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Henri Rollin (militaire)

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Henri Louis-Victor-Mars Rollin (ou Henry) (né le 11 septembre 1885 à Saint-Malo, décédé en avril 1955),[1] officier de marine, spécialiste du renseignement, essayiste et historien français.

Militant contre l'antisémitisme, il fut le premier en France à mettre en évidence la caractère fallacieux du Protocole des sages de Sion.

En 1941-42, il fut l'homme de confiance de l'Amiral Darlan, alors chef du gouvernement de Vichy, qui en fit le patron de la Surveillance du Territoire[N 1].

Biographie

Belle époque

Entré dans la marine française en 1903, Rollin est promu aspirant de 2e classe (1906). À la division d'Extrême-Orient sur le Chanzy, il est cité à l'ordre du jour par l'amiral Louis Jaurès. Enseigne de vaisseau de 1re classe (1908), il embarque successivement sur trois cuirassés, le Cassard, le Jauréguiberry et le Condorcet à bord duquel il rédige L'évolution du droit des gens sur la mer[2].

Première guerre mondiale

En 1914, Rollin est officier canonnier du Diderot. En 1916, muté à l'état-major de la division de l'Adriatique, à Brindisi, il prend part à plusieurs expéditions sous-marines. Entré aux Services de renseignements de la marine, il devient chef de l'antenne de Constantinople (1917). Pacha[N 2] d'un chalutier armé, l'aviso auxiliaire Paris II coulé par une batterie terrestre turque, Rollin lieutenant de vaisseau est blessé et fait prisonnier de guerre, le 13 décembre 1917[2].

Entre deux guerres

En 1919, Rollin épouse Hélène Cogan, juive russe rencontrée à Constantinople. Réserviste de la Royale, il est ingénieur-conseil auprès de plusieurs sociétés industrielles, mais aussi journaliste, rédacteur général et correspondant du journal Le Temps (1925-1939) à Moscou où il recrute et traite plusieurs agents[3],[4].

Au début des années 1930, Rollin publie un essai historique sur la Révolution bolchévique, mais son nom reste surtout attaché à son étude du célèbre faux antisémite Les Protocoles des Sages de Sion intitulée L'Apocalypse de notre temps (1939). Resté dans l’ombre en raison des circonstances, ce livre est très tôt saisi et interdit par l’occupant nazi. Rollin y mettait en doute l’authenticité du document et faisait la lumière sur les plagiats à un ouvrage de Maurice Joly, Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu qui émaillent une bonne partie du texte[5]. L’étude de Rollin a été maintes fois rééditée et complétée par les travaux de spécialistes des Protocoles comme Norman Cohn et Pierre-André Taguieff.

Seconde guerre mondiale

En 1939, Rollin mobilisé devient chef du 2e bureau du centre de renseignements maritimes du Havre. Le 18 juin 1940, il est à Londres. Un mois plus tard, il rentre au pays, sur l'avis de ses contacts au MI6. Avec le capitaine de vaisseau Marc Sanson, chef du 2e bureau Marine[N 3], Rollin fonde à Alger un "service de statistiques et de documentation (SSD)". En 1941, il est chargé de mission au cabinet de Darlan. Préfet de 3e classe hors-cadre, il est, l'année suivante, promu préfet de 1re classe, directeur adjoint du secrétariat général de la police[2].

À la Surveillance du Territoire, police chargée en zone libre du contre-espionnage, sous l'autorité des régions militaires, Rollin est l'homme de Darlan qui se méfie des services spéciaux de l'armée de terre. Avec Pierre Mondanel, inspecteur général de la police judiciaire, il fonde une "section spéciale" qui chapeaute les différentes antennes de la ST. En septembre 1941, Darlan et Pucheu restituent à la police nationale les missions de contre-espionnage, la ST est légalement affranchie des militaires du Bureau des menées antinationales[6].

Début 1942, par l'intermédiaire du commissaire spécial Louis Triffe et de Berty Albrecht, Rollin prend contact avec Henri Frenay et lui propose de rencontrer Darlan. L'amiral étant indisponible, Frenay rencontre à deux reprises Pierre Pucheu alors ministre de l'intérieur[7].

Le 25 février 1943, un avion des services britanniques transporte Rollin au Royaume-Uni où, protégé par ses amis du MI6, il restera après la Libération. Il ne rentre à Paris, discrètement, que quelque temps avant sa mort[8].

Distinctions

Publications

  • Marine de guerre et défense nationale, préface de M. le vice-amiral Besson, Paris, E. Guilmoto, coll. « Bibliothèque des amis de la marine », [1911].
  • L'Évolution du droit des gens sur mer. La contrebande de guerre d'après la Déclaration de Londres, Paris-Nancy, M. Imhaus et R. Chapelot, [1914] (Extrait de la Revue maritime).
  • La Révolution : ses origines, ses résultats, préface d'André Duboscq, 2 t., Paris, Delagrave, coll. « Bibliothèque d'histoire et de politique », 1931. (I. Les Soviets ; II. Le Parti bolchéviste)
  • « Introduction » à J. Lovitch, Tempête sur l'Europe, roman traduit du russe par S. Campaux, Paris, Éditions de la Flèche d'or, 1932.
  • « Préface » à Georges Luciani (Pierre Berland), Six ans à Moscou, Paris, Picart, 1937.
  • L'Apocalypse de notre temps, les dessous de la propagande allemande d'après des documents inédits, Paris, Gallimard, coll. Problèmes et documents, 1939, 571 p. ; Paris, Éditions Allia, 1991. (ISBN 2-904235-32-9) ; Une mystification mondiale, précédé de « Le faux et son usage » par Gérard Berréby, Paris, Éditions Allia, 2000 (Contient les 3 chapitres de L'Apocalypse de notre temps). (ISBN 2-84485-035-9) ; L'apocalypse de notre temps : les dessous de la propagande allemande d'après des documents inédits, précédé de « Le faux et son usage » par Gérard Berréby, Paris, Éditions Allia, 2005. (ISBN 2-84485-197-5)
  • « Polémique autour d'un plagiat » et « Un méconnu, Maurice Joly », en annexe de Maurice Joly, Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu, suivi de « Les Protocoles et les Dialogues » de Norman Cohn, Paris Éditions Allia, 1987. (ISBN 2-904235-08-6)

Bibliographie

  • Norman Cohn, Histoire d'un mythe. La « conspiration » juive et les Protocoles des Sages de Sion, traduction de Léon Poliakov ((en) Warrant for genocide. The myth of the Jewish world-conspiracy and the Protocols of the elders of the Zion, 1967), Paris, Gallimard, 1967 ; rééd. coll. « Folio Histoire », 1992, 302 p. (ISBN 2-07-032692-6)
  • Pierre-André Taguieff, Les Protocoles des Sages de Sion, Paris, Berg International, coll. « Faits et représentations », 1992.
    • Tome I : Introduction à l'étude des « Protocoles » : Un faux et ses usages dans le siècle ; édition revue et augmentée, Paris, Berg International et Fayard, 2004, 408 p. (ISBN 2-213-62148-9)
    • Tome II (dir.) : Études et documents, 816 p. (ISBN 2-911289-57-9)
  • Simon Epstein, Un paradoxe français. Antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Albin Michel, 2008.

Notes

  1. Le directeur en titre de la Surveillance du Territoire était le contrôleur général Castaing.
  2. Le « pacha » est le surnom donné au commandant d'un navire. L'appellation « pacha » est surtout employée dans la marine nationale.
  3. Le 2e bureau Marine du commandant Sanson camoufle son SR sous l'appellation "Section d'études économiques (SEE) de la marine marchande" dont la section "S" est chargée du contre-espionnage.

Références

  1. http://ecole.nav.traditions.free.fr/officiers_rollin_henri.htm
  2. a b et c Préface à Une mystification mondiale, Allia, 2000
  3. D’après la présentation biographique de l’éditeur, Henry Rollin, L'Apocalypse de notre temps : les dessous de la propagande allemande d'après des documents inédits, Paris, Éditions Allia, 1991.
  4. Voir aussi Xavier Pellegrini, « Enquête sur un faux monstrueux », dans Le Temps, livres, samedi 29 octobre 2005.
  5. Voir Norman Cohn, Warrant for genocide. The myth of the Jewish world-conspiracy and the Protocols of the elders of the Zion, London, Serif, 2005, p. XIII.
  6. « Bref historique des services français depuis 1871 », sur AASSDN (consulté le )
  7. Henri Frenay, La nuit finira, Robert Laffont, 1973, p. 153 - 161
  8. Roger Faligot, Jean Guisnel et Rémi Kieffer, Histoire politique des services secrets français, La Découverte, 2012