Lamine Senghor
Lamine Arfang Senghor, né le à Joal (Sénégal) et mort le à Fréjus (France), est un militant politique sénégalais. Il n'a pas de lien de parenté avec Léopold Sédar Senghor, malgré plusieurs similitudes dans leurs parcours (origine sérère, naissance à Joal, séjour en France)[1].
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(à 38 ans) Fréjus |
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Biographie
modifierIl travaille pour l'entreprise Maurel et Prom à Dakar, avant de partir pour la Première Guerre mondiale comme tirailleur sénégalais. Il participe notamment à la bataille de la Somme, puis à l'offensive meurtrière du Chemin des dames[2] où son bataillon est décimé par le gaz moutarde[3]. Au total, 6000 tirailleurs périssent durant les 3 jours de l'offensive, soit 45% de l'effectif engagé dans la guerre[4].
Grièvement blessé aux poumons lors de la deuxième bataille de Verdun, Lamine Senghor est rapatrié au camp de Fréjus pendant l'hiver 1917, avant de repartir à nouveau au front en 1918. Il est décoré de la Croix de guerre, mais renvoyé avec le 67e bataillon à Fréjus après l'armistice. Il participe alors à une mutinerie pour demander son rapatriement au Sénégal. Il rentre chez lui, avant de repartir en France quelque temps plus tard, après avoir obtenu la nationalité française[2]. Vétéran de l’Armée, il bénéficiera d’une pension d’invalidité avant de décrocher un travail dans le civil, en devenant facteur aux Postes, télégraphes et téléphones (PTT)[5].
Il participe activement aux combats décoloniaux en France, milite au Parti communiste français (PCF)[5]. Il reçoit l'interdiction de rentrer au Sénégal, les autorités coloniales craignant qu'il y diffuse les idées communistes. Il est candidat du PCF aux élections dans le 18e Arrondissement de Paris en 1924[source secondaire souhaitée].
Il fonde le Comité de défense de la race nègre en 1926 et sillonne la France pour recruter de nouveaux adhérents. Il arrive ainsi à Marseille le 4 septembre où il restera deux semaines, sous haute surveillance des autorités coloniales[6].
Souffrant de tuberculose et de séquelles du gaz toxique inhalé pendant la guerre[source secondaire souhaitée], il quitte la capitale pour s'installer à Roquebrune-sur-Argens, dans le Var.
En , Lamine Senghor participe au Congrès constitutif de la « Ligue contre l’impérialisme et l’oppression coloniale », organisé à Bruxelles par Willi Munzenberg, l'un des responsables de l’Internationale communiste. Il y siège aux côtés de J. T. Gumede (ANC/Afrique du Sud), Jawaharlal Nehru (Congrès Pan-indien), de Song Qingling (veuve du nationaliste chinois Sun Yat Sen), de Hafiz Ramadan Bey (Égypte), de Mohammad Hatta (Indonésie), Messali Hadj (Algérie) et de personnalités telles que Henri Barbusse ou Albert Einstein[6]. Lamine Senghor y prononce un discours fort remarqué où il dénonce les tortures de la colonisation qu'il lie au capitalisme[7]. C'est un triomphe et il est la révélation du congrès. Son discours est traduit en anglais.Il est arrêté quelques jours plus tard et emprisonné quelques semaines à Draguignan.
Il fonde la Ligue de défense de la race nègre en mai 1927.
Dans la foulée, Lamine Senghor écrit La violation d'un pays, un récit pamphlétaire qu'il illustre lui-même et qui se termine par "une alliance fraternelle des pays libres" entre indigènes et blancs pauvres[6].
Sa santé continue de se dégrader jusqu'à sa mort, le , à l'âge de 38 ans.
''Notre beauté dérangeante, notre regard calme, sont des armes puissantes qui perturbent le sommeil du maître, transforment ses rêves de domination en cauchemars d'insurrection. Sans cesse, il lui faut réagir, refermer la bulle, réactiver le fantasme, répéter comme un mantra que nous sommes les barbares, ceux qu'il faut éduquer, sauver, civiliser. Mais ils peuvent le répéter tant qu'ils veulent leur mantra, ça ne nous impressionne plus.'' Lamine Senghor
Publication
modifier- La violation d'un pays, et autres écrits anticolonialistes (présentation de David Murphy), L'Harmattan, Paris, 2012, 158 p. (ISBN 978-2-336-00228-6)
Notes et références
modifier- « La vie d’un Sénégalais illustre : Lamine Senghor (Joal 15-9-1889 – Fréjus 25-11-1927) » SenTV, 2011 [1]
- « LAMINE, UN SENGHOR AUX OUBLIETTES », sur SenePlus, (consulté le )
- « Décolonisations (1/3) - L'apprentissage - Regarder le documentaire complet », sur ARTE (consulté le )
- Jean-Loup Saletes, « Les tirailleurs sénégalais dans la Grande Guerre et la codification d'un racisme ordinaire », Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 244, no 4, , p. 129 (ISSN 0984-2292 et 2101-0137, DOI 10.3917/gmcc.244.0129, lire en ligne, consulté le )
- David Murphy, « Tirailleur, facteur, anticolonialiste : la courte vie militante de Lamine Senghor (1924-1927) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, no 126, , p. 55–72 (ISSN 1271-6669, DOI 10.4000/chrhc.4122, lire en ligne, consulté le )
- « Décolonisations (2/3) - La libération - Regarder le documentaire complet », sur ARTE (consulté le )
- Madièye Mbodj, « Contribution au 15e Séminaire communiste international » [archive du ], sur International Communist Seminar (Brussels), (consulté le )
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- (wo) Mamadu Jóob Decroix, Lamin I. Arfan̳ Sen̳oor : dundam ak jëfam, Éditions Papyrus Afrique, Dakar, 2005, 35 p. (ISBN 978-2-914135-12-2)
- Philippe Dewitte, Les mouvements nègres en France, 1919-1939, L'Harmattan, 1985, p. 109-110
- Mar Fall, Le destin des Africains noirs en France : discriminations, assimilation, repli communautaire, L'Harmattan, 2005, p. 55-57 (ISBN 9782747587952)
- Front culturel sénégalais, Lamine Senghor : Vie et œuvre, Dakar, 1979, 67 p.
- Olivier Sagna, Lamine Senghor (1889-1927), Paris, Université de Paris VII, 1981, 163 p. (Mémoire de Maîtrise)
- (de) Amadou Lamine Sarr, Lamine Senghor (1889–1927). Das Andere des senegalesischen Nationalismus, Boehlau Verlag, Vienne, 2011, 302 p. (ISBN 9783205785637)
Articles connexes
modifier- Tiemoko Garan Kouyaté (1902-1944), cofondateur de la « Ligue de défense de la race nègre » (LRDN, 1926)
- Marcus Garvey (1887-1940)
Liens externes
modifier- David Murphy, « Tirailleur, facteur, anticolonialiste : la courte vie militante de Lamine Senghor (1924-1927) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, no 126, 2015.
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