Bleda
Roi des Huns Empire hunnique avec Attila | |
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Bleda ou Bléda, mort vers 445, est un roi des Huns qui règne conjointement avec son frère Attila de 435 à sa mort. Leur règne conjoint est marqué par la signature du traité de Margus avec l'empereur d'Orient Théodose II (435), par la participation à une campagne contre les Burgondes du roi Gondicaire et par une guerre contre l'Empire d'Orient de 441 à 443.
Bleda est probablement assassiné un peu plus tard sur l'ordre d'Attila, qui devient le seul maître de l'empire hunnique jusqu'à sa propre mort en 453.
Biographie
[modifier | modifier le code]Sources
[modifier | modifier le code]Les informations concernant Bleda viennent essentiellement de l'Histoire des Goths de l'historien byzantin Jordanès (VIe siècle), qui les reprend de Priscus (vers 410-vers 471), contemporain des évènements.
On en trouve aussi quelques-unes dans la Chronique universelle de Prosper d'Aquitaine (390-463) et dans la Chronographie de Théophane le Confesseur (759-818).
Avènement
[modifier | modifier le code]Bleda, fils du prince Moundzouk, est le frère ainé d'Attila[1]. Lorsque les deux frères succèdent vers 435 comme rois des Huns à leur oncle Ruga, il semble que l'aîné se voie confier la partie orientale de l'empire hunnique[2] et occupe la place de « roi principal » dans leur association[3] : il est en effet le seul mentionné dans la Chronica Gallica de 452[4].
On sait que, comme son frère, il a eu plusieurs épouses, probablement dans le cadre d'une stratégie d'alliances matrimoniales permettant aux deux souverains d'acquérir le soutien des chefs huns de second rang[5].
Le traité de Margus (435)
[modifier | modifier le code]Les nouveaux rois poursuivent les négociations entamées par Ruga avec l'Empire romain d'Orient, où règne alors Théodose II depuis 408. Ces négociations aboutissent au traité de Margus (conclu dans l'actuelle Požarevac, en Serbie).
Ce traité double le tribut annuel dû par l'empire en le portant à 700 livres d'or[4], faisant peut-être acter de la sorte la reconnaissance des deux souverains[6]
Il convient en outre d'une extradition mutuelle des déserteurs, fugitifs et réfugiés, de l'établissement de marchés frontaliers pour les échanges commerciaux ainsi que l'engagement des Romains à ne pas s'allier avec d'autres peuples hostiles aux Huns[4].
À la suite de l'accord, deux princes de la famille royale hunnique, Mama et Atakam, réfugiés chez les Romains, sont livrés à leur cousins et aussitôt empalés[7].
Affermissement de la domination des Huns sur leurs vassaux
[modifier | modifier le code]Le traité signé, les deux souverains s'attachent à reprendre en main les populations vassales[4], consolidant leur hégémonie sur les peuples, nomades ou sédentaires, vivant au nord du Danube (frontière de l'empire romain), sans que l'on puisse fixer avec précision les limites des territoires sous leur contrôle[6].
Ils lancent notamment une campagne contre les tribus scythes et une autre contre une peuplade mentionnée uniquement par Priscus sous le nom de « Sorosgues », opération attestant peut-être d'une volonté d'extension de leur domination[4].
Les deux frères contribuent aussi à la campagne menée par Aetius, commandant en chef de l'armée impériale d'Occident au nom de l'empereur Valentinien III, participant probablement à l'anéantissement des Burgondes de Gondicaire vers 436 ou 437. Cette intervention laisse chez les Burgondes et autres Germains un souvenir terrible dont on retrouve l'écho au Moyen Âge dans les épopées germaniques (Chanson des Nibelungen) ou scandinaves (Edda de Snorri et Edda poétique)[4].
La guerre contre l'Empire d'Orient (441-443)
[modifier | modifier le code]En 441, Bleda et Attila rompent le traité de Margus, prétextant le pillage de tombes hunniques par l'évêque de cette ville, ainsi que le non-respect de la clause sur les réfugiés[8]. En réalité, ils profitent de l'affaiblissement de la défense du limes danubien du fait des guerres menées contre les Vandales en Sicile et en Afrique, contre les Sassanides en Arménie, et contre divers peuples révoltés (Isauriens, Zanes, Berbères)[9].
Les troupes hunniques envahissent l'Illyrie[8] et s'emparent de plusieurs places fortes :
- Viminacium[10], qui, occupée puis pillée par Bleda[11], est ensuite rasée au sol[12] ;
- le camp d'Ulcisia Castra
- les villes de Singidunum, Naissus et Margus, dont l'évêque obtient un sauf-conduit pour avoir ouvert les portes aux Huns[9].
Une trêve est conclue avec les commandants romains Anatolius et Aspar, mais le conflit reprend dès 442, Théodose II ayant rappelé des légions de Sicile pour contrer l'offensive des Huns. Ceux-ci se retirent en 443, emportant un important butin tandis que l'empereur fait renforcer les défenses frontalières et refuse par la suite de payer le tribut[9].
Mort
[modifier | modifier le code]Bleda est assassiné, selon différentes sources (Priscus n'en parle pas[13]), entre 442 et 447, probablement en 444 ou 445[3]. Plusieurs auteurs antiques affirment que cet assassinat a été ordonné par Attila, voire qu'il l'a tué lui-même. Aucun auteur de donne de raison précise pour cette opération[14].
Attila occupe dès lors seul la tête de l'empire hunnique[3]. Il place son fils Ellac à la tête de la partie orientale de l'empire[15]. Il est immédiatement confronté à une révolte des Akatziri (en), peuplade hunnique de la région de la mer Noire, mais ce soulèvement est maté avec l'aide des Gépides[16].
Il est probable que l'assassinat de Bleda a contribué à la dégradation des relations entre Attila et Aetius[17].
Bleda dans la littérature et les arts
[modifier | modifier le code]Littérature hongroise
[modifier | modifier le code]Dans la culture hongroise, Bleda, connu sous le nom de Buda, figure dans plusieurs pièces de théâtre entre les XVIIe et XIXe siècles, dans lesquelles il est tué par son frère à cause de ses intrigues et de sa lâcheté, Attila étant considéré comme un prédécesseur mythique des rois de Hongrie[18].
Une tradition médiévale reprise de Simon de Kéza par le poète hongrois János Arany au XIXe siècle fait d'Attila et de Bleda l'équivalent pour la Hongrie de Romulus et Rémus, Arany attribuant la fondation de la ville de Budapest à Bleda (Buda) qui est assassiné peu après par Attila[19]. Aucune source antique ne corrobore cette assertion[20].
Cinéma
[modifier | modifier le code]Le personnage de Bleda apparaît dans plusieurs films :
- Attila, fléau de Dieu réalisé en 1954 par Pietro Francisci (incarné par Ettore Manni) ;
- Le Signe du païen réalisé en 1954 par Douglas Sirk (Leo Gordon) ;
- Attila le Hun, téléfilm réalisé en 2001 par Dick Lowry (Tommy Flanagan).
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Kim 2016, p. 79.
- Kim 2016, p. 80.
- Kim 2016, p. 93.
- Lebedynsky 2018, p. 78.
- Heather 2017, p. 379.
- (en) Michael Kulikowski, The Tragedy of Empire : From Constantine to the Destruction of Roman Italy, Harvard University Press, (ISBN 978-0-674-66013-7), p. 184
- Heather 2017, p. 383.
- Lebedynsky 2018, p. 79.
- Lebedynsky 2018, p. 81.
- Heather 2017, p. 354.
- István Bóna, Les huns : Le grand empire barbare d'Europe (IVe – Ve siècles), Errance, (ISBN 978-2-87772-223-0), p. 62
- (en) Michael Kulikowski, The Tragedy of Empire : From Constantine to the Destruction of Roman Italy, Harvard University Press, (ISBN 978-0-674-66013-7), p. 135
- Heather 2017, p. 363.
- Edina Bozoky, Attila et les Huns : Vérités et légendes, Place des éditeurs, (ISBN 978-2-262-04037-6, lire en ligne), Pt19
- Kim 2016, p. 86.
- Kim 2016, p. 109.
- Kim 2016, p. 97.
- Hervé Dumont, L'Antiquité au cinéma: vérités, légendes et manipulations, Nouveau Monde, (ISBN 978-2-84736-476-7), p. 583
- József Laszlovszky et James Plumtree, « ‘A castle once stood, now a heap of stones…’ the Site and Remains of Óbuda in Medieval Chronicles, National Epics, and Modern FringeTheories », dans Balázs Nagy, Martyn Rady, Katalin Szende et András Vadas (éds.), Medieval Buda in Context, Leiden, Brill, coll. « Brill’s Companions to European History » (no 10) (ISBN 978-90-04-30768-1), p. 106
- József Laszlovszky et James Plumtree, « ‘A castle once stood, now a heap of stones…’ the Site and Remains of Óbuda in Medieval Chronicles, National Epics, and Modern FringeTheories », dans Balázs Nagy, Martyn Rady, Katalin Szende et András Vadas (éds.), Medieval Buda in Context, Leiden, Brill, coll. « Brill’s Companions to European History » (no 10) (ISBN 978-90-04-30768-1), p. 94
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Iaroslav Lebedynsky, Huns d'Europe, Huns d'Asie : Histoire et cultures des peuples hunniques, IVe – VIe siècle, Errance, (ISBN 978-2-87772-630-6)
- Peter J. Heather, Rome et les barbares : Histoire de la chute de l'empire, Alma éditeur, (ISBN 9782362792311)
- (en) Hyun Jin Kim, The Huns, Routledge, (ISBN 978-1-317-34091-1)
- Éric Deschodt, Attila, Gallimard, (ISBN 978-2-07-030903-0)
- Personnalité du Ve siècle
- Date de naissance incertaine (IVe siècle)
- Date de décès incertaine (Ve siècle)
- Huns du haut Moyen Âge
- Souverain assassiné
- Personnalité politique de la Rome antique
- Adversaire de la Rome antique
- Personnalité du haut Moyen Âge par nom
- Antiquité tardive
- Personnage de la légende des Nibelungen
- Roi des Huns