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Vidéographe

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Vidéographe

Vidéographe est un centre d'artistes autogéré fondé en 1971 à Montréal, Canada.

Historique

Années 1970

Fichier:Robert Forget.png
Robert Forget devant le Vidéothéâtre, 1971.

Vidéographe est un des premiers centres dédiés à la création vidéo en Amérique du Nord[1]. C'est d'abord un projet pilote de l'Office nationale du film du Canada (ONF), conçu et dirigé par le producteur Robert Forget[2]. Vidéographe s'inscrit dans la lignée du Groupe de recherches sociales de l'ONF, et du projet Société nouvelle/Challenge for Change qui promeuvent la pratique d'un cinéma engagé et participatif[3]. Vidéographe est créé dans le but de donner accès au plus grand nombre aux outils de création et de diffusion vidéo. Vidéographe a pignon sur rue au 1604 Saint-Denis[4]. Il offre du matériel de tournage, du soutien à la production, un espace de diffusion permanent, le Vidéothéatre[5], et des espaces de travail, notamment pour le montage[6]. L'équipe technique de Vidéographe développe aussi l'éditomètre, l'un des premiers systèmes de montage pour la vidéo 1/2 pouce[7]. De jeunes artistes et cinéastes - Pierre Falardeau, Tahani Rached, Diane Poitras, Jean-Pierre Boyer, Charles Binamé - mais aussi des militants, des activistes, des étudiants et des curieux produisent quelques 200 bandes en tout genre.

En avril 1973, l'ONF se retire du projet[8]; Vidéographe deviendra un centre d'artistes autogéré axé sur la production, la diffusion et la distribution de la vidéo indépendante. L'organisme à but non lucratif est enregistré le 9 avril 1973 par Robert Forget, Michel Cartier, Jean-Paul Lafrance, Louis Martin et Robert Russel[9]. Vidéographe lance en 1973 un projet de télévision communautaire, TVC-4, à Saint-Jérôme[10]. La chaîne, active jusqu'en 1989, est gérée par les participants; le fonds d'archives est conservé à la Société d’histoire de la Rivière-du-Nord[11]. Le Sonographe, pendant de Vidéographe pour la musique, est aussi fondé; il met à disposition des créateurs un studio d'enregistrement et du matériel de son portatif. Le fonds d'archives est conservé par la Sonothèque québécoise, puis par le laboratoire de création et de recherche La création sonore (Université de Montréal). Plusieurs années de crise financière[12] entraînent une fermeture temporaire de Vidéographe de mai 1976 à janvier 1977[13].

Années 1980

Au début des années 1980, l'organisme déménage au 4550 rue Garnier, sur le Plateau Mont-Royal, où il est toujours situé aujourd'hui. La production s'oriente vers la coopération internationale, notamment avec le travail d'Yves Langlois, et les productions syndicales telles que la fiction Joe de Norman Thibault qui met en vedette des acteurs connus dont Marcel Sabourin, Hubert Loiselle et Louisette Dusseault. L'art vidéo prend aussi de plus en plus de place au fil de la décennie[13]. De nombreux jeunes artistes font leurs premières armes : Chantal duPont, Jeanne Crépeau, Marc Paradis, Luc Bourdon, Daniel Dion, Suzan Vachon, Charles Guilbert, et Serge Murphy, entre autres. [7].

À l'automne 1984, Vidéographe coproduit Vidéo 84 - Rencontres vidéo internationales de Montréal qui réunit des intervenants venus de 11 pays et propose colloque, projections et expositions[14]. Suivra en octobre 1989 La Quinzaine de la vidéo, qui accueille entre autres le cinéaste polonais Jozef Robakowski[15].

Années 1990

Du 6 décembre 1990 au 20 janvier 1991, Vidéographe est le sujet d'une exposition au Musée des beaux-arts du Canada intitulée Un animal sauvage : Traversées du discours et mémoires volées : Les dix premières années du Vidéographe, 1971-1981[16]. Y figurent, entre autres, des vidéos de Robert Morin et Lorraine Dufour, Pierre Falardeau et Julien Poulin, Jean-Pierre Boyer, Hélène Roy, et Frank Vitale.

Vidéographe entreprend aussi un chantier de catalogage de sa production et de ses archives de fonctionnement. Un service de gestion des archives est créé. Des catalogues sont publiés en 1989, 1994 et 1997. En 2000, le fonds Vidéographe est donné à la Cinémathèque québécoise; il regroupe 57 boîtes de documents datant de 1970 à 1999[17]. En mai 1998, Vidéographe ouvre l'Espace Vidéographe un lieu d'expositions d'abord situé au 460, rue Sainte-Catherine Ouest[18], puis nomade[1]. Les années 1990 sont aussi marquées par l'émergence d'une nouvelle génération d'artistes féminines : Sylvie Laliberté, Manon Labrecque, Nathalie Bujold, Monique Moumblow. En 1998, une deuxième édition de La Quinzaine de la vidéo marque les 25 ans de Vidéographe en proposant 25 programmes d'art vidéo[19].

Années 2000

Dans les années 2000, Vidéographe publie une série de monographies et de coffrets DVD dédiés à des vidéastes canadiens : Sylvie Laliberté, Robert Morin[20], Donigan Cumming[21], Pierre Falardeau et Julien Poulin, Charles Guilbert et Serge Murphy, Istvan Kantor. En mai 2010, Vidéographe dévoile Vithèque, un site web de visionnement sur demande "fait pour accueillir tous les catalogues des indépendants"[22]. Le site existe toujours comme vitrine de la collection de Vidéographe. En 2015, l'organisme annonce qu'il recentre son mandat sur "les formes expérimentales de l'image en mouvement". Le soutien à la création est aussi repensé alors que l'organisme se défait de son parc d'équipement de tournage. Vidéographe s'intéresse aussi à l'installation vidéo et présente par exemple Sheri Pranteau: Undisappeared du Groupe Épopée au Musée d'art de Joliette en 2018[23].

Le 2 juin 2019, un film distribué par Vidéographe, Innu Nikamu : chanter la résistance du jeune réalisateur innu Kevin Bacon Hervieux remporte le prix Iris du meilleur long métrage documentaire au Gala Québec Cinéma[24]. Le film porte sur le festival de musique Innu Nikamu et l'histoire de la communauté autochtone de Manawan.

Contexte

La vidéo trouvera un terreau fertile au Québec, sans doute en raison de l'importance du documentaire et du cinéma direct dans les années 1960 et 1970. La proximité, la malléabilité technique, et la rapidité de diffusion rendent le média attrayant dans un contexte politique volatil. Suite à la Révolution tranquille, le Québec connaît en effet des changements sociaux, culturels et religieux rapides. La production de Vidéographe témoigne de la mobilisation politique et citoyenne de l'époque : répercussions de la Crise d'Octobre, affirmation LGBTQ2S+, projets de quartier, etc.[27]

Plusieurs groupes vidéo voient le jour dans les années 1970, dans la foulée de Vidéographe[7] : Vidéo Femmes en 1973 (fusionné avec SPIRA en 2015), le Groupe Intervention Vidéo (GIV) en 1975, Vidéo Véhicule en 1975, qui deviendra PRIM-Productions Réalisations Indépendantes de Montréal en 1981, le Centre populaire d'animation audiovisuelle de Québec en 1977, devenu la Bande vidéo en 1988, et la Coop Vidéo en 1977. Tous ces organismes ont des mandats semblables de production et de diffusion de vidéo, bien qu'ils se distinguent par leur positionnement idéologique ou leur utilisation du médium. Vidéo Femmes puis le Groupe Intervention Vidéo prennent une position résolument féministe. Vidéo Véhicule, né de la galerie Véhicule Art, vise d'abord l'expérimentation de la vidéo par des artistes. La pratique se professionnalise à la fin des années 1970, en raison des efforts d'autogestion des artistes et du soutien financier des créateurs et des organismes par le Conseil des Arts du Canada et le Conseil des Arts et lettres du Québec.

Artistes

Les artistes suivants sont distribués par Vidéographe[28] :

Robin Aubert

André-Line Beauparlant

Luc Bourdon

Denis Chouinard

Donigan Cumming

Jean-Pierre Boyer

Nathalie Bujold

Jeanne Crépeau

Mireille Dansereau

Daniel Dion

Chantal duPont

Rachel Echenberg

Anne Émond

Pierre Falardeau

Charles Guilbert

Pierre Hébert

Co Hoedeman

Bettina Hoffmann

marshalore

Mike Hoolboom

Istvan Kantor

Manon Labrecque

Sylvie Laliberté

Emmanuelle Léonard

Pascal Lièvre

Neal Livingston

François Miron

Robert Morin

Serge Murphy

Marc Paradis

Marie-Josée Saint-Pierre

Jayce Salloum

Suzan Vachon

Michèle Waquant

Steven Woloshen

Liens externes

Vidéographe

Vithèque

Sources :

  1. a et b Angela Plohman, « Vidéographe », sur http://www.fondation-langlois.org, (consulté le )
  2. Luc Bourdon, « Vidéographie 70 », 24 images,‎ décembre 2013-janvier 2014, p. 10-15 (lire en ligne)
  3. Gérard Henry et Yves Chaput, Québec 75 : vidéo, Montréal, Institut d'art contemporain, , « Deuxième année Société nouvelle : Le Vidéographe », non paginé
  4. Luc Bourdon, « Vidéographie 70 », 24 images,‎ décembre 2013-janvier 2014, p. 11 (lire en ligne)
  5. Daniel Carrière, « Petite histoire du vidéothéâtre », Ciné-Bulles,‎ , p. 44-45 (lire en ligne)
  6. « Sélectovision / Éditomètre / Entrée en scène », sur Vithèque, (consulté le )
  7. a b et c Daniel Carrière, « Portrait de groupes », Ciné-Bulles, vol. 11, no 1,‎ , p. 16-21 (lire en ligne)
  8. (en) « Protocols between Videographe and the National Film Board of Canada », sur Vithèque, (consulté le )
  9. « Lettres patentes », sur Vithèque, (consulté le )
  10. « Notes historiques sur TVC-4 », sur Cinémathèque québécoise (consulté le )
  11. Société d’histoire de la Rivière-du-Nord, « P032 - Fonds TVC4 », sur Société d’histoire de la Rivière-du-Nord (consulté le )
  12. Serge Dussault, « Le vidéo : malgré tout l'espoir », La Presse,‎ , p. D9 (lire en ligne)
  13. a et b Monique Langlois, « Les 25 ans de Vidéographe », Ciné-Bulles,‎ , p. 28 (lire en ligne)
  14. René Blouin, « Vidéo 84 / Rencontres Vidéo Internationales de Montréal Du 24septembre au 4 octobre 1984 (compte rendu) », Vie des arts,‎ volume 29, numéro 118, mars-printemp, p. 24-27 (lire en ligne)
  15. Manon Regimbald, « La Quinzaine de la vidéo (compte rendu) », ETC,‎ numéro 11, printemps-été 1990, p. 59-61
  16. Claude Forget, Un animal sauvage : Traversées du discours et mémoires volées : Les dix premières années du Vidéographe, 1971-1981 / Video Untamed : Passages and Stolen Memories : The First Ten Years of Videographe, 1971-1981. (Catalogue), Ottawa, Musée des beaux-arts du Canada / National Gallery of Canada, , 10 p.
  17. Jean Gagnon, « Traitement et catalogage du fonds Vidéographe », sur Cinémathèque québécoise, (consulté le )
  18. Véronique Bellemare Brière, « L’Espace Vidéographe est né ! », Séquences,‎ , p. 60 (lire en ligne)
  19. Éric Fourlanty, « La Quinzaine de la vidéo : Si loin, si proche », Voir,‎ (lire en ligne)
  20. Charles-Stéphane Roy, « Moments donnés - Robert Morin : entrevue(s), Jean-Pierre Boyer, Fabrice Montal et Georges Privet Montréal : Vidéographe Éditions, 2002, 171 pages (compte rendu) », 24 images,‎ numéro 222, novembre-décembre 2002, p. 9 (lire en ligne)
  21. Vincent Bonin, « Controlled Disturbance, Donigan Cumming, Montréal, Vidéographe, coffret DVD, 2005 (compte rendu) », Ciel variable,‎ numéro 71, mars 2006, p. 40 (lire en ligne)
  22. Frédérique Doyon, « V pour vitrine vidéo », Le Devoir,‎ (lire en ligne)
  23. Aseman Sabet, « Groupe Épopée, Sheri Pranteau: Undisappeared (compte rendu) », Espace,‎ numéro 122, printemps 2019, p. 87-88 (lire en ligne)
  24. Jean-Louis Bordeleau, « Innu Nikamu : chanter la résistance sacré meilleur documentaire québécois », sur Radio-Canada, (consulté le )
  25. Aseman Sabet, « Groupe Épopée, Sheri Pranteau: Undisappeared », Espace,‎ numéro 122, printemps 2019, p. 87-88
  26. Nicolas Mavrikakis, « «Réseaux magnétiques»: images de groupe chez Artexte », Le Devoir,‎ (lire en ligne)
  27. Marie-Michèle Cron, « Les archives vidéo du Vidéographe : la mémoire audiovisuelle des années 1970 au Québec », La Revue de la Cinémathèque, no 53,‎ , p. 16, 35
  28. « Index des artistes », sur Vithèque (consulté le )