Littérature grecque antique

littérature qui se développe en Grèce au cours de l'Antiquité

La littérature grecque antique est la littérature qui se développe en Grèce durant l'Antiquité et forme les bases de la littérature grecque ultérieure.

Les livres grecs antiques étaient faits de papyrus. Ici un fragment d'un papyrus d'Oxyrhynchos montrant un passage d'une pièce de Ménandre.

Son histoire commence au début de la période de l'histoire de la Grèce Antique que l'on nomme époque archaïque, au VIIIe siècle av. J.-C., avec la composition et la diffusion orale de l’Iliade et de l’Odyssée[1]. Ces deux épopées majeures, attribuées à Homère, constituent les fondations de la littérature grecque dans toute l'Antiquité. Cette littérature s'enrichit particulièrement lors de l'âge d'or d'Athènes, l'époque classique (Ve – IVe siècle av. J.-C.), où émergent des genres tels que la tragédie grecque, ainsi que la philosophie de Socrate, Platon et Aristote. Les auteurs romains de la littérature latine s'en inspirent ensuite largement.

La littérature grecque antique s'étend jusqu'à la fin de l'Antiquité, selon des bornes chronologiques variables, généralement fixées entre le IVe siècle et le VIe siècle apr. J.-C. en fonction des grands tournants politiques, sociaux et religieux de l'époque[2].

L'influence de la littérature grecque antique perdure jusqu'à aujourd'hui et n'a cessé de marquer la culture et la littérature occidentales (et en particulier la littérature française), qui puisent dans ses thèmes et ses œuvres lors de mouvements comme la Renaissance, l'Humanisme ou le Classicisme.

Époque archaïque

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La littérature grecque débute dans une période de l'histoire de la Grèce Antique appelée époque archaïque (environ de 800 av. J.-C. à 480 av. J.-C.), marquée par de nombreux changements majeurs pour la civilisation grecque antique : apparition de la polis (la cité-État grecque), développement de la colonisation et du commerce, évolution de la vie politique[3]. Cela s'accompagne de mutations culturelles également, avec l'apparition de l'alphabet grec, l'évolution de l'art vers le style orientalisant et le développement de la poésie dans toute la Grèce[3]. La majorité des textes qui nous sont parvenus de cette époque sont des textes poétiques.

Les épopées d'Homère

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Les premières œuvres littéraires grecques connues apparaissent au début de l'époque archaïque, au VIIIe siècle av. J.-C., avec la composition de l'Iliade et de l'Odyssée, deux épopées attribuées à Homère[4]. L'Iliade raconte en 15 000 vers un épisode décisif de la Guerre de Troie, conflit de la mythologie grecque, dans lequel s'illustre le héros Achille face au Troyen Hector[5]. L'Odyssée, longue de 12 000 vers, est un récit de voyage, le retour du héros Ulysse à la suite de la Guerre de Troie et ses aventures avec différents personnages mythologiques dans des contrées inconnues.

Il s'agissait dans les premiers temps d'une littérature orale. En effet, l'étude de ces textes a montré au XXe siècle que ces épopées dérivaient d'un savoir-faire relevant de la poésie orale[6]. Cet héritage d'une longue tradition orale pose le problème de l'attribution du texte à un seul auteur et de son identité : c'est la question homérique.

Ces œuvres seront en tout cas des modèles dans tout le reste de l'Antiquité grecque, la base de l'éducation en Grèce[4] et une inspiration pour les poètes.

La poésie archaïque

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Entre le VIIIe siècle av. J.-C. et le VIIe siècle av. J.-C., deux poèmes sont attribués à Hésiode[7]. La Théogonie est une épopée qui raconte la naissance du monde et des dieux de la mythologie grecque. L'apparition des générations successives de dieux donne lieu au récit de plusieurs épisodes mythiques. Après le Chaos, Gaïa (Terre), Ouranos (Ciel) et Éros (Amour), qui sont à l'origine du monde et le contrôlent, survient la castration d'Ouranos par son fils Cronos (le plus jeune des Titans) qui devient le nouveau souverain du monde ; Cronos qui dévore ses enfants ; puis le conflit entre Cronos et son fils Zeus ; la ruse de Prométhée qui vole le feu et le donne aux hommes mortels ; la création de Pandora, la première femme (présentée comme une vengeance des dieux après la ruse de Prométhée) ; et enfin la guerre entre les Titans et les jeunes dieux, la Titanomachie[7]. Ces derniers, dirigés par Zeus, l'emportent finalement. Le deuxième poème d'Hésiode, Les Travaux et les Jours, est un poème didactique.

Alors que le VIIIe siècle était encore marqué par les épopées, le VIIe siècle, marqué par les guerres et les conflits, voit la poésie aujourd'hui dite « lyrique » se développer : il s'agissait de poèmes, souvent courts, chantés par les poètes et souvent accompagnés à la lyre[8], comme les œuvres de la poétesse Sappho[9]. Divers poèmes de cette époque ont été attribués à tort par les Grecs de l'Antiquité à Homère (par exemple les Hymnes homériques) ou à Hésiode. De plus, divers épopées dont nous n'avons pas conservé les textes traitaient également de légendes héroïques similaires à celles d'Homère : ainsi le Cycle troyen ou le Cycle thébain.

Époque classique

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Au Ve siècle av. J.-C. commence l'époque classique, où se développe la tragédie grecque antique, dont nous n'avons conservé que les pièces de trois auteurs : Eschyle, Sophocle et Euripide. De cette même époque, Aristophane est le seul représentant de l'Ancienne Comédie qui nous soit parvenu. Les Histoires d'Hérodote constituent le premier récit historique, suivies par La guerre du Péloponnèse de Thucydide et les Helléniques et l’Anabase de Xénophon.

Au IVe siècle av. J.-C., la littérature philosophique se développe avec les dialogues de Platon, un élève de Socrate (lequel n'a rien écrit lui-même), et les traités d'Aristote, lui-même élève de Platon. La rhétorique se développe particulièrement dans le cadre de la démocratie athénienne ; Démosthène, Eschine ou Lysias sont certains des grands orateurs.

Époque hellénistique

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En 323 av. J.-C., après les conquêtes d'Alexandre le Grand, les centres culturels du monde grec se déplacent dans les capitales des royaumes hellénistiques, en particulier Alexandrie en Égypte, qui abrite la bibliothèque d'Alexandrie, mais aussi en Asie mineure, notamment à Pergame, et dans les îles grecques. Cela favorise les échanges avec d'autres cultures mais également une intellectualisation, par l'étude et les commentaires, de la littérature déjà existante.[réf. nécessaire]

À Athènes, Ménandre est le seul dramaturge que nous conservons de la Nouvelle Comédie[10]. À Alexandrie, la poésie est représentée dans ses différents genres[5]. Apollonios de Rhodes rédige une longue épopée, une production rare pour cette époque : les Argonautiques, récit du mythe de Jason et de la Toison d'or.

Époque romaine

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Polybe élabore une Histoire romaine qui a pour sujet l'histoire de la ville de Rome et de son expansion.

Vers la littérature grecque médiévale

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Postérité de la littérature grecque antique après l'Antiquité

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Supports matériels et transmission jusqu'à nos jours

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L'alphabet grec, qui dérive de l'alphabet phénicien, se diffuse au tournant des VIIIe et VIIe siècles[11]. L'usage du papyrus comme support de l'écriture et l'emploi de rouleaux de papyrus pour mettre les œuvres littéraires par écrit se diffuse à partir du VIe siècle av. J.-C. Les pratiques littéraires restent très liées à l'oralité jusqu'au Ve siècle av. J.-C. : bien qu'élaborées par écrit, les œuvres sont destinées à être lues, déclamées, chantées, etc. à l'oral[11].

Les premières grandes bibliothèques se développe à partir du IIIe siècle av. J.-C., à l'époque hellénistique, comme la fameuse bibliothèque d'Alexandrie. L'impossibilité de reproduire facilement en de nombreux exemplaires les livres alors recopiés à la main et les nombreuses causes possibles de destruction ou de pertes de livres (voyez notamment Pertes de livres pendant l'Antiquité tardive) ont fait que les œuvres grecques antiques qui nous sont parvenues ne représentent qu'une faible proportion du nombre total qui a pu être composé et diffusé pendant l'Antiquité, peut-être environ un dixième[12]. En outre, aucune œuvre grecque antique ne nous est parvenue dans son texte original : toutes l'ont été par l'intermédiaire d'exemplaires recopiés, en grande partie des manuscrits médiévaux largement postérieurs à l'époque de rédaction initiale de l'œuvre, mais parfois aussi des fragments de papyri plus anciens pouvant remonter jusqu'à l'époque hellénistique[11].

Le rayonnement politique et surtout culturel durable de la civilisation grecque antique, pendant et après l'Antiquité, ainsi que l'enseignement ininterrompu du grec ancien bien après que la langue grecque eut évolué pour aboutir au grec moderne, ont assuré à la littérature grecque antique une très large diffusion, dans la plus grande partie du monde et jusqu'au XXIe siècle. Toutefois, au sein de ce rayonnement d'ensemble, de nombreux auteurs grecs antiques ont connu des postérités inégales et parfois changeantes. Des auteurs comme Homère ou Hésiode et les auteurs athéniens de la période classique, qui avaient accédé au statut de classiques dès l'Antiquité, ont longtemps dominé l'étude de la littérature grecque aux époques postérieures, tandis que d'autres auteurs ont sombré dans l'obscurité ou ont été redécouverts au fil des siècles.

Notes et références

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  1. Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier Cycle », (ISBN 2130482333 et 978-2130482338), p. 1, 11 et 638 ; Romilly (1980), p. 9 et 13.
  2. Selon Jacqueline de Romilly (1980), p. 258–259, la littérature grecque disparaît en même temps que le paganisme grec. Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec (1997 rééd. 2004, p. 1 et 636–637), choisissent pour borne chronologique la fermeture de l'École d'Athènes par l'empereur romain Justinien en , tout en étant conscients des limites de ce choix.
  3. a et b Romilly (1980), p. 38.
  4. a et b Romilly (1980), p. 13.
  5. a et b Humbert et Berguin (1947).
  6. Romilly (1980), p. 17.
  7. a et b Romilly (1980), p. 39.
  8. Monique Trede-Boulmer, Suzanne Saïd, La littérature grecque d'Homère à Aristote, (lire en ligne), chap. 2 (« L'époque archaïque »)
  9. « Littérature Grecque-Chronologie »
  10. Alain Blanchard, « Ménandre poète hellénistique ? », dans Bulletin de l'Association Guillaume Budé (no 2), , p. 91-105
  11. a b et c Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier Cycle », (ISBN 2130482333 et 978-2130482338), p. 5.
  12. Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier Cycle », (ISBN 2130482333 et 978-2130482338), p. 7.

Bibliographie

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Histoires de la littérature grecque

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  • Jacqueline de Romilly, Précis de littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, 1980 (rééd. coll. « Quadrige » : 2002).
  • Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier Cycle », (ISBN 2130482333 et 978-2130482338) (Édition consultée : réédition dans la collection « Quadrige », 2004.)
  • Monique Trédé, Suzanne Saïd, La Littérature grecque d'Homère à Aristote, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », 1990 (édition consultée : rééd. 2001).
  • Jules Humbert et Henri Berguin (préf. Paul Crouzet), Histoire illustrée de la littérature grecque : Précis méthodique, Paris, Didier ; Toulouse, Privat, coll. « Histoires illustrées des littératures » (no 3), , 485 p. (SUDOC 018802052)

Sur des genres ou des époques en particulier

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  • Paul Demont et Anne Lebeau, Introduction au théâtre grec antique, Paris, Librairie générale française (Livre de poche), 1996.
  • Pierre Hadot, Qu'est-ce que la philosophie antique ?, Paris, Gallimard, 1995 (rééd. coll. « Folio »).
  • Jean Sirinelli, Les Enfants d'Alexandre. La littérature et la pensée grecques, 334 av. J.-C. — 529 ap. J.-C., Paris, Fayard, 1993.
  • Laurent Pernot, La Rhétorique dans l'Antiquité, Paris, Le Livre de poche, 2000.
  • Jacqueline de Romilly, La Tragédie grecque, Paris, Presses universitaires de France, 1970.
  • Poètes élégiaques de la Grèce archaïque, Solon - Tyrtée - Théognis - Xénophane et les autres, Traduits et présentés par Yves Gerhard, Ed. de l'Aire, Vevey, 2022 (ISBN 978-2-88956-248-0).

Sur la civilisation grecque en général

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  • Marie-Claire Amouretti, Françoise Ruzé, Le Monde grec antique, Paris, Hachette, coll. « Supérieur », 2003.
  • Jean Leclant (dir.), Dictionnaire de l'Antiquité, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2005 (2e édition 2011).

Articles connexes

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Liens externes

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