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Système Séré de Rivières

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Le système Séré de Rivières est un ensemble de fortifications bâti à partir de 1874 et jusqu'au début de la Première Guerre mondiale le long des frontières et des côtes de France. Il doit son nom à son concepteur et promoteur le général Raymond Adolphe Séré de Rivières.

Genèse du système

Au lendemain de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, la France se retrouve fortement affaiblie et isolée du reste de l'Europe, sous la menace d’une Allemagne renforcée par le gain de l’Alsace-Lorraine et ayant par là perdu les deux places d'arrêt qu'étaient Strasbourg et Metz.

Parallèlement à l’évacuation des dernières troupes d’occupation allemandes en 1873, est créé le Comité de Défense qui siège de 1872 à 1888. Ce comité a pour mission la réorganisation défensive de toutes les frontières de France, aussi bien terrestres que maritimes. Pour cela, il fallait boucher la brèche laissée par la perte des places fortes du Nord-Est, moderniser les anciennes places qui se montrèrent dépassées pendant les affrontements de 1870 et recréer de nouvelles places adaptées aux nouvelles techniques de combat et notamment aux grands progrès qu'avait fait l’artillerie à cette époque.

Ce comité est créé par un décret présidentiel le 28 juillet 1872. Il compte à sa création neuf membres dont le ministre de la Guerre et des représentants de l’artillerie et du génie. Le général Séré de Rivières, commandant du génie du 2e corps d’armée de Versailles, présent dès le début dans ce comité est nommé secrétaire du Comité en 1873. Le 1er février 1874, il est promu à la tête du Service du génie au ministère de la Guerre. Durant ces années, Séré de Rivières est réellement la tête pensante du Comité en ayant tous les pouvoirs nécessaires pour faire admettre ses idées et les réaliser sans réelle opposition.

Le rôle de ce système est :

  • d’empêcher une nouvelle offensive ennemie
  • de faciliter la mobilisation des troupes en cas d’attaque
  • de faciliter la reprise des territoires perdus pendant la guerre de 1870.

La première tranche de travaux du nouveau système fortifié français est lancée dès 1874.

En 1880, alors que les travaux sont déjà bien avancés et à la suite de rivalités internes et de manœuvres politiques, le général Séré de Rivières est évincé du CDF. Malgré cela, on continue les travaux prévus, tranche par tranche.

La fortification de 1874

Depuis les fortifications érigées par Vauban, la fortification française n’avait pratiquement pas évolué au cours du XIXe siècle. Durant les combats de 1870, elle montre rapidement ses faiblesses : le principe de la citadelle imprenable ne résiste pas aux assauts. Il faut donc repenser les places fortes en les adaptant aux progrès de l’artillerie. Finies les citadelles englobant les villes, maintenant les forts sont rejetés à l’extérieur des cités, à environ une dizaine de kilomètres, voire plus, du centre urbain dans le but de laisser l’artillerie et l’ennemi suffisamment loin. On crée désormais autour des places fortes une ceinture de forts distants de seulement quelques kilomètres, de façon à ce que leurs moyens défensifs puissent couvrir efficacement les intervalles.

Les forts que l’on construit abandonnent le principe du bastion, là encore devenu obsolète du fait des avancées des armements. Leur tracé est, plus simplement, un polygone entouré par un fossé couvert par le feu d’organes de flanquement appelés caponnières (qui ne sont qu'une évolution du bastion). Ces forts, construits en maçonnerie et utilisant abondamment la pierre de taille, sont organisés autour de leur caserne servant à abriter la garnison du fort en la protégeant des bombardements ennemis. Les pièces d’artillerie sont, quant à elles, disposées sur les dessus du fort, le plus souvent à l’air libre.

Photographie aérienne du fort de Douaumont à Verdun (1916).

En plus des différentes places-fortes réparties le long de toutes les frontières françaises, on bâtit deux rideaux défensifs (une ligne de forts faisant la jonction entre deux places-fortes) et toute une série de forts isolés appelés forts d’arrêt destinés à contrôler certains points de passages et objectifs jugés sensibles, ainsi qu'un grand nombre de batteries côtières. Parmi tous ces ensembles, on peut citer, par exemple, les places fortes de Verdun, Toul, Épinal, Belfort dans le Nord-Est, de Paris, de Brest, les deux rideaux défensifs de la Meuse (faisant la jonction entre les places de Verdun et de Toul) et de la Haute-Moselle (s’étirant, dans les Vosges, d’Épinal à Belfort). Pour les forts d’arrêt, on peut citer ceux de Manonviller (Meurthe-et-Moselle) et de Bourlémont (Vosges).

Les adaptations aux progrès de l’artillerie

Après l'invention du canon à tube rayé vers 1850, une révolution, appelée « crise de l'obus-torpille », apparaît de 1883 à 1885 dans l’artillerie avec la découverte de la mélinite, un puissant explosif qui décuple le pouvoir destructeur de l’artillerie sur les forts. À partir des essais réalisés sur le fort de la Malmaison, on se rend compte que toutes les fortifications bâties jusqu'alors sont devenues obsolètes. Les maçonneries des forts ne sont plus suffisamment résistantes, les pièces d’artillerie placées sur les superstructures sont devenues extrêmement vulnérables. Il faut donc trouver une réponse à ces nouvelles menaces.

Une solution est rapidement trouvée grâce à la découverte quelques années auparavant du béton spécial qui permet d’offrir suffisamment de résistance aux nouveaux explosifs. En plus du béton spécial, en 1885, le béton armé est découvert et permet aux fortifications Séré de Rivières de rester d’actualité. Reste à résoudre un dernier point : que faire des forts déjà construits qui représentent tout de même une grande partie du système ?

Le parti est pris de moderniser certains forts et de conserver en l’état ou de déclasser les autres forts. Après cette décision, on commence à ajouter sur certains forts une carapace de béton pour protéger les organes essentiels comme les casernes, les forts commencent de plus en plus à s’enterrer, notamment les magasins à poudre, pièce sensible et point faible des forts de 1re génération.

Dans certains de ces forts modernisés, on peut observer une bande rouge parcourant certains murs : cela servait à signaler aux occupants du fort que le lieu marqué comme tel était protégé contre l'impact des nouveaux obus créés après la crise de l'obus-torpille.

Restait le problème des protections de l’artillerie. Bien que pris en compte dès 1874, on se cantonna à quelques timides essais. Le réveil vient avec la crise de l’obus torpille.

Les cuirassements

Les balbutiements des cuirassements

Les progrès que fait l’industrie en matière de sidérurgie aident grandement les ingénieurs attachés aux problèmes des cuirassements. Ainsi en 1875, avec entre autres, les travaux du commandant Mougin, les cuirassements prennent forme. Les premiers à être installés sont les casemates en acier laminé (système Mougin). Construites au nombre de quatre dans trois des forts du rideau de la Haute-Moselle, elles sont prévues pour recevoir un canon de 138 mm Reffye et blindées contre le canon de campagne.

Le fer laminé se révélant un peu faible contre les nouveaux types d’armement et notamment les armes de siège, le commandant Mougin propose une évolution de sa casemate en fer laminé. Cette fois, elle est en fonte dure et prévue pour résister au canon de siège. Dix exemplaires de cette casemate sont installés et équipés avec un canon de 155 mm long modèle 1877.

Mougin propose également une tourelle tournante en fonte dure pour 2 canons de 155 mm long modèle 1877. Ce cuirassement fort novateur pour l’époque est construit à 25 exemplaires. Malheureusement, la fonte dure montre ses limites avec la crise de l’obus torpille. On tenta de moderniser certaines de ces tourelles mais la plupart restèrent dans leur état d’origine bien que complètement dépassées.

Ces cuirassements furent trop faibles pour protéger efficacement les pièces — et les artilleurs — des nouvelles menaces. On abandonna la fonte dure en 1882.

L’apparition de l’acier

À partir de 1885, on commence sérieusement à reprendre le problème du cuirassement. Au cours de cette reprise, divers prototypes de cuirassement (essentiellement des tourelles) voient le jour et sont testés très durement pour trouver un successeur à la tourelle Mougin en fonte dure. L’acier spécial (mis au point dans ces années là par Schneider et cie) est, cette fois-ci, largement employé. Parmi tous les prototypes proposés, on peut noter la tourelle tournante pour 2 canons de 155 mm long du commandant Mougin (une évolution de sa précédente tourelle) et une tourelle à éclipse du lieutenant-colonel Bussière pour 2 tubes de 155 mm long. La différence fondamentale dans ces deux tourelles réside dans le principe de protection des embrasures des cuirassements. Pour les tourelles tournantes de Mougin, seule la rotation permanente de la tourelle permet de protéger ses embrasures. Dans le cas des tourelles à éclipse, la tourelle s’efface pour ne laisser à la surface du fort que sa calotte fortement blindée. Ce système montre sa supériorité lors des essais menés au camp de Châlons entre 1887 et 1888.

Mais la tourelle qui est finalement retenue est la tourelle modèle 1890 pour deux 155 mm long conçue par le capitaine Galopin. Cette tourelle, techniquement très complexe, se montra d’une redoutable efficacité. On en installa seulement cinq en raison du coût de fabrication très élevé.

Cependant, les prototypes des tourelles développées pour les différents essais furent conservés et installés dans différents forts du Système Séré de Rivières.

En raison du coût de la tourelle Galopin bi-tube, Galopin développa une version plus petite et, surtout, moins chère de sa tourelle. Elle est adoptée en 1907. On construira aussi des tourelles Galopin avec un seul canon de 155 mm raccourci. Il était prévu d’en installer vingt-deux mais, en 1914, seuls douze exemplaires étaient prêts au combat, notamment au fort de Douaumont. Efficace, cette tourelle à éclipse de 37 tonnes (qui monte pour tirer et redescend aussitôt) se révéla le meilleur cuirassement de son époque, mais de sérieux problèmes de ventilation alliés au bruit à l'intérieur (la résonance était infernale), en freinaient considérablement la cadence de tir.

Les cuirassements légers

Observatoire de commandement de la batterie cuirassée à proximité du réduit (fort de Villey-le-Sec).

À côté des cuirassements que l’on peut considérer comme lourds, on peut également trouver toute une série de cuirassements plus légers destinés à l’observation ou la protection d’armes d’infanterie ou plus lourdes.

En effet, il est décidé de mettre à l’abri aussi bien les observateurs que les moyens de défense rapprochée des forts et de flanquement. Parmi tous ces cuirassements, on retrouve toute une série de guérites et de cloches blindées d’observation ainsi que des projecteurs à éclipse sous tourelle.

Pour les armes d’infanterie, on peut citer la tourelle à éclipse de 57 mm conçu en 1890 par le lieutenant-colonel Bussière et équipée de deux canons de 57 mm. Seul quatre exemplaires sont construits et installés : deux au fort de Manonviller, une à l’ouvrage de Bouvron et la dernière à l’ouvrage Est du Vieux-Canton près de Toul. Cette dernière est d’ailleurs transformée pour recevoir deux canons de 75 mm.

La tourelle de mitrailleuses modèle 1899 est initialement prévue pour recevoir une mitrailleuse Gatling à sept canons rotatifs, remplacée par deux mitrailleuses Hotchkiss. Cent un exemplaires de cette petite tourelle sont installés. Le prototype de tourelle Gatling termina au fort de Manonviller.

La tourelle de 75 mm R modèle 1905, équipée du célèbre canon de 75 mm en version raccourcie, est construite à 73 exemplaires dont seulement 55 sont installés en 1914 ; elle continue sa carrière au sein de la Ligne Maginot.

On peut également citer les casemates Pamard, du nom de leur inventeur. Ce sont de petits cuirassements fixes pouvant recevoir une ou deux mitrailleuses. Ces casemates sont installées en 1916 principalement dans les forts de Verdun.

Les batteries casematées

Dès les premiers travaux, on essaya d’installer des pièces d’artillerie (essentiellement des mortiers) sous des casemates maçonnées. Malheureusement, dans beaucoup de cas, la maçonnerie ne résista pas au souffle des tirs et l’idée est abandonnée jusqu'à l’apparition des casemates de Bourges.

Ces casemates bétonnées doivent leur nom au lieu d'invention : inventées par le Commandant du Génie Laurent, en 1885, et testées puis adoptées à Bourges en 1899, elles contiennent deux canons de 75 mm. Ces casemates bétonnées, toutes construites sur un plan similaire, ont pour mission de battre les intervalles entre les différents forts. Elles sont souvent préférées aux tourelles de 75 mm modèle 1905 car d’un coût largement inférieur[1].

Organisation défensive

Fortifications autour de Paris

Le système Séré de Rivières s’appuie sur le concept de places fortes et de rideaux défensifs. Les places fortes, véritables camps retranchés permettent de fournir des points importants de résistance autour des principales villes. Elles ont également le rôle de points d’appui pour mener d’éventuelles contre-attaques. Entre ces places, on retrouve parfois un rideau défensif (ligne de plusieurs forts distants chacun de quelques kilomètres) permettant de défendre le passage entre deux places. Ces rideaux ne sont pas continus. En effet, on ménage volontairement des trouées pour "canaliser" les percées ennemies. Ces trouées débouchent toutes sur des places fortes de seconde ligne destinées à fixer l’avancée ennemie pendant que les troupes manœuvrent sur les flancs de ces armées pour pouvoir les prendre à revers.

On peut citer, par exemple, la trouée de Charmes située dans les Vosges. Cette trouée ménagée entre les places de Toul et d’Épinal devait contraindre l’ennemi à déboucher sur la place puissamment défendue de Langres. En plus de ces dispositifs, une série d’obstacles, en réalité de puissant forts isolés, sont disséminés sur la route de l’envahisseur afin de ralentir sa progression permettant d’obtenir des délais suffisants à la mise en place des armées chargées de le combattre.

Anatomie d’une place

La voie ferrée près du fort de Villey-le-Sec.

Une place forte est constituée d’une couronne de forts entourant, à une dizaine de kilomètres du centre, toute la ville. Ces forts ont la capacité de se défendre mutuellement. Chaque fort peut ainsi tirer vers son voisin pour l’aider à se dégager d’une avancée de l’infanterie. En plus des principaux forts, il existe toute une série d’installations destinées à servir aux troupes d’intervalles.

On retrouve ainsi des réduits défensifs (ou ouvrage d’infanterie) destinés à recevoir de l’infanterie, des abris de combats permettant aux troupes d’intervalles de s’abriter pendant les bombardements et servant également de casernement, des batteries intermédiaires destinées à recevoir de l’artillerie supplémentaire (prévues dès l’origine) ou en remplacement de l’artillerie des forts (en 1915, on avait décidé de désarmer en partie les forts Séré de Rivières que l’on jugeait trop « concentrés » et donc facile à atteindre).

En arrière de la ligne de forts, on retrouve toute une série de bâtiments destinés au soutien logistique. Ainsi au centre des places on trouve les magasins centraux de vivres, de matériels et de munitions. Ces magasins permettent de ravitailler les forts et la ligne de front. Ce ravitaillement s’effectue au moyen d’un vaste réseau de chemin de fer militaire à voie de 60 cm (le système Péchot adopté par l’artillerie en 1888 est d’ailleurs développé sur la place de Toul) propre à chaque place. Le long de ces « lignes de chemins de fer », on retrouve des dépôts intermédiaires de munitions destinés aux troupes d’intervalles.

Les forts Séré de Rivières

Entrée de la batterie de Sanchey proche d’Épinal

On peut décrire trois types de fort différents : les forts d’arrêt, les forts de rideau (ou de liaison) et les forts de place (ou de ceinture). En plus de cela, on peut différencier les forts ayant été modernisés et ceux restés dans leur état d’origine.

Le fort d’arrêt est par définition isolé du reste du système. Il doit donc être capable de fonctionner en autonomie totale et être capable d’assurer sa défense. Souvent de grande dimension, ce fort peut tirer dans toutes les directions. Il est destiné à protéger les trouées (de Charmes, de Stenay notamment), barrer les voies de communications et à ralentir l'avancée des troupes ennemies, le temps nécessaire à la mise en place d'une nouvelle ligne de défense. Neuf forts de ce type ont été construits dans l'Est et deux dans le Sud-Est (de la France).

Les forts de rideau et les forts de place peuvent, quant à eux, compter sur l’aide de leurs voisins et ne doivent se défendre en général que sur un seul front. C’est pourquoi leur artillerie était concentrée sur les directions occupées par leurs voisins et sur la zone qu'ils étaient censés contrôler.

Les forts de rideau sont des ouvrages isolés entrant dans la constitution de rideaux défensifs tandis que les forts de place permettent de protéger une place fortifiée.

On peut également différencier ces forts en 3 autres types suivant leur disposition géographique :

Un grand fort coûte entre 2 et 2,5 millions de francs or, un fort secondaire, environ 1,5 million de francs or.

Les forts de 1re génération

Ces forts, non modernisés, sont réalisés presque totalement en maçonnerie, utilisant dans de grandes proportions la pierre de taille. Ces forts sont entourés d’un fossé, d’une profondeur 6 m pour 12 m de large, suivant les instructions qui sont peu respectées, délimité par un mur d’escarpe (retenant le massif du fort) et, vers l’extérieur du fort, par un mur de contre-escarpe. Dans les forts Séré de Rivières construits, il est très rare de trouver des fossés en eaux. Certains murs d’escarpe sont munis de créneaux permettant la défense du fossé. Cette défense est à la charge d’organes de flanquement appelés caponnières et construits aux saillants des forts (angles des forts) au niveau du fond du fossé. Ces caponnières étaient soit simples (une seule direction de tir), soit doubles (défendant deux portions du fossé), soit triples (défendant trois portions du fossé). Il faut toutefois noter sur le fort des Basses Perches de Belfort la présence de coffres de contrescarpe au lieu des caponnières.

L'entrée de la Batterie de Bouviers à Guyancourt dans les Yvelines

L’entrée dans le fort se fait généralement par un pont escamotable : pont-levis ou pont à effacement. À ce sujet on peut noter que les ingénieurs de l’époque ont fait preuve d’une réelle imagination pour mettre au point autant de systèmes différents.

À l’intérieur du périmètre du fort, on retrouve une ou plusieurs casernes (parfois à plusieurs étages) dont les façades débouchent sur des cours intérieures. Dans ces casernes, semi-enterrées (seule la façade apparait), destinées au logement de la troupe, on retrouve une cuisine, des citernes pour l’eau potable (alimentées par la récupération des eaux de pluie, des captages de sources ou par des puits) et parfois des fours à pains.

Autre lieu important d’un fort, le magasin à poudre centralise le stockage des différents explosifs et artifices du fort. Cette pièce fermée par deux portes à trois serrures différentes était construite de façon à isoler du mieux possible la poudre de l’humidité et des flammes. Recouvert d’une forte épaisseur de terre, ce magasin était éclairé par un système de lampes à pétrole isolées de la poudre par des vitres blindées de forte épaisseur et accessibles uniquement de l’extérieur du magasin à poudre.

L’artillerie des forts est disposée le plus souvent à l’air libre sur des plateformes de tir encadrées par des traverses-abri (appelées également abri-traverse, abri-sous-traverse). Ces traverses-abri sont des petits locaux destinés au stockage du matériel nécessaire aux pièces et pour les obus prêts à l’emploi. Les plateformes de tir peuvent se retrouver soit sur la caserne (fort à cavalier), dans ce cas, certaines traverses sont enracinées et communiquent directement avec la caserne, soit le long d’un chemin parcourant tout le périmètre du fort (appelé rue du rempart).

Dans certain cas, l’artillerie peut être sous casemates maçonnées ou blindées (casemates Mougin) voire, pour certains forts, sous tourelles (tourelle Mougin).

L’infanterie est, quant à elle, composée uniquement de la troupe du fort, et peut prendre place dans des positions d’infanterie spécialement aménagées en surplomb du fossé.

Jusqu'en 1882[2], la plupart des forts communiquaient entre eux par poste optique (avec un système d'héliostat-héliographe).

La modernisation des forts

La crise de l'obus torpille est le nom donné aux conséquences de la découverte de nouveaux explosifs[3], notamment la mélinite. Avec l'arrivée de ces nouveaux explosifs, l'armée réalisa des tests de résistance sur le fort de Malmaison. Résultat : quasiment toutes les maçonneries du fort sont démolies.

En conséquence, certains forts, ceux qui sont jugés les plus importants, sont modernisés. La problématique est simple : protéger au maximum les hommes et les armes. Comme la majorité des forts sont déjà construits, on prit le parti de seulement les modifier sans pour autant les raser complètement.

Ainsi les casernes maçonnées reçoivent une carapace de béton supplémentaire pour les mettre à l’abri des nouveaux moyens de destruction. Dans certain cas, on reconstruit de nouvelles casernes entièrement en béton tout en conservant les anciennes en maçonnerie.

Les magasins à poudre ont montré leur fragilité et leurs points faibles durant les essais effectués, entre autres, au fort de la Malmaison. On décide donc de supprimer ces magasins en répartissant au mieux le stock de poudre dans tout le fort et surtout en créant de nouveaux magasins profondément enfouis pour les mettre à l’abri des obus les plus destructeurs. On creuse ainsi de nouveaux magasins à poudre appelés magasins sous roc ou magasins caverne.

Les caponnières jugées trop fragiles sont également supprimées au profit de coffres de contre-escarpe. Moins saillants que les caponnières, ces coffres sont « encastrés » dans le mur de contre-escarpe et le plus souvent reliés au fort via une gaine souterraine passant sous le fossé.

Dans certains forts, on crée même de nouvelles entrées mieux protégées des tirs et situées au fond des fossés du fort (appelées aussi entrées de guerre).

Pour l’armement, on voit l’apparition massive des cuirassements et des casemates de Bourges. En effet les pièces d’artillerie quittent les remparts et les cavaliers des forts pour se protéger sous l’épais blindage des cuirassements. Bien que perdant en nombre de pièces, les forts conservent toute leur puissance de feu : une pièce sous tourelle équivaut à elle seule à une batterie entière, c’est-à-dire 4 pièces à l’air libre. L’infanterie de ces forts est également renforcée par des tourelles à éclipse pour mitrailleuses et par des projecteurs blindés sous tourelles. Les observatoires des forts prennent place dans des cloches blindées.

On peut également noter l’apparition, dans tous les forts de grande importance qui sont modernisés, d’une centrale de production d’électricité.

Les forts d’après 1885

Ces forts construits tout en béton doivent prendre en compte également les réductions du budget alloué aux fortifications. On réduit au minimum les maçonneries (plus de mur d’escarpe en maçonnerie mais simplement en terre croulante barrée par une grille en fond de fossé). Ces forts sont également nettement moins étendus que leurs prédécesseurs.

Après le décret du 21 janvier 1887 pris par le général Boulanger, alors ministre de la guerre, les bâtiments militaires sont rebaptisés du nom d'une gloire, si possible militaire et locale. Ainsi, les forts prennent de nouveaux noms. Localement, ces « nouveaux » noms ne s'imposeront pas vraiment parmi la population. Mais en octobre, le général Ferron, successeur de Boulanger, abrogea ce décret et les forts reprirent leur nom d'origine.

Ultimes travaux durant les combats

Lors de la Première Guerre mondiale, notamment à l'occasion des batailles autour de Verdun, dans lesquelles les forts Séré de Rivières prennent souvent part, sous un déluge de feu, les troupes craignant pour la résistance du béton commencent à s’enterrer. Ces troupes creusent durant la bataille de profonds et vastes réseaux de galeries sous les forts pour relier les différents organes des forts mais également pour s’en servir comme casernement. Elles en profitent pour créer de nouveaux accès au fort, plus en arrière et moins exposés, et également pour ajouter des blocs de combats (avec des blindages légers (casemates Pamard) pour mitrailleuses, casemate de tourelle de 155R notamment). Ces travaux appelés travaux de 17 (car réalisés pour la plupart en 1917)[4] préfigurent en fait l’amorce de l’évolution des fortifications vers le tout souterrain que l’on retrouve en 1930 avec la ligne Maginot.

Voir aussi

Dossier photographique

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Articles connexes

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Liens externes

Bibliographie

  • Philippe Truttmann, La Barrière de Fer, Gérard Klopp, Luxembourg, 2000.
  • Guy Le Hallé, Le système Séré de Rivières ou le témoignage des pierres, Ysec Éditions, Louviers, 2001 (ISBN 2-84673-008-3)
  • Philippe Bestetti et Alain Hohnadel La Bataille des forts, éditions Heimdal, Bayeux, 1995 (ISBN 2840480875)
  • H. Plessix et É. Legrand-Girarde, Manuel complet de fortification : rédigé conformément au programme d'admission à l'Ecole supérieure de guerre (4e édition refondue) à consulter / télécharger d'ici

Notes, sources et références