« Relique » : différence entre les versions
Contenu supprimé Contenu ajouté
Aucun résumé des modifications |
m Requête bot : suppression des parenthèses autour du modèle {{ISBN}} |
||
(24 versions intermédiaires par 17 utilisateurs non affichées) | |||
Ligne 1 :
{{autre|la [[nouvelle]] de [[Guy de Maupassant]]|La Relique}}
[[Image:Altshausen Schlosskirche Reliquie Hermann der Lahme 2005.jpg|thumb|Relique de [[Herman de Reichenau|saint Hermann de Reichenau]].]]
[[Image:Monti - santa Prassede colonna flagellazione 01396.JPG|thumb|Colonne de la [[flagellation]], ([[basilique Sainte-Praxède]], [[Rome]]).]]
[[File:Reliques de chefs dans l'église Saint-Paul- Aurélien de Saint-Pol-de-Léon.jpg|thumb|290px|Niche où sont exposées les reliques de chefs (crânes ou os de la tête) de 32 personnages ayant vécu entre le {{s mini-|XVI}} et le {{s|XIX}} dans l'église Saint-Paul-Aurélien de Saint-Pol-de-Léon.]]
Les '''reliques''' (du [[latin]] ''reliquiae'', « restes ») sont les restes matériels qu'a ou qu'aurait laissés derrière elle en mourant une personne [[dulie|vénérée]] : soit des parties de son corps, soit d'autres objets qu'elle a, ou avait, pour certains croyants, sanctifiés par son contact. Le culte des reliques reposant sur le possible transfert de la sacralité du corps saint sur la personne qui les touche, leur émiettement multiplie leurs bienfaits puisque chaque parcelle conserve la charge sacrale primitive. La conservation et le culte de [[Dulie|dulie relative]] de ces restes sont une pratique en vigueur dans plusieurs religions. Il en découle des croyances et des pratiques religieuses variées, mais aussi de vifs débats quant à leur authenticité, le commerce ou le culte quasi superstitieux dont elles ont été ou sont encore l'objet, les « détracteurs » des reliques qui pratiquent le [[scepticisme scientifique]] n’ayant souvent pas plus d’arguments décisifs pour prouver leur fausseté<ref>Si la fausseté de certaines reliques est bien établie (comme
À partir du [[siècle des Lumières]] qui voit les philosophes et écrivains de l'Encyclopédie combattre l'obscurantisme religieux, il y a un glissement des reliques de [[saint]]s vers les reliques profanes de grands personnages historiques.
== Les grandes religions face à la vénération des reliques ==
Aussi bien au sein du [[bouddhisme]] que du [[christianisme]] et de l'[[islam]], la vénération des reliques crée spontanément plusieurs clivages. Certains croyants accordent à ces objets une vénération naïve qui peut dans certains cas confiner à la [[superstition]], voire à la pensée magique la plus archaïque. Les autres croyants se divisent eux-mêmes en trois groupes. Les premiers encouragent ce culte tout simplement par cupidité, vu que la possession de telles reliques peut engendrer des revenus non négligeables<ref>Cette tendance est déjà combattue au sein du christianisme au {{s-|XI|e}} par [[Guibert de Nogent]] au sujet d'une [[Saintes Dents|dent de lait de Jésus]].</ref>. Les seconds le tolèrent, voire l'encouragent, dans la pensée qu'il faut garder prise sur la religiosité populaire en essayant de la canaliser vers des formes de vie religieuse plus évoluées<ref>C'est par exemple le cas du clergé catholique de l'âge classique. Dans ce contexte, {{Citation|la pierre est à Dieu ce que la relique est au saint, un objet de dévotion, tangible et emblématique, indispensable à l'homme dans son désir irrépressible de concret}}. Cf. {{Article|auteur=Philippe George|titre=Les reliques des saints. Publications récentes et perspectives nouvelles|périodique=Revue belge de Philologie et d'Histoire|date=2007|tome=85, fasc. 3-4|pages=866}}.</ref>. Enfin un troisième groupe considère qu'il faut combattre la superstition sans complaisance, et sans hésiter à détruire les objets de la vénération populaire. C'est le cas surtout des protestants du {{s-|XVI|e}}, à partir de [[Martin Luther|Luther]] et [[Jean Calvin|Calvin]]<ref>Guy Lobrichon, ''Le culte des saints, le rire des hérétiques, le triomphe des savants'', dans les Actes du colloque international de l'Université du Littoral-Côte d'Opale (Boulogne-sur-Mer), {{p.|95-108}}
Il est évident que la relique remplit une fonction et que son existence répond à un besoin profond ou à une tendance de fond de la vie religieuse, puisque ce phénomène se manifeste spontanément au sein de sociétés très diverses, même antireligieuses. Ainsi, même le communisme athée soviétique conserve précieusement dans un [[Mausolée de Lénine|mausolée]] sur la [[Place rouge]] de [[Moscou]] le corps momifié de [[Lénine]] dans un reliquaire de verre très semblable à celui de sainte [[Bernadette Soubirous]], et on s'y rend en pèlerinage de tous les coins de l'ex-[[Union soviétique]].
Ligne 15 ⟶ 16 :
== Les grandes reliques en tant que palladium ==
L'esprit moderne, qui considère la religion comme une affaire personnelle, a tendance à comprendre le phénomène du seul point de vue de la [[psychologie]] et de la religiosité individuelle. Or cet aspect des choses n'est pas premier dans l'[[histoire des religions]]. L'existence des reliques répond d'abord à un besoin collectif d'identité et de sécurité<ref> Jean-Marie Sansterre, ''Les justifications du culte des reliques dans le haut Moyen Âge, '' dans les Actes du colloque international de l'Université du Littoral-Côte d'Opale (Boulogne-sur-Mer), {{p.|81-93}}
Dans la tradition gréco-romaine, le [[Palladium (mythologie)|palladium]] est une statue de [[Athena|Pallas-Athéna]] tombée du ciel et récupérée par le fondateur mythique de la cité de [[Troie]]. Elle rendait inexpugnable la cité qui le détenait, [[Athéna]] étant la déesse des citadelles. Selon la tradition grecque, le [[Palladium (mythologie)|palladium]] avait été dérobé par [[Ulysse]] et [[Diomède]] pour s'assurer de l'issue de la [[guerre de Troie|guerre]]. Selon la tradition romaine, il est emporté par [[Énée]] en [[Italie]] et sera placé plus tard dans le [[Temple de Vesta (Rome)|temple de Vesta]], à [[Rome]]<ref>
Par suite, on appelle [[Palladium (mythologie)|palladium]] tout objet symbolique et sacré dont la possession et le culte soudent le groupe d'un point de vue religieux, et le préservent des menaces extérieures. Corrélativement toute menace sur l'objet devient une menace pour le groupe<ref>
{{Référence nécessaire|Les reliques majeures et officielles de la cité ou de l'État sont sollicitées en cas de crise majeure, épidémie ou guerre}}. Ainsi, en [[911]], les [[Normands]] qui ravageaient impunément toute la France du Nord échouèrent devant les murs de [[Chartres]], derrière lesquels le clergé du lieu portait en procession la sainte tunique de la [[Vierge Marie]]. De même à [[Thessalonique]], où l'on conservait les reliques du saint martyr Démétrius : aux dires du chroniqueur local Jean Caminiatès, « ce sauveur de la patrie l'avait soustraite à maint péril, lui avait offert la victoire et, plein de compassion, avait souvent empêché qu'elle ne connaisse la guerre »<ref>Jean Caminiatès, Eustathe de Thessalonique et Jean Anagnostès, ''Thessalonique, chroniques d'une ville prise'', textes présentés et traduits du grec par Paolo Odorico, Paris, Anarchasis, 2005, {{p.|66}}. La ville fut prise pour la première fois en 1185.</ref>.
Ligne 26 ⟶ 27 :
{{loupe|Procession (cortège)}}
{{Référence nécessaire|Le sort des reliques est lié symboliquement à celui du groupe qui les révère}}. Ainsi, à Naples, si, lors de la fête annuelle et de l'[[ostension]] des reliques de [[Janvier de Bénévent|saint Janvier]], le sang de ce [[martyr]] conservé dans une ampoule ne se liquéfie pas, toute une partie de la population redoute une catastrophe dans l'année, tremblement de terre ou épidémie. Toute menace sur les reliques majeures est par ailleurs considérée comme une menace sur le groupe social ou sur le corps politique. Ainsi la disparition provisoire d'un poil de la barbe de Mahomet au sanctuaire de [[Srinagar]] plongea en
== Les reliques en tant que talisman ==
L'individu autant que le groupe ressent un besoin profond de maîtriser son destin et les menaces qu'il sent confusément peser sur lui. Chez presque tous les peuples on constate le besoin multiforme de détenir et de manipuler des objets dotés de pouvoirs magiques, qu'on appelle, avec des distinguos qui varient selon les auteurs, [[amulette]]s, [[talisman]]s, [[fétichisme|fétiches]] ou [[grigri (talisman)|grigris]], voire [[Superstition#Porte-
Au [[Tibet]], les pèlerins rapportaient chez eux entre autres des lambeaux de vêtements qui avaient été portés par le Bandchan de Djachi-Loumbo<ref>Huc, ''Souvenir d'un voyage dans la Tartarie, le Tibet et la Chine pendant les années 1844, 1845 et 1846'', {{2e|édition}}, Paris, Le Clere, 1853, tome II, {{p.|278}}. En revanche la conservation et la vénération des excréments du dalaï-lama est dénoncé par le même auteur, ibid., {{p.|314-315}}.</ref>.
Ligne 37 ⟶ 38 :
Au {{s-|XIX|e}} et encore dans toute la première moitié du {{s-|XX|e}}, le clergé catholique faisait une grande diffusion d'images pieuses où étaient collés un ou deux millimètres carrés d'une étoffe ayant touché les ossements d'un saint.
==
[[Image:Buddha relics.JPG|thumb|Reliques du Bouddha trouvées à [[
Le bouddhisme pratique le culte des reliques ([[sanskrit]] : ''dhatu''; ''śarīra'') depuis les temps les plus anciens<ref name=":1">{{En}} Damien Keown, ''A Dictionary of Buddhism'', Oxford University Press, 2004{{ISBN|978-0-192-80062-6}}, {{p.|235-236}}.</ref>. Il est répandu dans l'ensemble du monde bouddhiste, tant en [[Asie du Sud-Est]] qu'en [[Asie de l'Est]], et les pèlerins vénèrent depuis donc très longtemps un grand nombre et une grande variété de reliques du [[Siddhartha Gautama|Bouddha Shakayamuni]], le bouddha historique<ref name=":0">{{en}} John S. Strong, ''Relics of the Buddha'', Delhi, Motilal Banarsidass Publishers, 2007 ({{1re}} {{éd.}} 2004 - Princeton Univ. Press), {{nb p.|xxii + 290 p.}} {{ISBN|978-8-120-83139-1}}, p. XIII-XIV.</ref>. Strong relève que de [[Kandy]] à [[Kyoto]], on trouve difficilement un site n'abritant pas des restes physiques du Bouddha ou l'un ou l'autre objet lui ayant appartenu<ref name=":0" />.
Ces reliques peuvent être de trois types: des restes de son corps, des objets qui lui ont appartenu, des représentations symboliques (par exemple, les empreintes de ses pieds, ''[[buddhapada]]'' ou l'[[Arbre de la Bodhi|arbre de la bodhi]], sous lequel il s'est éveillé)<ref name=":2">{{En}} Richard F. Gombrich, ''Buddhist Precept and Practice,'' Delhi, Motilal Banarsidass Publishers, 2008 [1991], {{nb p.|xv + 427 p.}} {{ISBN|978-8-120-80780-8}}, p. 121-124.</ref>.
=== Création et vénération des reliques ===
[[Fichier:Kyaiktiyo Pagoda with devotees.jpg|vignette|Pèlerins au [[Rocher d'Or|Rocher d'or]] (Birmanie). Le rocher tiendrait en équilibre grâce à un cheveu du Bouddha glissé sous lui.]]
Les reliques seraient apparues après la mort du Bouddha, lorsqu'il est entré en ''[[Parinirvana|parinivana]]''. Plusieurs groupes se disputèrent, chacun réclamant une part des ossements calcinés<ref name=":3">[[André Bareau]], ''En suivant Bouddha,'' Paris, Philippe Lebaud, 2000, {{ISBN|978-2-866-45364-0}} {{p.|284-288}}.</ref>. L'épisode est resté connu sous le nom de « Querelle des Reliques », qui se termina cependant en un « Partage des reliques » en huit parts égales, ce qui évita un conflit armé entre les groupes présents<ref name=":3" />{{,}}<ref name="Newland20012">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Guy Newland (Ed.)|titre=Changing Minds : Contributions to the Study of Buddhism and Tibet in Honor of Jeffrey Hopkins|passage=24|éditeur=Snow Lion Publications|date=2001|pages totales=352|isbn=978-1-559-39978-4}}.</ref>.
[[Fichier:Stupa No. 3 at Sanchi.jpg|vignette|Stupa n°3 à [[Sanchi]] ([[Inde]]).]]
La tradition bouddhique rapporte que la mort de [[Siddhartha Gautama|Bouddha]] fut suivie d'une dispute entre plusieurs clans. Son enjeu était la possession des reliques qui restaient du bûcher funéraire de Bouddha. C'est d'ailleurs l'un des thèmes de l'iconographie bouddhique traditionnelle<ref>Par exemple sur le portail ouest du stūpa {{n°|1}} de Sāñcī, en Madhya Pradesh, sous la dynastie Maurya ; ou encore dans la grotte 70 de Touen-Houang, d'époque Tang, décrite par Roger Grousset, ''La Chine et son art'', 1952, {{p.|137}}.</ref>. Cela expliquerait l'éparpillement de ces restes dans le bassin moyen du [[Gange]], et l'apparition de nombreux [[tumulus]] funéraires censés contenir ces reliques<ref name=":3" />. Ceux-ci seront bientôt remplacés par un monument connu sous le nom de ''[[stûpa]]'' (ou encore de [[pagode]] en Asie du Sud-Est, ou de ''[[chörten]]'' au Tibet)<ref name=":12">{{en}} Damien Keown, ''A Dictionary of Buddhism'', 2004, {{p.|280}}.</ref>.
Par la suite, le grand empereur [[Ashoka]] ({{-s-|III}}) fut connu pour avoir bâti des stupas et des reliquaires dans {{Nombre|84000}} endroits différents de son empire. Ces reliques pouvaient être des bouts d'ongle, des cheveux (il y en aurait {{Nombre|900000}} distribués par les dieux dans notre univers) ou des poils ({{Nombre|800000}}, aussi distribués par les dieux). Au [[Sri Lanka]], le grand commentateur [[Buddhaghosa]] ({{S-|V}}) affirmait que la présence d'une relique était un critère permettant de distinguer un véritable monastère<ref name=":0" />.
=== L'exemple de la dent du Bouddha ===
[[Fichier:Praying monks and nuns in the Buddha Tooth Relic Temple of Singapore.jpg|vignette|Récitation de [[Sutra|soutras]] au {{Lien|trad=Buddha Tooth Relic Temple and Museum|fr=Temple de la relique de la dent (Singapour)}}. [[Singapour]], 2018.]]À [[Kandy]] (Sri Lanka), le [[Temple de la Dent]] passe pour abriter une molaire du Bouddha. C'est là une des reliques les plus célèbres du bouddhisme qui donne lieu chaque année à un important festival qui dure dix jours<ref name=":2" />. En France, [[Édouard Charton]] a raconté en 1842 l'histoire étonnante de cette dent<ref>{{Lien web |titre=Procession de la dent de Bouddha à l'île de Ceylan |url=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k314258/f245.item |site=gallica.bnf.fr |périodique=[[Le Magasin pittoresque]] / publié sous la direction de M. Édouard Charton |date=1842 |consulté le=2022-07-27 |page=241-242}}.</ref>. Elle est considérée comme une représentation symbolique de la vie de Bouddha. Des rituels et des cérémonies diverses se sont développées autour de la relique.
{{Référence souhaitée|On conserve aussi des dents du Bouddha|date=27 juillet 2022}} en [[République populaire de Chine|Chine]]
== Vénération des reliques dans l'Antiquité préchrétienne ==
Ligne 82 ⟶ 93 :
=== Développement et circulation des reliques dans le monde chrétien ===
[[Fichier:Geertgen tot Sint Jans 005c.jpg|vignette|Vol des reliques de [[Jean le Baptiste]] par les [[Ordre de Saint-Jean de Jérusalem|chevaliers de Saint-Jean]], tableau de [[Geertgen tot Sint Jans]] vers 1484.]]
Dès le {{IIe siècle}}, des traditions chrétiennes existent sur les [[Tombeau (architecture)|sépulcre]]s de quelques apôtres : [[Pierre (apôtre)|Pierre]] et [[Paul de Tarse|Paul]] à [[Rome]], [[Jean (apôtre)|Jean]] à [[Éphèse]], [[Philippe (apôtre)|Philippe]] à [[Hiérapolis]]<ref>[[Pierre Maraval (historien)|Pierre Maraval]], ''Lieux saints et pèlerinages d'Orient: histoire et géographie des origines à la conquête arabe'', Cerf, 1985, s.v.</ref>. Les chrétiens veulent en effet rendre hommage et perpétuer le souvenir de leurs saints par des obsèques solennelles et par des pèlerinages à leur tombe au jour anniversaire de leur mort. Les premières reliques des martyrs sont vénérées dans les cimetières en célébrant les [[saints mystères]] sur leurs tombes, les plus riches pouvant être inhumés ''ad sanctos'' (« près des Saints ») afin de bénéficier de leur ''{{lang|la|[[Virtus (Rome antique)|virtus]]}}''<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Yvette Duval|titre=Auprès des saints corps et âme. L'inhumation ad santos dans la chrétienté d'Orient et d'Occident du {{s mini-|III}} au {{s-|VII}}|lieu=Paris|éditeur=Études augustiniennes|année=1988|pages totales=230|isbn=2-85121-096-3}}.</ref>. À partir de l'[[édit de Milan]] de [[313]], le pèlerinage sur les tombeaux des martyrs et la vénération des témoignages matériels des [[temps apostoliques]] se développe : des [[Martyrium (architecture)|''martyria'']] construits en dehors des villes puis dans les centres urbains abritent des [[reliquaire]]s ou des monuments dédiés les ''{{Lang|la|texte=memoriae funéraires}}'', nécessaires après la [[Translation (reliques)|translation]] et la division des reliques (le nombre des martyrs diminuant après la conversion de [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin {{Ier}}]] qui s'accompagne d'une christianisation de l'Empire), sur lesquels on construit les églises. Cependant, il faut retrouver les traces des sites que les communautés chrétiennes encore très minoritaires et peu organisées, ont jadis perdues. Ce travail est l'œuvre de plusieurs générations d'exégètes et lorsque ces traces sont définitivement perdues, de nouvelles traditions sur ces sites sont alléguées<ref>{{Ouvrage|auteur1=Estelle Cronnier|titre=Les inventions de reliques dans l'Empire romain d'Orient (IVe-VIe s.)|éditeur=Brepols Publishers|année=2016|passage=55|isbn=}}.</ref>.
Le développement du trafic de reliques dès cette époque est pour la première fois évoqué dans la [[Constitution impériale|constitution]] des empereurs Gratien, Valentinien et Théodose, adressée au préfet d'Orient [[Cynegius Maternus]], et promulguée à Constantinople le {{date-|26 février 386}}, ''{{Lang|la|texte=constitutio}}'' qui défend de déterrer et de vendre les reliques. Interdiction peu appliquée comme
À partir du {{Ve siècle}} en Afrique du Nord et du {{VIe siècle}} en Gaule, il s'agit de petits reliquaires sarcophages accessibles qui sont placés dans ou sous l'autel. Puis les reliquaires sont scellés dans une niche (le ''loculus)'' à l'intérieur de l'autel<ref>{{Ouvrage|prénom1=Edina|nom1=Bozóky|titre=La politique des reliques de Constantin à Saint Louis|sous-titre=protection collective et légitimation du pouvoir|éditeur=Beauchesne|année=2007|passage=26|isbn=|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=wINGJiwXXbIC&pg=PA26}}.</ref>. La [[châsse]], hermétique et scellée, n'est ouverte qu'en de très rares occasions, en présence d'un évêque, de sorte que la présence invisible du saint reste quelque peu abstraite et impalpable (de nos jours, elles sont parfaitement visibles à travers le reliquaire et exposées dans l'église). Le culte des saints succède au culte des martyrs au [[Moyen Âge]]. Le [[deuxième concile de Nicée]] en [[787]] affirme la nécessité de vénérer les images et les reliques. Puisqu'il fallait donner la preuve que l'église possédait réellement ces objets de vénération, dès le haut Moyen Âge on a trace de [[Procession religieuse|procession]]s, lors desquelles la présence des reliques et leur fonction protectrice de la communauté étaient ritualisées, dans des parcours du territoire effectués en présence de toutes les corps constitués, religieux et aussi civils, chacun étant jalousement attaché à ses prérogatives en cette occasion. Les preuves sont plus difficiles à trouver lorsque ces communautés religieuses craignent qu'on leur ait vendu des fausses reliques (la population romaine, très réticente à disperser les reliques de la capitale des chrétiens, grande pourvoyeuse de restes de saints et martyrs, ne voit ainsi pas d'un mauvais œil la substitution des vraies par des fausses), ce qui est une des explications à l'indulgence manifestée par les autorités épiscopales envers le vol d'un butin aussi précieux, le vol pouvant garantir une plus grande authenticité<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Hippolyte Delehaye]]|titre=Sanctus : essai sur le culte des saints dans l'antiquité|éditeur=Jules de Meester et Fils|année=1927|passage=204}}.</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Patrick Geary|Patrick J. Geary]]|titre=Le Vol des reliques au Moyen Âge|sous-titre=furta sacra|éditeur=Éditions Aubier|année=1993|pages totales=256|isbn=}}.</ref>.
Les reliques orientales peuvent être des fragments de corps saints, mais en Occident, la loi romaine sur la préservation des cadavres interdit cette pratique pendant les premiers siècles du christianisme. Les reliques des saints occidentaux sont donc à cette époque {{Citation|soit des linges ou du sable imbibés du sang des martyrs lors de leur passion, soit, le plus souvent, des reliques au second degré, que [[Grégoire le Grand]] appelle en général des ''sanctuaria'' : il s'agit de terre, d'étoffes (''brandea'') ou de liquides sanctifiés par le contact avec les restes saints dans la tombe ou le reliquaire, ou encore, à Rome, de la limaille des chaînes de saint Pierre<ref>{{ouvrage|auteur=Jean-Marie Mayeur, Luce Pietri, André Vauchez|titre=Histoire du christianisme. Les Églises d'Orient et d'Occident (432-610)|tome=3|éditeur=Mame-Desclée|date=1998|passage=1078}}.</ref>}}.
[[File:Basilica di Santa Maria Maggiore - 2.jpg|thumb|Relique du « Sacré Berceau » dans la ''confessio'' de la [[basilique Sainte-Marie-Majeure]].]]
Dans les églises, les reliques sont placées dans une partie de l'autel appelée en Occident ''Sepulchrum'' ou ''[[Confessio]]'' (caveau sous l'autel puis reliquaire au-dessus à partir du {{s-|VI|e}})<ref>{{Ouvrage|auteur1=Lazare-André Bocquillot|titre=Traité historique de la liturgie sacrée ou de la messe|éditeur=Anisson|année=1701|passage=84|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=5ss4ubllbWAC}}.</ref>. Ce besoin de mieux faire sentir la présence du saint et de ses reliques est par ailleurs à l'origine de deux innovations architecturales du Moyen Âge. D'abord apparaît, à partir de l'époque carolingienne, le [[déambulatoire]], couloir qui tourne autour de l'autel et le sépare des [[chapelles]] de l'[[abside]]. Il permet aux pèlerins de circuler autour de l'autel principal, et simultanément d'accéder aux autels secondaires dont chacun a sa titulature et ses reliques propres. Cela crée une offre variée de dévotion et correspond au développement de la notion théologique de la [[Communion des saints]], puisqu'on circule alors librement entre les reliques de saints d'époques très différentes. Ensuite, surtout à l'époque romane, la [[crypte]], espace souterrain qui permet de s'approcher plus près de la [[châsse]], autrement invisible<ref>{{Ouvrage|auteur1=Joseph Alexandre Martigny|titre=Dictionnaire des antiquités chrétiennes|éditeur=L. Hachette et Cie|année=1865|passage=202}}.</ref>. Des ouvertures et systèmes d'évacuation au niveau des reliquaires ou des tombeaux des saints permettent, par apposition d'un tissu ou mise en contact d'eau ou d'huile, de les consacrer, le pèlerin pouvant ainsi emporter comme souvenir ces [[eulogie]]s (telles les {{lien|fr=Ampoule de pèlerinage|lang=it|trad=Ampolle dei pellegrini|texte=ampoules de pèlerinage}} appelées aussi ampoules à eulogies) qui ont la valeur de reliques<ref>{{Ouvrage|auteur1=Mathijs Lamberigts, Louis Reekmans, Peter van Deun|titre=La pluralité|éditeur=Peeters Publishers|année=1995|passage=193|isbn=}}.</ref>.
Les décennies qui suivent les [[An mille#Les fausses terreurs|peurs de l'an Mille]] voient un renouveau du culte des saints et des reliques qui sont particulièrement développées lors de la convocation des [[Paix de Dieu#Premières assemblées de
▲Les décennies qui suivent les [[An mille#Les fausses terreurs|peurs de l'an Mille]] voient un renouveau du culte des saints et des reliques qui sont particulièrement développées lors de la convocation des [[Paix de Dieu#Premières assemblées de paix|assemblées de paix]] tandis que les [[Invention de reliques|inventiones de reliques]] sont souvent réalisées à des moments cruciaux pour les communautés monastiques ou cathédrales, leur permettant de « sortir de difficultés financières, de réaffirmer le pouvoir d'un évêque, de défendre le bien-fondé d'une réforme, etc. »<ref>{{Article|auteur=Michèle Gaillard|titre=Les Reliques. Objets, cultes, symboles|périodique=Médiévales|date=2001|volume=20|numéro=40|pages=168-169}}</ref>.
[[Fichier:Zucchetto of Pope Saint Pius X.JPG|vignette|Relique de contact du pape [[Pie X]], authentifiée par un sceau et un document.]]
À partir du {{s-|XII|e}}, les [[châsse]]s et autres [[reliquaire]]s sont de plus en plus fréquemment exposés à la contemplation des fidèles, soit sur l'[[Autel (religion)|autel]], ou bien sur des tribunes d'ostension spécialement conçues pour ce faire, ou encore dans des reliquaires portatifs appelés ''monstrances'': après la [[Guerre de Cent Ans]], bien des églises dévastées et appauvries en font usage lors de tournées destinées à collecter des fonds. Les stipulations de différents conciles et synodes suggèrent que le commerce des reliques est toléré par les autorités ecclésiastiques, l'interdiction ne touchant que leurs ostensions hors de leurs reliquaires ou la vénération de reliques nouvelles sans l'autorisation du pape<ref>{{Article|auteur=Hubert Silvestre|titre=Commerce et vol de reliques au Moyen-Âge|périodique=Revue belge de philologie et d'histoire|date=1952|volume=30|numéro=3-4|pages=726}}.</ref>. Les reliques servent aussi bien les sanctuaires (reliques qui favorisent les pèlerinages) que les intérêts d'individus, de grandes familles ou de communautés privées qui cherchent à se les approprier pour leurs usages [[apotropaïque]]s (reliques exposées dans les oratoires de leurs demeures ou portées dans des petits reliquaires). Les corps des saints, vrais ou faux, sont ainsi démembrés, donnés, échangés, volés, vendus, favorisant un commerce des reliques qui tente sans le réussir de garantir l'authenticité des reliques par des procès-verbaux concernant leur reconnaissance et des « authentiques » (morceaux de parchemins qui identifient chaque pièce)<ref>{{Article|langue=en|auteur=John Wortley|titre=The origins of Christian veneration of body-parts|périodique=Revue de l’histoire des religions|date=2006|volume=223|pages=5-28}}.</ref>{{,}}<ref>Cette authentification est d'autant plus essentielle lorsque les reliques sont des morceaux d’os informes, des fioles au liquide non identifiable ou des réceptacles remplis de poussière, de morceaux de cailloux . Cf Paul Bertrand, « Authentiques de reliques : authentiques ou reliques ? », dans ''Le Moyen Âge'', tome CXII, 2006, {{p.|3}} 63-374</ref>.
[[File:Hortense haudebourt-lescot vendeur de reliques a rome.jpg|thumb|[[Hortense Haudebourt-Lescot]], ''Vendeur de reliques à Rome''.]]
On assiste aussi au développement des statues-reliquaires, dont un des premiers exemples est au {{s-|X|e}} celui de [[Abbatiale Sainte-Foy de Conques#
Au {{s-|XVI|e}}, la [[réforme protestante]] dénonce le trafic d'objets sacrés et reliques. Bien que cette [[simonie]] ait déjà été condamnée par le [[deuxième concile du Latran]] en
À l'époque [[baroque]], reliques et reliquaires sont parmi les objets qui suscitent le plus la créativité des artistes, comme le montre l'exemple de Rubens<ref>Victor Ieronim Stoichiţă, ''L'instauration du tableau: métapeinture à l'aube des temps modernes'', Droz, 1999, {{p.|107}} cite le cas d'un contrat de 1606 entre les Oratoriens de Rome et Rubens, à qui ils commandent un tableau dans lequel encastrer une image de la Vierge qui aurait saigné après avoir été lapidée par un hérétique.</ref>. L'usage de la vitre devient la règle quasiment générale pour les reliquaires. Les corps qui se sont bien conservés, en cas d'incorruption<ref>Une [http://www.ac-emmerich.fr/INCORRUPTIBLES.htm page catholique en ligne] liste plus de trois cents cas de saints dont les corps auraient été miraculeusement préservés de la corruption.</ref>, sont maquillés et présentés dans des châsses vitrées comme dans le cas de [[Bernadette Soubirous]].
Ligne 107 ⟶ 121 :
À l'époque contemporaine se pose la question de l'utilisation et de la valorisation de ces restes humains qui appartiennent en France aux communes mais dont les communautés catholiques sont allocataires de droit. Comment présenter harmonieusement ces collections parfois hétéroclites à la curiosité des uns autant qu'à la dévotion des autres ? Il y faut l'intervention d'artistes contemporains comme le montre le cas de la collection de Notre-Dame de [[Longpont-sur-Orge]], mise en valeur par Karine Lasserre en 2009.
Actuellement, des reliques de martyrs et d’autres saints sont le plus souvent scellées dans l’autel des églises lors de leur [[Dédicace (cérémonie)|dédicace]]<ref>[http://www.liturgiecatholique.fr/la-celebration-de-la-dedicace.html La célébration de la dédicace d’une église]</ref>. Les autels principaux des églises devaient contenir impérativement des reliques. Cependant ,en 1969, l'instauration de la [[messe de Vatican II]] rend cette disposition optionnelle<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Kenneth Kenneth Brighenti, John John Trigilio|titre=The Catholicism Answer Book|éditeur=Sourcebooks|année=2007|passage=360|isbn=}}.</ref>.
=== Rituel et scénographie des reliques à travers le monde chrétien ===
[[Fichier:Inside in Amiens Cathedral, pic-004.JPG|vignette|La mise en scène peinte sous l'enfeu de [[Ferry de Beauvoir]] évoque sans doute les rites de dévoilement des corps saints qui semblent céder au désir d'appropriation des fidèles<ref>{{Ouvrage|auteur1=Dany Sandron|titre=Amiens. La cathédrale|éditeur=[[Éditions Zodiaque]]|année=2004|passage=169|isbn=}}.</ref>.]]
[[Fichier:9661 - Milano - S. Ambrogio - Altare - Foto Giovanni Dall'Orto 25-Apr-2007.jpg|vignette|Le ''paliotto'' du maître-autel de la [[basilique Saint-Ambroise de Milan]] illustre les aménagements spécifiques des mobiliers liturgiques pour favoriser l'exposition des reliques<ref>Témoin de l'[[Art carolingien|orfèvrerie carolingienne]], ce ''paliotto'' (nom italien désignant le devant-d'autel) montre un portillon qui ouvrait sur le ''loculus'' aux reliques d'Ambroise</ref>.]]
Les reliques font l'objet d'un processus ritualisé chrétien : [[invention de reliques]] (du latin ''{{Lang|la|texte=inventio}}'', il s'agit de la découverte du corps du [[saint]] ou de ses reliques), ''élévation'' des reliques (du latin ''{{Lang|la|texte=elevatio}}'', il s'agit de l'exposition du corps du [[saint]] dans un [[sarcophage]], une [[châsse]] ou de ses reliques {{Incise|des parties de son corps ou des objets en lien avec lui}} dans un [[reliquaire]]), ''réception'' (du latin ''{{Lang|la|texte=receptio}}'') des reliques dans son lieu d'accueil définitif qui est à l'origine de nombreuses célébrations et de beaucoup de [[pèlerinage]]s, enfin ''déposition'' (du latin ''{{Lang|la|texte=depositio}}'') en faisant inhumer ses restes dans un édifice cultuel : reliques non visibles un peu partout dans l'église puis à partir du {{s-|IX|e}} essentiellement sous la table de l'[[Autel (religion)|autel]] ou dans un tombeau de la [[crypte]] sous l'autel et, à partir du {{s-|XI|e}}, visible dans une châsse ou un reliquaire élevés dans le [[Chœur (architecture)|chœur de l'église]] qui se trouve ainsi sanctifié. Cette transition entre l'invisibilité de la relique (même lors des cérémonies de ''{{Lang|la|texte=receptio}}'', elles restaient dissimulées sous des ''{{Lang|la|texte=velum}}'') et la visibilité au {{s-|XI|e}} est peut-être en lien avec l'importance attribuée à la doctrine néo-platonicienne de la lumière. Ce courant philosophique se traduit dans l'[[architecture gothique]] par l'adoption d'un espace unifié et la disparition du mur plein, et par la valorisation de mieux en mieux affirmée des reliques et des images religieuses qui supposent la reconnaissance de leur fonction de présentification<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Edina Bozoky]]|titre=Les reliques|éditeur=[[Brepols]]|date=Brepols|passage=149-157|isbn=}}.</ref>.
L'[[invention de reliques]] (au sens technique du mot, c'est tout simplement leur découverte) était considérée comme un événement si important qu'il était parfois commémorée par une fête liturgique spéciale. Ainsi la liturgie orthodoxe autant que catholique célèbre l'Invention de la [[Vraie Croix]] le {{date-|3 mai}}, date anniversaire de sa découverte providentielle par [[Hélène (mère de Constantin)|sainte Hélène]], mère de l'empereur [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin]], en [[326]].
Le prestige des saints était si grand qu'on ne craignit pas d'en découvrir, voire d'en forger toujours davantage (le commerce des reliques culminant au {{XIIIe siècle}}), sur la foi de songes et de révélations toujours bienvenues, soit pour appuyer une cause politique, ou religieuse, ou institutionnelle (tel [[Louis IX de France|saint Louis]] qui dépensa pour la [[Sainte Couronne|Couronne du Christ]] trois fois plus que pour édifier la [[Sainte Chapelle]] destinée à la recevoir), voire tout simplement parce que la possession de telles reliques était source de prestige et de revenus substantiels, en générant notamment des pèlerinages. Ainsi on retrouve deux têtes (déclarées authentiques par le [[Vatican]]) et 32 doigts de [[Pierre (apôtre)|saint Pierre]], 8 bras de [[Blaise de Sébaste|saint Blaise]], 11 jambes de [[Matthieu (apôtre)|saint Matthieu]], 14 [[Saint Prépuce|saints prépuces]] et de nombreux morceaux du cordon ombilical de [[Jésus-Christ]]<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Clémentine Portier-Kaltenbach]]|titre=Histoires d'os et autres illustres abattis|sous-titre=morceaux choisis de l'histoire de France|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Jean-Claude
[[Fichier:Lubersac - Eglise Saint-Etienne - Chevet - Transfert des reliques de saint Etienne.JPG|thumb|Chapiteau de la translation des reliques de [[Étienne (martyr)|saint Étienne]], église Saint-Étienne de [[Lubersac]], en [[Limousin (ancienne région administrative)|Limousin]].]]
La [[Translation (reliques)|translation des reliques]], c'est-à-dire leur transfert d'un lieu à un autre, était un événement presque aussi important que leur [[Invention de reliques|Invention]], et pouvait également être commémorée par une fête liturgique. À partir d'une certaine époque en effet, on commença à transporter les restes des martyrs et les autres reliques pour différentes raisons. D'abord pour fonder des autels là où il n'y avait pas de restes de martyrs. Puis, lorsque la religion chrétienne devient officielle, pour augmenter le prestige de certaines métropoles : et surtout [[Byzance]], arbitrairement désignée par [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin]] comme nouvelle capitale de l'Empire.
En tant qu'objets précieux, voire de convoitise, les reliques furent régulièrement l'objet au Moyen Âge de dons et de généreux partages, mais aussi de vols (fréquent voire admis en Occident, notamment lors des croisades<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Jean Flori]]|titre=Les croisades : Origines, réalisations, institutions, déviations|éditeur=Éditions Jean-Paul Gisserot|année=2001|passage=52|isbn=}}.</ref>) voire de razzias : lors de la [[Quatrième croisade]] eut lieu la prise de [[Constantinople]], la ville aux nombreuses reliques : les [[chevalier croisé|croisés]] firent main basse sur les trésors (reliques et pierreries) de Constantinople, butin remis entre les mains de l'évêque de [[Troyes]], [[Garnier de Traînel]], dans laquelle on trouvait un morceau considérable de la [[vraie Croix]], du sang du [[Jésus de Nazareth|Christ]], le [[Saint Calice]] de la [[Cène]], mais aussi le chef de [[Philippe (apôtre)|saint Philippe]], le bras de [[saint Jacques le Majeur]] ou le corps entier de [[Hélène (mère de Constantin)|sainte Hélène]] vierge<ref>[http://www.esonews.com/auteurs/Graal_d_castille.asp Source]</ref>. L'église de [[Saint-Zacharie (Var)|Saint-Zacharie]] dans le Var, possède le ''San Sabatoun'', chausse devenue relique ayant appartenu à [[Marie de Nazareth|Marie]], et rapportée par un croisé.
Inversement, on a déplacé continuellement des reliques en Europe au {{s-|IX|e}} pour les soustraire aux pillages des [[Vikings]] qui les détruisaient ou les revendaient à prix d'or<ref>Voir une [http://www.encyclopedie-universelle.com/abbaye2%20-%20carolingiens-%20.html liste intéressante en ligne de ces transferts continuels].</ref>.
Ces rites sont à l'origine d'un [[genre littéraire]] caractéristique de la littérature [[Hagiographie|hagiographique]], le ''récit de translation'' ou ''d’invention de reliques'' (les ''{{Lang|la|texte=translationes}}'') qui forment avec les ''{{Lang|la|texte=miracula}}'' (recueils de [[miracle]]s) des recueils indépendants se développant à côté de la traditionnelle [[vita]]<ref>{{Ouvrage|auteur1=Olivier Biaggini|titre=Miracles d'un autre genre : récritures médiévales en dehors de l'hagiographie|éditeur=Casa de Velázquez|année=2012|passage=7|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=GmMKPiCrcUsC}}.</ref>.
Le [[droit canon]] interdit strictement le commerce des reliques, qui est un [[blasphème]]<ref>[http://www.vatican.va/archive/ENG1104/__P4D.HTM The ''Code of Canon Law'' §1190 §1]</ref>. Quant aux reliques les plus significatives, il est absolument interdit de leur faire subir quelque aliénation ou transfert définitif que ce soit sans l'approbation du [[Saint-Siège]]<ref>[http://www.vatican.va/archive/ENG1104/__P4D.HTM The ''Code of Canon Law'' §1190 §2]</ref>. En revanche les reliques de la troisième classe sont distribuées libéralement aux simples fidèles, sous forme par exemple de tout petits fragments d'étoffes ayant été touchées par un saint ou par ses ossements.
=== Pratiques cultuelles et justifications théologiques ===
[[Image:Agnolo Gaddi True Cross Detail 1380.jpg|thumb|L'Invention de la Croix, [[Agnolo Gaddi]], Florence,
L'usage majeur des reliques dans la tradition cultuelle orthodoxe et catholique est leur utilisation quasiment obligatoire lors de la consécration d'un [[Autel (religion)|autel]], sur la base d'un texte scripturaire très précis, ''Apocalypse'' VI, 9 : « Je vis sous l'autel les âmes de ceux qui furent égorgés pour la Parole de Dieu et le témoignage (''martyre'') qu'ils avaient donné ».
La [[théologie]] orthodoxe et catholique insiste sur le fait que le culte rendu aux saints en présence de leurs reliques est un culte de [[dulie]] et qu'il ne doit en aucun cas dériver en [[latrie]] ou [[adoration]], réservée à Dieu seul. Dès l'[[époque carolingienne]], [[Jonas d'Orléans]] ou [[Dungal]] avancent des justifications théologiques en s'appuyant sur les autorités [[Patristique et patrologie|patristique]]s mais [[Claude de Turin]] nie l'efficacité du culte des reliques, des pèlerinages sur les tombeaux des martyres et du pouvoir d'intercession des saints, les assimilant à des pratiques païennes<ref>{{Ouvrage|langue=en|titre=The Oxford Dictionary of the Christian Church|lieu=Oxford|éditeur=[[Oxford University Press]]|année=1997|pages totales=1786|passage=359|isbn=0-19-211655-X}}.</ref>.
Les théologiens catholiques précisent encore que le culte voué aux reliques est un « culte relatif », c'est-à-dire qu'il doit s'adresser non pas à la chose, mais à la personne qui lui est relative. Par exemple, le culte rendu à la colonne de la [[flagellation]] est un culte de latrie relatif (parce qu'on adore l'homme-dieu qui a été attaché à cet objet pour y être fouetté), tandis que le culte rendu aux ossements de sainte Thérèse est seulement un culte de dulie relatif (parce qu'il s'adresse non aux os eux-mêmes mais à la personne de la sainte, qu'il faut révérer sans l'adorer).
Ligne 142 ⟶ 157 :
[[File:Saint-Menoux debredinoire.JPG|thumb|left|<center>Touriste se faisant « ''[[Débredinoire de Saint-Menoux|débrediner]]'' » pour vénérer les reliques de [[saint Menulphe|saint Menoux]].</center>]]
Il est également d'usage tout au long du Moyen Âge de prêter serment en étendant la main sur des reliques, dans la pensée que le saint sur les restes duquel on prête serment ne manquera pas de se venger des parjures qui l'auraient pris à témoin. [[Helgaud]], ami et biographe du roi [[Robert II le Pieux]], le roi de l'an Mil, raconte que pour éviter tout blasphème compromettant l'honneur des saintes reliques le roi avait trouvé un pieux subterfuge : il faisait prêter serment aux puissants sur un [[reliquaire]] vide, à leur insu ; quant aux humbles, il leur faisait prêter serment sur un œuf de [[Griffon (mythologie)|griffon]] de sa collection, [[talisman]] profane qui était sans doute un œuf d'autruche<ref>« Vie de Robert le Pieux », traduite du latin par François Guizot, en ligne sur le [http://www.corpusetampois.com/cls-11-helgaldus-vitarotberti1824guizot.html « Corpus Etampois »].</ref>. Il est aussi d'usage de passer sous la [[châsse]] du saint pour se placer sous sa protection<ref>{{Ouvrage|auteur1=Jacques Baudoin|titre=Grand livre des saints|sous-titre=culte et iconographie en Occident|éditeur=Éditions Créer|année=2006|passage=37|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=6Hwa38EjyoAC}}.</ref>.
Il est encore bien d'autres usages des reliques dans la tradition catholique, par exemple, la diffusion à grande échelle de fragments d'étoffes ayant été en contact avec tel ou tel saint ou avec ses ossements (ainsi dès avant les canonisations de [[Thérèse de Lisieux]] ou de [[Bernadette Soubirous]]). On en espère des miracles qui augmenteront la gloire du saint, voire accélèreront sa [[canonisation]].
Ligne 161 ⟶ 176 :
* La ceinture de la Vierge, le ''[[Sacro Cingolo]]'' (ou ''Sacra Cintola'') conservée à la [[cathédrale de Prato]], en Italie, et présentée, à la foule des pèlerins, cinq fois par an.
* Le [[Saint Ombilic]].
* Le [[basilique Sainte-Marie-Majeure#
* Les [[Présents des Rois mages]], conservés au [[mont Athos]].
* Les restes des [[Rois mages]] sont conservés à [[Cologne]], où ils auraient été transportés depuis [[Milan]] en
* Trois crânes de [[Saints Innocents]], au monastère de [[Abbaye de Coulombs|Coulombs]].
* Le [[Saint Prépuce]].
Ligne 181 ⟶ 196 :
===== Reliques de la Passion =====
* La [[Scala Santa]] conservée à la basilique romaine de [[Saint-Jean-de-Latran]], et qui passe pour l'escalier sur lequel se trouvait [[Ponce Pilate]] quand il s'adressait à la foule.
* La [[Sainte Couronne|Sainte Couronne (couronne d'épines)]] de Jésus : acquise en
* La [[Voile de Véronique|Sainte Face]], linge utilisé par [[sainte Véronique]] pour essuyer le visage du Christ au cours de sa montée au [[Golgotha|Calvaire]]
* La [[Vraie Croix|Sainte-Croix]], appelée également la [[Vraie Croix]], et le [[Titulus Crucis]] auraient été découverts en [[326]] par [[Hélène (mère de Constantin)|Hélène]], la mère de l'[[empereur romain]] [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin I{{er}}]]. Elle a ensuite été fractionnée et dispersée : un fragment et le Titulus Crucis se trouvent à la [[basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem]] de [[Rome]], un autre à la [[Sainte-Chapelle]] de [[Paris]] depuis [[Louis XI]] au {{s-|XIII|e}}.
Ligne 190 ⟶ 205 :
* Le [[Suaire d'Oviedo]] qui aurait recouvert la tête de Jésus de sa mort à sa mise au tombeau.
* Le [[Saint Sang (relique)|Saint Sang]] contenu dans un [[Tabernacle (objet)|Tabernacle]] à l'[[Abbaye de la Trinité de Fécamp|église abbatiale de l'abbaye de la Trinité]] de [[Fécamp]] en [[Normandie]].
* Le [[Saint Sang (relique)|Saint Sang]] du Christ conservé à la basilique du Saint-Sang à [[Bruges]], rapporté en
[[Image:Rome San Pietro in Vincoli 12-1-2011 10-38-51.jpg|thumb|right|Chaînes de Saint Pierre, conservées à Saint-Pierre-aux-Liens ([[Basilica San Pietro in Vincoli|San Pietro in Vincoli]]), à [[Rome]].]]
* Le [[Saint-Suaire]], notamment le [[suaire de Turin]], qui a fait l'objet d'une [[datation par le carbone 14]] très controversée.
Ligne 207 ⟶ 222 :
==== Reliques de saints martyrs ====
{{...}}
Les [[martyr]]s chrétiens, dont certains ont existé, et dont les autres sont imaginaires, sont innombrables, et on en a encore inventé un grand nombre au {{s-|XIX|e}} sur des bases prétendument archéologiques.
Ligne 229 ⟶ 244 :
==== Reliques de saints modernes ====
* Les reliques de [[saint François Xavier]] conservées à [[Goa]] en [[Inde]] ont rassemblé en
* Les reliques de [[Benoît Joseph Labre|saint Benoît Labre]] (1748-1783) sont conservées pour une part à partie à [[Amettes]] et pour une autre dans la basilique de [[Marçay (Vienne)]].
Ligne 240 ⟶ 255 :
==== Autres principes de classification ====
[[File:Sainte-Dextre_Basilique_Saint-Etienne.jpg|upright=1.3|alt=La Sainte-Dextre|thumb|''La Sainte-Dextre'', avant-bras droit de [[Étienne Ier de Hongrie|Saint-Étienne]], [[basilique Saint-Étienne de Pest]].]]
Les textes du [[droit canonique]] établissent une hiérarchie précise entre trois types de reliques<ref>''Dictionnaire de la théologie catholique'', Éd Letouzey et Ané, 2005, article [http://jesusmarie.free.fr/dictionnaire_de_theologie_catholique.html relique]
* les reliques dites « insignes » : corps du saint ou partie de son corps telle que {{Citation|la tête, l’avant-bras, le cœur, la langue, la main ou la jambe (mais pas le tibia) ou la partie du corps dans laquelle le saint a subi le martyre, pourvu qu’elle soit entière et pas petite}}.
* les reliques dites « notables » : reliques corporelles provenant de parties du corps moins valorisées (sont ainsi exclus les membres) que les premières (doigt, côte, mâchoires, etc.) ou plus
* les reliques dites « minimes » : reliques corporelles qui ne sont que de petits fragments pouvant être contenus dans des [[reliquaire]]s, des médaillons.
Ligne 272 ⟶ 287 :
** ''ex cilicio'' - du cilice
* La troisième et quatrième classe est formée d'objets qui ont été en contact respectivement avec des reliques de la première et deuxième classe<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Joe Nickell|titre=Relics of the Christ|éditeur=[[University Press of Kentucky]]|date=v2007|passage=19|isbn=}}.</ref> :
** ''ex domo'' - de la maison
** ''ex indumentis''
Ligne 281 ⟶ 296 :
* L'intérêt de certains ossements est parfois majoré par la signification symbolique du membre conservé. Ainsi le bras d'un roi comme saint Étienne de Hongrie sera spécialement considéré, ou la tête d'un théologien comme Thomas d'Aquin.
Les reliques peuvent enfin être classées selon une typologie fonctionnelle : relique [[thaumaturge]], relique protectrice ou [[tutélaire]], relique de pouvoir, sans qu'il soit toujours possible d'établir une distinction nette entre ces différents types<ref>{{Ouvrage|auteur1=Philippe George|titre=Reliques & arts précieux en pays mosan : du haut Moyen
==== Collections célèbres de reliques chrétiennes ====
Ligne 296 ⟶ 311 :
Le monde chrétien est traversé au cours des siècles par une tradition critique qui s'exprime, concernant la question des reliques, de diverses manières.
* Les [[évêque]]s dès le départ revendiquent un discernement qui l'emporte sur la piété populaire mal éclairée, et même sur les pouvoirs éventuellement thaumaturgiques des reliques vénérées par leurs ouailles. Ainsi [[saint Martin de Tours]], dès le {{s-|IV|e}} fit jeter aux ordures les restes d'un personnage injustement vénéré<ref>[[Sulpice Sévère]], ''Vie de saint Martin'', chapitre VIII.</ref>.
* Le culte des reliques est dévalorisé dès le [[haut Moyen Âge]] par des auteurs tels que [[Claude de Turin]] au {{s-|IX|e}} et [[Guibert de Nogent]] au {{s mini-|XI|e}}<ref>{{Article|auteur=[[Jacques Chaurand]]|titre=La conception de l'histoire de Guibert de Nogent|périodique=Cahiers de civilisation médiévale|date=1965|volume=8|numéro=31-32|pages=381-395|url texte=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ccmed_0007-9731_1965_num_8_31_1351}}.</ref>.
* La [[Réforme protestante]] se situe dans cette tradition critique, à la suite de [[Jean Calvin]] qui, dans son ''[[Traité des reliques]]''<ref>http://www.info-bible.org/histoire/reforme/traite-des-reliques-jean-calvin.htm Jean Calvin, traité des reliques</ref> (1543), rejette la vénération des reliques comme un dévoiement inexcusable du christianisme authentique. Les [[protestants]] remettent violemment en cause le culte des reliques, n'hésitant pas, dès qu'ils en ont l'occasion, à détruire les restes vénérés des saints en même temps que les statues ou autres représentations iconographiques. Dès lors la tradition n'est plus continuée que par les catholiques et les orthodoxes.
* La Contre-Réforme catholique qui s'ensuit, par la voix du [[concile de Trente]], réaffirme la légitimité du culte voué aux reliques, comme aux tombeaux et aux images; mais elle place la dévotion populaire sous le contrôle étroit de l'[[évêque]], chargé d'en expurger toute ''[[superstition]]'', notamment lors de ses visites pastorales dans les paroisses. Le clergé jette alors en effet un regard de suspicion sur l'individualisme du pèlerin et ses dévotions ''indécentes''<ref>Bernard Heyberger (maître de conférences à l'université de Haute-Alsace / Mulhouse), in ''Dictionnaire de l'Ancien Régime'', sous la direction de Lucien Bély, Paris, PUF, 1996</ref>.
* Lors de la [[Révolution française]], de nombreuses reliques sont à nouveau sauvagement détruites comme vestiges du « fanatisme ».
*Au début du {{S|XX}}, [[Sante Ferrini]] dénonce avec ironie le culte des saints et la vénération de leurs reliques. Pour convaincre ses lecteurs, tel Calvin en son temps, il dresse l’inventaire chiffré des reliques de quelques saints parmi les plus connus espérant démontrer ainsi l’absurdité d’une telle croyance qu’il considère comme une vaste escroquerie organisée par le clergé<ref>{{Ouvrage|langue=
* Enfin, à partir des années 1960, le catholicisme est gagné à son tour par une certaine indifférence, sinon même par une certaine hostilité dans une partie de son clergé qui incite à écarter dans la vénération des reliques ce qui relève de la superstition. De nombreux reliquaires sont dès lors livrés à l'abandon, voire à la décharge. Certaines reliques de la première classe se retrouvent en vente sur Internet mais certaines ostensions continuent d'attirer des foules ([[ostensions limousines]], [[suaire de Turin]])<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Henri Tincq]]|titre=Petit Larousse des religions|éditeur=Larousse|année=2010|passage=287|isbn=}}.</ref>.
== Vénération des reliques dans l’islam ==
Ligne 317 ⟶ 332 :
* Collection de reliques du [[palais de Topkapi]] à [[Istanbul]]. [[Byzance]], capitale d'un vaste empire chrétien, avait possédé de nombreuses et précieuses reliques, qui furent pour la plupart pillées par les croisés. Après la prise de la ville par les Turcs, la ville devint sous le nom d'[[Istanbul]] la capitale de l'[[Empire ottoman]] et les sultans eurent à cœur de constituer à leur tour une prestigieuse collection de reliques musulmanes, qui comprend aujourd'hui plus de 600 pièces conservées au [[palais de Topkapi]] à [[Istanbul]] : épées de [[Mahomet]] (sabres de combat et deux épées en or enrichies de pierres précieuses), manteau de Mahomet, cheveux et poils de sa barbe, trace de ses pas, etc.
* Rituel en vigueur à Topkapi. Bien que la plupart de ces reliques soient exposées en permanence, les plus importantes d'entre elles ne le sont que pendant le mois du [[Ramadan]]. Le [[Coran]] est récité de manière ininterrompue auprès de ces reliques depuis qu'elles ont été transférées à Topkapi.
* Poils de la barbe de Mahomet. On en conserve en différents lieux du monde islamique. Les uns sont à [[palais de Topkapi|Topkapi]]. Un autre également en Turquie, dans le [[mausolée]] [[Jalal Ud Din Rumi|Mevlana]] de [[Konya]]. Un autre poil de la barbe de Mahomet est conservé en Inde dans la mosquée Azratbal de [[Srinagar]], la capitale de l'État de Jammu et [[Cachemire]]. En
* Une paire de chaussures de Mahomet, très sacrée pour les pèlerins musulmans, qui se trouvait à [[Lahore]] au [[Pakistan]] a été volée en 2002<ref>{{Lien web|langue=en|url=http://news.bbc.co.uk/2/hi/south_asia/2165780.stm|titre=Pakistan police probe relic theft|
* Le sanctuaire de [[Kherqa Sharif]], en Afghanistan, abrite un vêtement que Mahomet aurait porté au cours de l'[[Isra et Miraj|Isra]].
=== Reliques chiites ===
Ligne 329 ⟶ 344 :
== Reliques profanes ==
=== Belgique ===
À [[Liège]], le [[cœur]] d'[[André Grétry]] (
=== France ===
[[Image:Coeur Anne.JPG|thumb|Reliquaire du cœur d'[[Anne de Bretagne]], [[musée Dobrée]], [[Nantes]].]]
* L'usage de l'ancienne France était de conserver, par exemple, le cœur des rois à part, et le plus souvent dans une autre église que le reste de leur dépouille (le roi était en général enterré à la [[basilique de Saint-Denis]], mais son cœur était attribué à une [[congrégation religieuse]] de son choix
* Cette tradition s'est perpétuée sous l'[[Empire français (1804-1815)|Empire]] puis sous la [[République Française (régime politique)|République]] concernant les inhumations au [[Panthéon (Paris)|Panthéon]], particulièrement quand la famille est opposée au transfert des cendres d'un grand homme hors de son cimetière d'élection. Le cas le plus célèbre, mais non le seul, est celui de [[Léon Gambetta]] (1838-1882), dont le cœur seul a été transféré au Panthéon le {{date-|11 novembre 1920}}, tandis que la dépouille du grand homme était laissée au cimetière de Nice. L'urne contenant son cœur a été placée dans une niche de l'escalier descendant à la crypte du Panthéon<ref name=AB15/>.
Ligne 340 ⟶ 354 :
* À l'époque romantique ont fleuri des reliquaires napoléoniens, destinés à honorer le souvenir de l'empereur [[Napoléon Ier|Napoléon I{{er}}]].
* On cite aussi comme une bizarrerie inexpliquée le reliquaire gothique en cuivre doré découvert par les héritiers de [[Vivant Denon]] (1747-1826), contenant entre autres des fragments d'os d'Héloïse et d'Abélard, une partie de la barbe d'[[Henri IV de France|Henri IV]] arrachée à sa tombe en
* À la même époque on a souvent conservé dans différentes sortes de reliquaires des souvenirs familiaux ou galants, tels que, par exemple, la boucle de cheveux d'une personne chère et trop tôt disparue.
Ligne 347 ⟶ 361 :
Les Italiens vénérant les reliques des saints, leur assimilent certains hommes illustres tels que [[Galileo Galilei|Galilée]] :
* Au Musée de la ''Storia della Scienza'' (Histoire des Sciences) de Florence, près des Offices, dans une des vitrines consacrées à de nombreux instruments de Galilée, on trouve également la relique momifiée de l'index de Galilée, celui-là même ayant désigné les astres qu'il voyait avec sa lunette.
* À Padoue, l'[[Université de Padoue|université de « ''la Bô'' »]] conserve, à l'académie, l'épine dorsale de Galilée ; ce qui fait écrire à [[André Suarès]], dans son ''Voyage du Condottière'' : « ''Peuple à reliques : ils ont aussi l'épine dorsale de Galilée, à l'Académie, en rien différente d'une autre épine, un os à moelle pour le pot-au-feu du dimanche. Il faudrait mettre le tout dans un tronc à la Sainte Science ou à Saint Antoine'' »<ref>Éditions Émile-Paul, page 119.</ref>.
=== Russie ===
* Dans un [[Mausolée de Lénine|mausolée]] de granit rouge situé à Moscou sur la place Rouge, repose [[Lénine]], révolutionnaire et homme politique soviétique. Son corps embaumé (selon une méthode exclusive) est exposé au public depuis 1924, l'année de sa mort. Le mausolée est maintenu à une température de 16,6 degrés, le taux d'humidité y est de 70 %.
== Autres applications du terme « relique » ==
Ligne 359 ⟶ 372 :
* On parle aussi de reliques pour désigner les objets que détiennent et vénèrent les [[Fan (admirateur)|fan]]s d'une vedette à laquelle ils vouent un véritable culte, tel que le maillot qui a été porté par un grand joueur. Cet emploi est [[métaphore|métaphorique]].
* Dans les [[jeux de rôle]] en vogue depuis la fin du {{XXe siècle}}, le mot « relique » désigne toutes sortes de [[talisman]]s censés accroître les pouvoirs magiques du personnage dont on joue le rôle.
* En biologie, on parle d'[[espèce relique]] ou de [[population relique]] pour désigner une espèce ou une population d'une espèce qui sont survivantes d'une époque différente ou d'une répartition plus large, à la suite de changements de conditions climatiques<ref>{{Lien web|titre=RELIQUE : Définition de RELIQUE|url=http://www.cnrtl.fr/definition/relique|site=cnrtl.fr|consulté le=2019-03-15}}.</ref>.
== Notes et références ==
{{Références nombreuses|taille=30}}
== Annexes ==
Ligne 388 ⟶ 401 :
=== Liens externes ===
* Elisabeth Féghali, [http://old.citadelle.org/magazine-1-16-Autour-des-reliques-et-de-leur-commerce.cfm Autour des reliques et de leur commerce]
* Jean Calvin, [http://www.info-bible.org/histoire/reforme/traite-des-reliques-jean-calvin.htm Traité des reliques]
|