, quittant même la Chambre des Pairs. Il ne signale plus son existence politique que par des critiques acerbes contre le nouveau gouvernement (De la Restauration et de la Monarchie élective, 1831), par des voyages auprès de la famille déchue, et par la publication d'un Mémoire sur la captivité de la duchesse de Berry (1833), mémoire au sujet duquel il est poursuivi, mais acquitté. Il publie également en 1831 des Études historiques (4 vol. in-8), résumé d'histoire universelle où il veut montrer le christianisme réformant la société. Cet ouvrage se veut le frontispice d'une Histoire de France, méditée depuis longtemps, mais inachevée.

Tombe face à la mer sur le rocher du Grand Bé

Ses dernières années se déroulent dans une profonde retraite[2], en compagnie de son épouse. Il ne quitte guère sa demeure (composée d'un appartement au rez de chaussée de l'Hôtel des Missions Etrangères, au 120 rue du Bac à Paris), que pour aller à l'Abbaye-aux-Bois, toute proche, chez Juliette Récamier, dont il est l'ami constant et dont le salon réunit l'élite du monde littéraire.

Il reçoit de son côté de nombreuses visites, tant de la jeunesse romantique que de la jeunesse libérale, et se consacre à achever la rédaction de ses mémoires, commencée en 1811.
Ce vaste projet autobiographique, Mémoires d'outre-tombe, ne devait paraître, selon le vœu de l'auteur, que cinquante ans après sa mort.
Il en sera finalement autrement puisque, pressé par des problèmes financiers, Chateaubriand cède les droits d'exploitation de l'ouvrage à une « Société propriétaire des Mémoires d'Outre-Tombe », constituée le , qui exigera que l'œuvre soit publiée dès le décès de son auteur, et y pratiquera des coupes franches, afin de ne pas heurter le public[3], ce qui inspirera d'amers commentaires à Chateaubriand :

« La triste nécessité qui m'a toujours tenu le pied sur la gorge, m'a forcé de vendre mes Mémoires. Personne ne peut savoir ce que j'ai souffert d'avoir été obligé d'hypothéquer ma tombe [...] mon dessein était de les laisser à madame de Chateaubriand : elle les eût fait connaître à sa volonté, ou les aurait supprimés, ce que je désirerais plus que jamais aujourd'hui.
Ah ! si, avant de quitter la terre, j'avais pu trouver quelqu'un d'assez riche, d'assez confiant pour racheter les actions de la Société, et n'étant pas, comme cette Société, dans la nécessité de mettre l'ouvrage sous presse sitôt que tintera mon glas ! »

— Chateaubriand, Avant-Propos aux Mémoires d'outre-tombe, 1846

Son dernier ouvrage qui était une "commande" de son confesseur est Vie de Rancé. Publiée en 1844, c'est la biographie de Dominique-Armand-Jean Le Boutillier de Rancé (1626-1700), abbé mondain propriétaire du château de Véretz, en Touraine, et réformateur rigoureux de la Trappe. Dans cette biographie, Chateaubriand égratigne une autre célébrité de Véretz, son contemporain Paul-Louis Courier, le redoutable pamhlétaire qui décocha des flèches mortelles contre le régime de la Restauration soutenu par le vicomte et brocarda celui-ci dans plusieurs de ses écrits.


En 1847, Céleste meurt : "Je dois une tendre et éternelle reconnaissance à ma femme dont l'attachement a été aussi touchant que profond et sincère. Elle a rendu ma vie plus grave, plus noble, plus honorable, en m'inspirant toujours le respect, sinon toujours la force des devoirs."

Chateaubriand meurt à Paris le .

Ses restes sont transportés à Saint-Malo et déposés face à la mer, selon son vœu, sur le rocher du Grand Bé, îlot d'aspect romantique situé dans la rade de sa ville natale, auquel on accède à pied depuis Saint-Malo lorsque la mer s'est retirée.

Analyse de l’œuvre

"Chateaubriand portait jusqu'à la cime la gloire émouvante de nos lettres".

Charles de Gaulle, discours du 2 février 1969 à Quimper (cité par Ph. de Saint-Robert, op.cit, p.29).


Par son talent comme par ses excès, Chateaubriand peut être considéré comme le père du romantisme en France. Ses descriptions de la nature et son analyse des sentiments du moi en ont ainsi fait un modèle pour la génération des écrivains romantiques. Il a, le premier, formulé le « vague des passions » qui deviendra un lieu commun du romantisme :

« Il reste à parler d'un état de l'âme, qui, ce nous semble, n'a pas encore été bien observé ; c'est celui qui précède le développement des grandes passions [...]. Plus les peuples avancent en civilisation, plus cet état du vague des passions augmente [...] »

— Chateaubriand, Génie du Christianisme, vol. 3, , II, « IX »

Sa pensée et ses actions politiques semblent offrir de nombreuses contradictions ; il se voulait à la fois, l'ami de la royauté légitime et de la liberté, défendant alternativement celle des deux qui lui semblait être en péril :

« Quant à moi, qui suis républicain par nature, monarchiste par raison, et bourbonniste par honneur, je me serais beaucoup mieux arrangé d'une démocratie, si je n'avais pu conserver la monarchie légitime, que de la monarchie bâtarde octroyée de je ne sais qui[N 2]. »

— Chateaubriand, De la nouvelle proposition relative au bannissement de Charles X et de sa famille,

Ses détracteurs lui ont reproché un style ampoulé et une vanité excessive qui éclateraient dans ses Mémoires d'outre-tombe.Mais c'est d'abord un polémiste de génie.

On observe dans ses Mémoires d'outre-tombe une dualité entre le Chateaubriand personnel qui exalte ses sentiments avec un lyrisme romantique et le Chateaubriand public qui établit une chronique de mémorialiste de son époque, qui a vu l'avènement de la démocratie à laquelle il s'opposait, estimant que la France n'était pas encore mûre (Mémoires d'outre-tombe, 6 juin 1833). On remarque que tout au long de son œuvre les deux personnages se regroupent en un seul, ils s'associent ainsi et l'on remarque que toute la vie politique de Chateaubriand fut influencée par ses sentiments personnels et sa solitude qui s'est transformée en une paranoïa et une peur à l'encontre d'un éventuel complot qu'il croyait formulé contre lui depuis qu'il avait été éloigné à plusieurs reprises du pouvoir monarchique.

Citations

« Je suis bourbonien par honneur, monarchiste par raison, républicain par goût et par caractère. »


« Je tache de me retirer du monde avec ma propre estime ; dans la solitude, il faut prendre garde au choix que l'on fait de sa compagne. »


« Il faut être économe de son mépris en raison du grand nombre de nécessiteux. »


« Il y a des hommes qui, après avoir prêté serment à la République une et indivisible, au Directoire en cinq personnes, au Consulat en trois, à l’Empire en une seule, à la première Restauration, à l’acte additionnel aux Constitutions de l’Empire, à la seconde Restauration, ont encore quelque chose à prêter à Louis-Philippe : je ne suis pas si riche. (...) Il y a des grands seigneurs de l'Empire unis à leurs pensions par des liens sacrés et indissolubles, quelle que soit la main dont elles tombent : une pension est à leurs yeux un sacrement ; elle imprime caractère comme la prêtrise et le mariage ; toute tête pensionnée ne peut cesser de l'être : les pensions étant demeurées à la charge du Trésor, ils sont restés à la charge du même Trésor : moi j'ai l'habitude du divorce avec la fortune ; trop vieux pour elle, je l'abandonne, de peur qu'elle ne me quitte. » (Contre la monarchie de juillet)


Jugements sur Chateaubriand

  • Victor Hugo se serait exclamé, étant enfant : « Je veux être Chateaubriand ou rien ! »[N 3].
  • Talleyrand a dit de Chateaubriand : « Monsieur de Chateaubriand croit qu'il devient sourd car il n'entend plus parler de lui ». Et Chateaubriand a dit de Talleyrand : « ses yeux étaient ternes, de sorte qu’on avait peine à y lire, ce qui le servait bien ; comme il avait reçu beaucoup de mépris, il s’en était imprégné, et il l’avait placé dans les deux coins pendants de sa bouche. »


"Oh! Etre dans un vieux château assis près d'un bon feu avec des fenêtres donnant sur de grands et vieux arbres moussus et lire seul, tranquillement toute une correspondance intime et inédite de Chateaubriand ! Ce serait une volupté suprême".

Abbé Arthur Mugnier, Journal, 14 février 1930 ( Mercure de France, 1985, p. 514).


" C'était un désespéré. On le comprend, il avait prévu l'avenir".

Charles de Gaulle à Léon Noel, le 26 mai 1948 (cité par Ph.de Saint-Robert, op.cit. p.25).

" A Colombey, le 24 octobre 1947, à l'heure du thé, le Général parle de Chateaubriand : "L'an dernier, j'ai relu lentement les Mémoires d'outre-tombe (...) C'est une oeuvre prodigieuse...Il pose sur l'avenir un regard profond...En fait, il avait presque tout vu...y compris les bolcheviks... et puis, je sens comme lui : essentiellement, voyez-vous, Chateaubriand est un désespéré...mais jusque dans son désespoir il fait face, il se redresse de toute sa taille".

Ch. de Gaulle cité par Ph. de Saint-Robert dans "De Gaulle et ses témoins - Rencontres historiques et littéraires", Bartillat, 1999, p.28).


Liste des œuvres

Posthumes
  • Mémoires d'outre-tombe, E. et V. Penaud frères (Paris), 1848, autobiographie
    Publiées d'abord dans le feuilleton de la Presse, ont été éditées en 12 vol. in-8 de 1849 à 1850.
Publications anciennes
  • Outre de nombreuses éditions de chacun des ouvrages séparés de Chateaubriand, il a été fait plusieurs éditions de ses Œuvres complètes, dont celle de Pierre-François Ladvocat, en 31 volumes in-8, Paris, 1826-1831, revue par l'auteur même, qui y a joint des éclaircissements et des notes critiques, et l'a enrichie de quelques œuvres inédites (les Abencérages, les Natchez, Moïse, tragédie, des poésies diverses, des discours politiques) ; et celle de Charles Gosselin, 25 volumes in-8, 1836-1838, contenant également le Congrès de Vérone, un Essai sur la littérature anglaise, une traduction du Paradis perdu de John Milton.

Voir aussi

Articles connexes

Annexes

Bibliographie

  1. Tome I-II. Présentation des Œuvres complètes par Béatrice Didier. Préface de Chateaubriand (Ladvocat, t. XVI). Édition établie par Aurelio Principato et Emmanuelle Tabet. Essai sur les révolutions (Ladvocat, t. I-II). Édition établie par Aurelio Principato avec la collaboration de Laura Brignoli, Vanessa Kamkhagi, Cristina Romano et Emmanuelle Tabet. 2009. 1376 p., relié, 15 x 22 cm. ISBN 978-2-7453-1737-7.
  2. Tome VI-VII. Voyage en Amérique. Texte établi, présenté et annoté par Henri Rossi. Voyage en Italie, Cinq jours à Clermont, Le Mont-Blanc. Textes établis, présentés et annotés par Ph. Antoine. 2008. 896 p., rel. 978-2-7453-1691-2.
  3. Tome XLI. Atala. Édition établie par Fabienne Bercegol. René. Édition établie par Colin Smethurst. Les Aventures du derniers Abencérage. Édition critique par Arlette Michel. 2008. 608 p., rel. 978-2-7453-1684-4.

Biographies

Biographies anciennes
  • Scipion Marinannée=1832, Histoire de la vie et des ouvrages de M. de Chateaubriand, Paris, Vimont (lire en ligne)
  • Paul de Noailles, Éloge de M. de Châteaubriand, par M. le duc de Noailles, prononcé à l'Académie française, le 6 décembre 1849, Paris, Comon,
    Éloge prononcé par son successeur à l'Académie française
  • François-Zénon de Collombet, Châteaubriand, sa vie et ses écrits, Lyon et Paris, Perisse frères, (lire en ligne)
  • Sainte-Beuve, Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'empire, Paris, Garnier frères, (lire en ligne)
  • Charles Benoît, Châteaubriand, sa vie et ses oeuvres, étude littéraire et morale, Paris, Didier, (lire en ligne)
    Prix d'éloquence de l'Académie française, le 21 juillet 1864
Biographies modernes

Études

  • CHATEAUBRIAND AVANT LE GÉNIE DU CHRISTIANISME. Actes du colloque ENS Ulm réunis par Béatrice Didier et Emmanuelle Tabet. Éditions Honoré Champion, 2006. 176 p., rel. 978-2-7453-1284-6.
  • Marie-Elisabeth BOUGEARD-VETÖ.Chateaubriand traducteur. De l’exil au Paradis perdu. Éditions Honoré Champion, 2005. 832 p., rel. 978-2-7453-1182-5.
  • Jean-Christophe CAVALLIN. Chateaubriand cryptique ou Les Confessions mal faites. Éditions Honoré Champion, 2003. 224 p., rel. 978-2-7453-0903-7.
  • DUBÉ (Pierre H.). Nouvelle bibliographie refondue et augmentée de la critique sur

François-René de Chateaubriand (1801-1999). Éditions Honoré Champion, 2002. 896 p., rel. 978-2-7453-0706-4.

  • Emmanuelle TABET, Chateaubriand et le XVIIe siècle. Mémoire et création littéraire. Éditions Honoré Champion, 2002. 464 p., rel. 978-2-7453-0644-9.
  • Bertrand AUREAU. Chateaubriand penseur de la Révolution. Éditions Honoré Champion, 2001. 352 p, rel. 978-2-7453-0338-7.
  • ENFANCES ET VOYAGES DE CHATEAUBRIAND. Armorique, Amérique. Actes du colloque de Brest (septembre 1998) édités par Jean Balcou. Éditions Honoré Champion, 2001. 144 p., rel. 978-2-7453-0474-2.
  • Jean-Christophe CAVALLIN. Chateaubriand mythographe. Autobiographie et allégorie dans les Mémoires d’Outre-Tombe. Éditions Honoré Champion, 2000. 580 p., rel. 978-2-7453-0208-3.
  • Philippe MOISAN. Les Natchez de Chateaubriand : l’utopie, l’abîme et le feu. Éditions Honoré Champion, 1999. 186 p., rel. 978-2-7453-0097-3.
  • Fabienne BERCEGOL. La Poétique de Chateaubriand : le portrait dans les Mémoires d’Outre-Tombe. Éditions Honoré Champion, 1997. 564 p., rel. 978-2-85203-589-8.
  • Philippe ANTOINE. Les Récits de voyage de Chateaubriand. Contribution à l’étude d’un genre. Éditions Honoré Champion, 1997. 328 p., rel. 978-2-85203-638-3.
  • Manuel de Diéguez, Chateaubriand ou le poète face à l'histoire, Paris, Plon, , 254 p.
  • Sébastien Baudoin, « Les paysages de l’itinérance dans les récits de voyage de Chateaubriand : accélération temporelle et fragmentation spatiale », colloque transfrontalier, « Le temps (in)saisissable ? » à l’Université Marc Bloch de Strasbourg du 16 au 18 novembre 2006 (paru dans la Revue Entre’ Actes, actes du colloque transfrontalier « Le Temps (in)saisissable ? », 2008 , p. 92 à 98.
  • Sébastien Baudoin, « Combourg, lieu matriciel », dans Pascale Auraix-Jonchière (dir.), Ô saisons, ô châteaux : châteaux et littérature des Lumières à l'aube de la modernité, 1764-1914, Presses universitaires Blaise Pascal, , 385 p. (ISBN 2-84516-260-X)

Art

Atala au tombeau, Huile sur toile de Anne-Louis Girodet-Trioson, 1808 (Musée du Louvre)

Les œuvres de Chateaubriand, et l'auteur lui-même, ont fait l'objet de diverses représentations artistiques. On peut citer notamment :

  • Les peintures d'Anne-Louis Girodet-Trioson :
    • Atala au tombeau ou Les Funérailles d'Atala, Huile sur toile, 1808, Musée du Louvre (Paris)[4].
    • Portrait de Chateaubriand méditant sur les ruines de Rome, Huile sur toile, 1808. Légué en 1848 par Juliette Récamier à la ville de Saint-Malo (Musée d'Histoire et d'Ethnographie). Une réplique réalisée par Girodet en 1811 se trouve au Musée de l'Histoire de France du Château de Versailles[5].
  • Le Portrait de Francois Rene (1768-1848) Vicomte de Chateaubriand, de Pierre Louis Delaval.
  • Le Portrait de Chateaubriand de Paulin Guérin (que l'on trouve parfois attribué à Pierre-Narcisse Guérin)[6].
  • Les sculptures de :
  • La statue en granit réalisée par Alphonse Terroir en 1930, qui se trouve sur la place de la ville de Combourg[9].


Il existe par ailleurs un prix littéraire, le prix Combourg, qui récompense chaque année un écrivain dont le style honore la mémoire et l’œuvre de Chateaubriand.

Cinéma

Bernard Le Coq a interprété le rôle de Chateaubriand en 2008, dans le film L'Occitanienne, le dernier amour de Chateaubriand réalisé par Jean Périssé, basé sur[10] :

  • Les Mémoires d'outre-tombe (livre 32, chapitre 1) ;
  • Comtesse de Saint-Roman (préf. Robert de Flers), Le Roman de l'Occitanienne et de Chateaubriand, Paris, Plon-Nourrit et Cie, , XX-215 p.
    Avec 70 lettres inédites de Chateaubriand

Frédéric Diefenthal interprète, courant avril 2010, François René de Chateaubriand sur France 2. L'auteur y est dépeint à travers les différents grands moments de sa vie.

Liens externes

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Notes et références

Notes
  1. Les prénoms François-René sont donnés comme prénoms usuels dans la plupart des sources modernes. D’autres, comme Abel-François Villemain dans M. de Chateaubriand, sa vie, son œuvre... donnent François-Auguste comme prénoms.

    L’intéressé ne signait ses ouvrages que par Chateaubriand ou M. le vicomte de Chateaubriand.

  2. On trouve souvent cette citation modifiée sous la forme suivante : l'auteur aurait dit de lui-même qu'il était « bourbonien par honneur, monarchiste par raison, républicain par goût et par caractère ». La forme première peut se vérifier dans le texte original de La nouvelle proposition relative au bannissement de Charles X et de sa famille, notamment en p. 26 de l'édition d'octobre 1831, par Le Normant fils (Paris)
  3. Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, Adèle Hugo, 1863. La phrase aurait été notée dans un cahier d'écolier. Il aurait écrit ces mots à la suite d'un concours de poésie perdu - le jury ne pouvant croire qu'un individu si jeune ait réalisé un tel poème.
Références
  1. "Il passa aux îles; il s'enrichit dans la colonie et jeta le fondement de la nouvelle fortune de la famille" Mémoires d'outre-tombe
  2. Chateaubriand à la Vallée-aux-Loups, Film documentaire de Simon Thisse, 2009, découvrir en ligne.
  3. Pierre Clarac, « Genèse des Mémoires d'outre-tombe
  4. Notice de présentation d'Atala au tombeau sur le site du Musée du Louvre
  5. Notice Chateaubriand méditant sur le site du musée.
  6. On peut lire à ce sujet l'article d'Eric Bertin, historien de l'Art : « À propos des portraits de Chateaubriand peints par Guérin, Girodet et Delaval, et, incidemment, de son buste sculpté par David d’Angers »
  7. Notice de la Base Joconde, sur le site du Ministère de la Culture
  8. Notice de la Base Joconde, sur le site du Ministère de la Culture
  9. Notice du monument sur le site du patrimoine de la Bretagne
  10. Fiche technique du film sur son site officiel

Source partielle

Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), « François-René de Chateaubriand » dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, (lire sur Wikisource)

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