« Estran » : différence entre les versions

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{{Voir homonymie|Estran Cité de la mer|Batture (homonymie)}}
 
[[Image:Estran.jpg|thumb|Estran à marée basse dans les [[Côtes-d'Armor]], en [[France]].]]
 
L''''estran''', '''batture''', '''zone de balancement des marées''', '''zone de marnage,''' '''zone intertidale''' ou '''replat de marée''' également appelé '''''foreshore''''' (de l'[[anglais]]) en [[sédimentologie]], est la partie du [[littoral]] située entre les limites extrêmes des plus hautes et des plus basses [[marée]]s. Il constitue un [[biotope]] spécifique, qui peut abriter de nombreux sous-[[Habitat (écologie)|habitats naturels]].
 
Il est découpé en trois étages, de haut en bas : l’[[étage supralittoral]], l’[[étage médiolittoral]] et l’[[étage infralittoral]].
 
La répartition des organismes sur l'estran dépend de nombreux facteurs physiques (substrat, température, qualité et quantité de lumière, rythme de la marée immersion/émersion, hydrodynamisme), chimiques (salinité, pH, nutriments, gaz, niveau de pollution), et biologiques ([[Interaction biologique|interactions biologiques]] avec micro-organismes, [[épibionte]]s, [[endophyte]]s, prédateurs, symbiotes, parasites). Cette frange littorale est caractérisée par une zonation biologique plus ou moins marquée : zonation verticale ([[Étage (océanographie)|étagement littoral]] selon les niveaux d'immersion) et horizontale (en lien avec l'hétérogénéité des [[micro-habitat]]s) de la flore et de la faune.
 
== Terminologie ==
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L'estran est aussi appelé '''batture''' en [[Amérique du Nord]] [[Amérique francophone|francophone]]. On utilise aussi pour le désigner le terme « zone de [[marée|marnage]] » ou l'anglicisme « '''zone intertidale''' » (de l'anglais ''tidal'' signifiant « relatif à la marée ») ; en termes administratifs et juridiques, on emploie aussi l'expression « '''zone de balancement des marées''' ».
 
Provenant du néerlandais, et utilisésutilisé en français, un estran [[Vasière|vaseux]] prend le nom de « ''wadden'' » (qui se répartit en [[slikke]], nu ; et [[schorre]], fixé par la végétation<ref>{{Lien web |titre=wadden |url=http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8877341 |site=gdt.oqlf.gouv.qc.ca |consulté le=2021-01-08}}</ref>{{,}}<ref>https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/wadden/82673</ref>). 
 
Historiquement, le mot ''estran'' signifie « délaissé sableux de la mer ». Il est attesté sous la forme ''estrande'' dans un texte normand au {{s-|XII}} et a déjà plus ou moins le sens qu'on lui connaît aujourd'hui. Le terme picard ''stranghe'', ''estranc'', attesté au {{s-|XVII}}, puis ''estran'', est, avec le terme normand, la source du mot français, mais de manière directe. Il s'agit d'un emprunt au moyen [[néerlandais]] ''strang'', au sens de « grève ». Il est à mettre en rapport avec le terme actuel ''strand'' en anglais, allemand, néerlandais ou suédois.
 
== Localisation dans le monde ==
Ce sont des milieux en régression forte et rapide partout dans le monde<ref name=MurrayAl2018>{{en}} Nicholas J. Murray & al. (2018) ''[https://www.nature.com/articles/s41586-018-0805-8#ref-CR1 The global distribution and trajectory of tidal flats]'' | publié le 19 décembre</ref>, mais qui restent mal connus, car ayant longtemps été moins bien cartographiés que d'autres milieux littoraux, bien qu'étant l'un des écosystèmes côtiers les plus vastes et très important en termes de [[services écosystémiques]]<ref>{{en}} Millennium Ecosystem Assessment (2005) ''Ecosystems and Human Well-being: Current State and Trends'' (Island, Washington DC)</ref>.
 
Fin 2018, une cartographie haute résolution, basée sur plus de {{unité|700000|images}} satellite de la Terre, a précisé leur étendue et leur évolution récente (1984-2016, soit 33 ans, le temps d'une génération humaine)<ref name=MurrayAl2018/>.
 
Les zones intertidales à substrats sableux, rocheux ou vaseux, soumises à une inondation régulière, couvrent plus de {{unité|127921|km²}} de la surface terrestre (entre {{unité|124286}} et {{unité|131821|km²}}, pour un intervalle de confiance à 95 %)<ref name=MurrayAl2018/>.
 
Environ 70 % de ces zones sont situées sur trois continents : l'Asie (44 % du total), l'Amérique du Nord (15,5 % du total) et l'Amérique du Sud (11 % du total). En termes de pays, 49,2 % sont dans huit pays ([[Indonésie]], [[Chine]], [[Australie]], [[États-Unis]], [[Canada]], [[Inde]], [[Brésil]] et [[Birmanie]])<ref name=MurrayAl2018/>.
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=== Exondation et inondation ===
L'estran est recouvert, au moins en partie, lors des pleines mers, et découvert lors des basses mers. La durée d'[[exondation]] (le retrait de la mer) des différentes parties de l'estran dépend de leurs emplacements par rapport au niveau moyen de la mer et du nombre de marées par jour (deux sur les côtes atlantiques de la France, mais une seule dans certaines régions du globe). L'alternance cyclique de périodes d'exondation et d'inondation (appelées aussi périodes d'émersion et d'immersion) est un des facteurs qui conditionnent l'[[Étage (océanographie)|étagement littoral]] (répartition verticale des communautés animales ou végétales qui se disposent en ceintures en principe parallèles au rivage)<ref>{{ouvrage|auteur=Jacqueline Cabioc'h, Alain Le Toquin, Jean-Yves Floc'h|titre=Guide des algues des mers d'Europe|éditeur=Delachaux et Niestlé|date=2006|passage=23-24}}.</ref>.
 
Exposés à l'air libre pendant les périodes d'émersion, les organismes qui vivent en milieu intertidal sont soumis à des [[Stress biotique|stress abiotiques]] : [[dessiccation]], conditions d'anoxie/hypoxie, variations importantes de température et salinité. L'adaptation des organismes à ces conditions se manifeste par une {{lien|fr=tolérance à la dessiccation|lang=en|trad=Desiccation tolerance|texte=résistance à la dessiccation}} et aux variations de température (tégument, cuticule, coquille et exosquelette imperméables chez les espèces sessiles, déplacements vers des endroits humides et ombragés {{Incise|surplombs, anfractuosités, masses algales, mares intertidales}} chez les espèces vagiles, vie endogée chez les espèces des biocénoses marines), une [[Anaérobie|réduction du métabolisme]], une augmentation des taux de ventilation et d'extraction d'oxygène (vie sur une réserve d'eau, sur le stock d'oxygène dissous fixé par l'[[érythrocruorine]], pigment respiratoire plus oxygénant jouant le rôle de bouteille d'oxygène, respiration de l'oxygène atmosphérique lorsque l'air est humide). La végétation (ainsi que, pour partie, les espèces animales) se répartit verticalement selon une zonation en [[Étage (océanographie)|étages]] parallèles aux différentes hauteurs de marée et qui traduit la capacité des différentes espèces à supporter les changements environnementaux induit par l'exondation. La zonation de la flore et la faune intertidales est déterminée aussi par les gradients de salinité et les capacités spécifiques d'[[osmorégulation]]<ref>{{ouvrage|auteur=Patrick Scaps|titre=Invertébrés marins. Milieux de vie et diversité|éditeur=Ellipses|date=2022|passage=55-56}}.</ref>{{,}}<ref>{{ouvrage|langue=en|auteur=Clinton J. Dawes|titre=Marine botany|éditeur=Wiley|date=1998|passage=62-92|lire en ligne={{Google Livres|IHGIL7az7p0C}}}}.</ref>.
 
=== Hydrodynamisme ===
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{{article détaillé|étage (océanographie)}}
La structuration en « étages » est la conséquence des périodes plus ou moins longues d'exondation de l'estran en fonction du positionnement du lieu étudié. Plusieurs facteurs interviennent :
# lL'[[humidité]] : celle-ci peut provenir de l'eau de mer ou de la pluie ;
# laLa [[température]] : un estran subit de grandes variations de température quand il est exondé (gel en hiver, fortes températures en été) ; par contre les variations de température sont faibles quand il est immergé ;
# La [[salinité]] ;
# la [[lumière]] : les flux lumineux sont assez vite arrêtés par les couches d'eau.
# Les conditions d'[[anoxie]]/[[hypoxie]] ;
# laLa [[lumière]] : les flux lumineux sont assez vite arrêtés par les couches d'eau.
 
Sur une côte rocheuse, quatre grands étages peuvent être définis ([[étage supralittoral|supralittoral]], [[étage médiolittoral|médiolittoral]], [[étage infralittoral|infralittoral]] et [[étage circalittoral|circalittoral]]). Sur un estran sédimentaire ou en estuaire, la structuration verticale des plages est beaucoup moins nette.
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Tout comme la partie sèche du littoral, la propriété et l'utilisation de l'estran peut donner lieu à des controverses légales et politiques :
* Enen [[Nouvelle-Zélande]], plusieurs groupes [[Māori (Nouvelle-Zélande)|māori]] ont revendiqué leurs droits sur l'estran (et le plancher océanique) sur des bases historiques. Le ''Foreshore and Seabed Act'', qui fut voté en 2004, établit spécifiquement la propriété de l'État sur ces zones. La controverse se poursuit toujours actuellement ([http://www.beehive.govt.nz/foreshore/] et [http://www.justice.govt.nz/foreshore/]). ;
* Auxaux [[États-Unis]], pour les plages privées, certains États comme le [[Massachusetts]] utilisent le bas de l'estran pour séparer la propriété privée de la propriété de l'État. D'autres États comme la [[Californie]] prennent en considération le haut de l'estran. ;
* Enen France, l’estran appartient au [[domaine public maritime]]. Il peut être concédé (autorisation d'occupation temporaire, concession d'utilisation) pour des usages privés ([[conchyliculture]], mouillage, câbles...câbles…), mais pour des durées limitées ; ces concessions n'entraînent pas de transfert de propriété de l'estran et peuvent faire l’objet de redevances annuelles dues à l’État pour cette occupation. Dans ce domaine public, aucune construction même saisonnière ne peut se faire sans autorisation préalable par un service de l’État au-delà d’une utilisation supérieure à la journée, et cette occupation impose la protection des lieux, le respect de l’environnement (propreté) et la restauration des lieux en l'état initial. De plus, certaines utilisations non construites peuvent être interdites par arrêté préfectoral, telles que le campement, l’allumage de feux, la pêche ou la chasse, la cueillette ou les plantations, le creusement du sous-sol, la prospection et le pompage des eaux, l’usage de certains véhicules motorisés ou non, l’accès par des animaux domestiques ou le traitement des sols.
 
== Voir aussi ==
{{Autres projets|commons=Category:Mudflats|fr=}}
 
=== Articles connexes ===
{{colonnes|nombre=2|taille=20|
* [[Bioaccumulation]]
* [[Île accessible à marée basse]]
* [[Biologie marine]]
* [[Fucales]]
* [[Glossaire maritime]]
* [[Plate-forme littorale]]
* [[Herbier marin]]
* [[Île accessible à marée basse]]
* [[Fucales]]
* [[VasièresLaisse de mer]]
* [[Slikke]]
* [[Environnement marin]]
* [[Parc naturel marin]]
* [[Liste d'œuvres installées sur un estran]]
* [[Mare résiduelle]]
* [[EnvironnementParc naturel marin]]
* [[Plate-formePlateforme littorale]]
* [[Schorre]]
* [[Sédiment]]
* [[Slikke]]
* [[Vasière]]
}}